Zorgho- Une personne a été tuée et cinq autres blessées dans de violents affrontements entre les populations de Kougri et de Dawaka, dans la commune rurale de Zam, autour « l’intronisation d’un chef coutumier contesté », a constaté sur place l’AIB.
Un affrontement sanglant s’est déclenché entre les populations de Kougri et de Dawaka le dimanche 19 juin et s’est poursuivi le lundi 20 à Pathé, dans la commune rurale de Zam.
L’intronisation d’un chef coutumier contesté est la pomme de discorde qui a entrainé cette situation. Une personne a perdu la vie au cours de ce malheureux événement, cinq personnes ont été blessées et d’importants dégâts matériels enregistrés.
Pathé, hameau de culture situé à une soixantaine de km à l’Ouest de Zorgho, chef-lieu de la province du Ganzourgou, est depuis dimanche un champ de bataille entre les populations de Kougri et de Dawaka, tous deux villages de la commune rurale de Zam. Il faut se plonger dans les profondeurs de la forêt classée de Pathé pour atteindre les habitations disséminées dans la plaine.
La propriété de ce hameau de culture a longtemps divisé les populations de Kougri (10km à l’Ouest) et Dawaka (12km à l’Est). En effet en 2015, selon les informations recueillies auprès du haut commissaire, le chef de Kougri a intronisé un chef à Pathé et cela a été l’objet d’une vive contestation du côté de Dawaka.
Cette année, ce fut le tour du chef de Dawaka d’introniser un chef à Pathé. Celui-ci, malheureusement, à en croire ceux de Kougri, résiderait à Mokin, village de la commune d’Absouya dans la province de l’Oubritenga. N’ayant donc pas une concession à Pathé, les populations de Dawaka sont venues à Pathé pour construire la cour du nouveau chef. Les populations de Kougri n’en ont pas voulu. C’est alors que les remous ont commencé et le lundi 13 juin, les autorités provinciales avaient déployé la sécurité sur les lieux avant de s’y rendre pour apaiser la situation.
Selon le haut-commissaire, après échanges avec les deux camps, il était convenu de l’arrêt des travaux de construction de la cour du chef et la non-destruction de ce qui a déjà été réalisé.
Mais les faits ne se passeront pas comme indiqué, puisque le dimanche 19 juin, les populations de Dawaka viendront pour poser la toiture de la case achevée. Cette situation a rencontré l’opposition des populations de Kougri et des affrontements ont démarré. Des coups de feu ont été entendus tandis que des bâtons et des machettes ont été empoignés, à en croire les protagonistes. Le bilan de l’affrontement de ce dimanche fait état de 2 blessés dont un de Dawaka à la machette conduit à l’hôpital Yalgado-Ouédraogo (Ouagadougou) et l’autre de Kougri par balle conduit au CMA de Zorgho.
Ce lundi, la police de Zorgho, la gendarmerie et les éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) étaient sur les lieux pour sécuriser la zone. Malgré tout, la tension était toujours vive. Le haut commissaire, Robert Zoungrana, accompagné du directeur provincial de la police nationale de Zorgho et de Madame le préfet, présidente de la délégation spéciale de Zam s’y sont rendu pour inviter les protagonistes au calme et à faire preuve de pardon.
Le premier point de chute a été Pathé. Là, le constat a été que les concessions se sont vidées de leurs occupants. Aucune femme ni enfant n’est visible dans le village. C’est dans la cour du chef intronisé par le chef de Kougri que l’attroupement des bras valides a été perçu. Banderoles d’identification sur la tête et armés de machettes, de fusils calibre 12, de flèches, de lance-pierres, de gourdins, ils attendaient dans un frémissement indescriptible l’arrivée de ceux de Dawaka, qui, disent-ils, ont annoncé leur intention d’incendier la cour du chef. La médiation entreprise par les autorités n’aboutira pas puisque certains, dans la nervosité, arguent que les autorités n’apportent pas de solutions concrètes à leur problème allant même jusqu’à les accuser de partisanes.
C’est dans cette atmosphère que l’on a entendu un cri d’alerte. « Ils sont là ! Ceux de Dawaka sont là ! » En même temps, les jeunes se sont dispersés qui sur des motos, qui à pied pour aller à la rencontre de leurs adversaires. Aussitôt les coups de feu ont commencé à fuser dans les bois, et l’on apercevait entre les arbres une course à l’image d’une battue.
Quelques instants après, les coups de feu ont cessé et ceux de Kougri se sont à nouveau regroupés. Les forces de sécurité ont eu de la peine à empêcher l’affrontement étant donné que les protagonistes étaient éparpillés sur ce vaste terrain. Le bilan de ce bref choc fait état de 1 mort et de deux blessés dont un grave du coté de Dawaka. Somme toute, un des blessés ne cesse de bénir les CRS. Pour lui, il a eu la vie sauve grâce à leur intervention. Ils ont été transportés par le haut-commissaire et déposés au CSPS de Wayen.
Le deuxième point de chute a été Dawaka. Arrivé dans ce village à 16h 45, c’est un attroupement de plusieurs dizaines de personnes armées comme ceux de Kougri qu’il a été donné de constater dans la cour du chef. Les échanges des autorités avec le chef du village se sont effectués en présence de ses notables et devant les jeunes dont on peinait à contenir l’ardeur. Pour le haut-commissaire, « toutes les démarches entreprises depuis belle lurette visaient à éviter cela mais hélas ! ». Il les a invités à faire preuve de pardon pour éviter l’effusion de sang.
Sur place, un représentant des jeunes a ouvertement accusé la CRS d’avoir permis à ceux de Kougri de leur tirer dessus. Certains ont même dit que ce sont les CRS qui ont tiré sur eux. Faux, rétorque la CRS qui dit n’avoir pas tiré un seul coup. C’est dans ce climat délétère que les autorités ont pris congé du chef de Dawaka et de sa population après avoir échangé, en retrait, avec quelques sages pour voir dans quelles mesures ils pouvaient aller enlever le corps de la victime.
Moïse SAMANDOULGOU