Les fidèles musulmans du Burkina ont célébré la nuit du destin ou Nuit d’Al-Qadr, dans la nuit du 2 au 3 juillet 2016 à Ouagadougou. Les festivités marquant cette nuit se sont tenues dans l’enceinte du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO). L’initiative est du Cercle d’études, de recherches et de formation islamiques (CERFI) et de l’Association des élèves et étudiants musulmans au Burkina (AEEMB).
Depuis le 7 juin dernier, les musulmans du Burkina, à l’instar des autres pays du monde, observent le mois du Ramadan. L’objectif de ce mois est d’établir un lien fort entre le croyant et Allah. Ce lien s’établit par une intensification de prières et d’adorations. Et les 10 derniers jours ont une grande importance car il s’y trouve l’Al-Qadr ou la nuit du destin. Cette année, la communauté musulmane du Burkina a observé cette nuit du 2 au 3 juillet dernier, soit à la 27e nuit du mois de Ramadan. Pour la circonstance, c’est l’enceinte du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO) qui a abrité les festivités de cette nuit d’adoration d’Allah et de son messager, Mohamed (Paix et salut sur lui). Selon le président du CERFI, Souleymane Koné, la nuit du destin ou nuit d’Al-Qadr équivaut à 1000 mois d’adoration. « La nuit du destin est une nuit importante pour le croyant d’autant plus qu’elle vaut 83 années d’adoration. Elle est à rechercher dans la dernière décade du mois de Ramadan», a-t-il soutenu. De ce fait, entre lectures du Coran et invocations, les fidèles musulmans ont prié pour la paix et la réconciliation des fils et filles du Burkina, d’où le choix du thème de la conférence publique animée par l’Imam Adama Sakandé : « Problématique de la réconciliation nationale et consolidation de la paix sociale au Burkina Faso. Quelles contributions de la Umma islamique ?». Selon le président du CERFI, Souleymane Koné, le choix de ce thème n’est pas fortuit, en ce sens que le Burkina vient de loin. « Depuis l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et malgré le retour à l’ordre constitutionnel, le front social demeure toujours fébrile. Il y a toujours des remous au sein de la société. Ce qui veut dire qu’il y a un élément manquant. Cet élément manquant est la réconciliation. Il est donc du devoir de chacun de contribuer à résorber cette situation pour une paix véritable dans notre pays. La paix véritable, nous en sommes convaincus, passe par la réconciliation entre les fils et les filles du pays. Le gouvernement ayant décidé de jouer sa partition à travers la création et l’installation du Haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN), il est temps que toutes les composantes de la nation s’invitent à mettre en œuvre les diligences nécessaires pour faire de la réconciliation une réalité », a-t-il soutenu. Convaincu que la communication du conférencier éclairera certainement la lanterne des fidèles musulmans sur cette préoccupation, M. Koné a exhorté chacun des fidèles musulmans à utiliser les voies et moyens afin de parvenir à cette réconciliation très chère à tous les Burkinabè.
« L’enseignement de l’islam doit nous amener à vivre dans la quiétude avec les autres »
Une question et pas des moindres a été abordée au cours de cette nuit d’adoration. Il s’agit de l’incivisme marqué, entre autres, par la défiance de l’autorité de l’Etat et le non- respect des lois et règles de la République. Pour le président du CERFI, Souleymane Koné, le musulman doit incarner les valeurs du civisme en toute circonstance et en tout lieu. « En tant que musulman et pour quelque motif que ce soit, nous ne saurions accepter que l’on défie l’autorité de l’Etat en refusant d’observer les lois et règlements et en remettant en cause les fondements mêmes du vivre ensemble. A l’AEEMB et au CERFI, nous avons la profonde conviction que le Coran, la prière et le jeûne sont censés améliorer notre caractère pour que nous puissions mieux agir dans la cité. C’est pourquoi nous pensons aussi que le Ramadan n’a pas de sens s’il doit juste être une fenêtre d’excellence dans un océan de tares. Le Ramadan est un catalyseur de vertus et de promotion de valeurs sociales. Notre souhait est qu’à son terme, avec tous les acquis spirituels qu’ils ont pu engranger, les musulmans et tous ceux qui ont fait le choix de la démocratie, acceptent de se soumettre à la discipline et au respect de la République. Au-delà des activités de cette nuit, la vie de notre communauté doit également nous préoccuper, car les défis sont entiers et demandent à chacun de nous des contributions déterminantes », a-t-il lancé aux fidèles musulmans. Décortiquant le thème choisi pour la conférence publique, le conférencier, Imam Adama Sakandé, a souligné que la situation que le Burkina vit actuellement interpelle chaque composante de la société. « L’Etat a joué sa partition. Il appartient à chaque communauté d’apporter sa contribution. Nous les musulmans, nous pensons parfois qu’il y a souvent une mauvaise compréhension des prescriptions, des recommandations et des hadits du prophète. Nous devons essayer de mettre l’accent sur des éléments concrets qui doivent amener les musulmans à changer leur comportement. S’ils changent dans leur comportement avec les autres composantes de la société, ils créeront une cohésion sociale, créant des conditions où il y aura la paix. Nous avons tous besoin de la paix. Nous devons travailler chacun de son côté pour la paix. Nous pensons que les éléments que nous avons donnés doivent aider les frères et sœurs à cultiver cela », a-t-il laissé entendre. Et d’ajouter que le message transmis s’adresse aussi bien à de simples fidèles musulmans qu’aux dirigeants des associations islamiques. « A chaque niveau, il faut qu’on incarne les prescriptions de l’islam. Les premiers musulmans ont été l’incarnation des enseignements du prophète, Mahomet. C’est pourquoi, ils ont été des modèles. Nous ne pouvons pas dire que nous sommes des musulmans et refuser de mettre en pratique l’enseignement de l’islam. L’enseignement de l’islam doit nous amener à vivre dans la quiétude avec les autres, sans que cela ne porte atteinte à la cohésion sociale et à la paix », a-t-il lancé aux fidèles musulmans. La conférence publique a été suivie de remise de prix du concours de meilleure lecture du Coran. Des prières et des invocations ont eu lieu à partir de 00h jusqu’à l’aube, et à la différence des années antérieures, les organisateurs de la Nuit du destin ont innové avec la lecture intégrale du Coran. Une lecture faite par une trentaine de fidèles musulmans.
Mamouda TANKOANO