Va-t-on assister à un blocage du conseil municipal de l’arrondissement 8 de Ouagadougou ? C’est la question qu’on peut se poser après la conférence de presse animée le 12 juillet 2016 par les responsables du MPP dudit arrondissement au sein de leur siège. Ces derniers dénoncent «la trahison » du nouveau maire, Mahamadi Zongo, et avertissent qu’ils mettront tout en oeuvre pour que la mairie échoie à Kassoum Simporé, le candidat désigné à l’issue des primaires.
Cette rencontre avec les hommes de médias a, par moments, des allures de meeting ou de “visite guidée” des locaux du siège du MPP de l’arrondissement
8. En effet, des militants du parti sont venus nombreux à cette conférence de presse témoigner leur soutien au candidat malheureux Kassoum Simporé. De plus, à la fin des échanges, Abdoulaye Sourgou, secrétaire général par intérim du MPP de l’arrondissement, a tenu à montrer aux hommes de médias le matériel de bureautique et de sonorisation du parti. « Tout ça, c’est Kassoum Simporé qui l’a financé pendant la précampagne », a-t-il indiqué. Et d’ajouter : « Mahamadi Zongo a battu la campagne avec l’argent qu’il venait prendre régulièrement avec Kassoum Simporé. Je ne dis pas que ce sont les moyens financiers qui font la politique, mais comment peut-on vouloir être maire sans avoir un seul kopeck ?
» Le décor ainsi planté, revenons en aux faits. En rappel, lors des élections municipales du 22 mai 2016, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) était arrivé en tête dans cet arrondissement avec 7 conseillers sur 13. Les autres partis de la mouvance, à savoir le NTD et l’UNIR/PS, ont, eux, obtenu respectivement 2 et 1 conseillers. Le parti présidentiel et ses alliés avaient donc une majorité confortable de 10 sièges et les partis de l’opposition que sont l’UPC, le CDP et le regroupement d’indépendants NOURA se partageaient chacun 1 siège. Mais voilà, rien ne s’est passé comme prévu. Lors de primaires internes, le MPP a désigné ses candidats pour les postes du Conseil municipal. Ainsi, Kassoum Simporé a été choisi pour le poste de maire. Il était opposé à Mahamadi Zongo qui finalement a été désigné pour le poste de président de la commission finances. Deux autres postes, celui de 2e adjoint et celui de conseiller régional, avaient été
réservés à la mouvance. Mais à en croire Roger Nikièma, conseiller municipal du MPP, « Le NTD a revendiqué les postes de 1er et de 2e adjoints au maire, et l’UNIR/PS la présidence de la commission de l’aménagement du territoire et du
foncier. Mais aucun accord n’a été trouvé.» Cela n’a pas empêché le MPP de rester confiant en sa victoire.
«10 millions et 2 parcelles»
Le 20 juin 2016, les 13 conseillers de l’arrondissement 8 ont été convoqués pour élire le bureau municipal. Mahamadi Zongo qui s’est présenté, contre toute attente, a été élu maire avec 7 voix contre 6 pour Kassoum Simporé. Le président
de séance ayant refusé de signer le procès-verbal, l’élection avait été reportée une première fois au 27 juin et une seconde fois au 2 juillet 2016. A cette occasion, le
reste du bureau municipal a pu être mis en place. Dans leur déclaration liminaire, lue à la conférence de presse, les responsables MPP de l’arrondissement accusent le nouveau maire et le secrétaire général du parti, par ailleurs, conseiller municipal, Moussa Ouédraogo, d’avoir « comploté avec les partis de la mouvance, en dépit des accords, et ceux de l’opposition (UPC, NOURA) pour voler sa victoire au MPP avec la complicité d’un opérateur économique qui leur aurait remis de fortes sommes d’argent ». A propos de cet opérateur économique dont les conférenciers ont refusé de mentionner le nom, le secrétaire général par intérim du MPP de l’arrondissement 8, Abdoulaye Sourgou déclare : « Nous n’avons pas de preuves mais nous savons de quoi nous parlons. Et de préciser : «On entend parler de 10 millions et de 2 parcelles.» Les responsables du parti demandent aux instances nationales de sanctionner Moussa Ouédraogo, qu’ils accusent d’avoir « déserté le parti depuis le jour des élections ». Le nouveau maire, Mahamadi Zongo, avait, quant à lui, été suspendu du MPP pour six mois à compter du 28 juin 2016.
«Nous n’allons jamais l’appeler Monsieur le maire»
Pour les partisans de Kassoum Simporé, l’élection du nouvel édile n’est pas consommée et ils promettent de « revendiquer leur victoire ». « Nous ne reconnaissons pas Mahamadi Zongo en tant que maire. Par conséquent, nous n’allons jamais l’appeler Monsieur le maire. Kassoum ou rien ! », ont martelé Abdoulaye Sourgou et les militants. Pour la suite, Roger Nikièma prévient : « Le conseil est parti pour un blocage. Il ne pourra pas compter sur les 6 conseillers (5 du MPP et 1 du CDP) que nous sommes pour une quelconque délibération », assure Roger Nikièma. Et pour déjà donner le ton, il demande aux militants de se mobiliser ce matin même à la mairie de Boulmiougou, où, selon nos informations
doit avoir lieu la cérémonie officielle de passation de charges entre le président de la délégation spéciale et le nouveau maire, Mahamadi Zongo.
Hugues Richard Sama