Abraham Badolo, président de l’Alliance pour la Défense de la Patrie (ADP), une organisation de la société civile burkinabè a invité les nouvelles autorités post-transition "à renforcer" les relations avec la Côte d’Ivoire où plus de six millions de Burkinabè y résident, dans un entretien dimanche à ALERTE INFO.
Quelle appréciation faites-vous de la délégation conduite par Salif Diallo, président de l’Assemblée nationale burkinabè qui s’est rendue en Côte d’Ivoire dans le cadre du renforcement de la coopération ?
L’ADP a félicité cette sortie parce qu’il était temps qu’une délégation aille rencontrer le président ivoirien Alassane Ouattara pour lui signifier que malgré tout nous sommes frères et nous le resterons. Et cela parce que nous sommes liés par l’histoire et par la géographie. Donc nous avons félicité l’initiative et demandé que le gouvernement travaille plus à renforcer le Traité d’Amitié et de Coopération (TAC) entre nos deux nations qui avait été ternie pendant la transition.
Que pensez-vous de la sortie de Safiatou Lopez, Coordinatrice du Cadre de Concertation des Organisations de la Société civile (CCNOSC) qui dit craindre que la justice subisse le même sort que l’Assemblée qui a été saccagée fin octobre 2014 ?
Vous savez Safiatou Lopez est une grande sœur que j’aime beaucoup et on s’attend parfaitement. Mais nous avons décrié cette sortie parce que pour nous ce n’est pas le rôle d’une organisation de la société civile de donner des leçons à la justice. Ces genres d’actes contribuent à influencer la justice et pour nous il impératif que les jugent puissent faire leur travail sans être influencer par quoi que ce soit.
Nous avons vu que sous la transition des gens ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête du putsch (du 16 septembre 2015) et la justice ne nous a pas dit s’ils sont coupables. Aujourd’hui, seule elle (justice) peut nous dire si les accusés sont coupables ou pas. Et si la justice leurs accorde la liberté provisoire c’est parce qu’elle estime que c'est leurs droits et non à la population d’influencer leur jugement. Si je prends mon cas, j’ai été arrêté lors du putsch et entendu par la gendarmerie nationale, puis après cinq jours de détention j’ai été libéré. Pendant ce temps des individus avaient fait circuler ma photo sur les réseaux sociaux pour dire que je suis un indic du Régiment de Sécurité présidentielle (RSP, auteur du coup d’Etat, démantelé) ce qui était faux.
Donc si je me réfère à ce genre de situation, ça voudrait dire qu’on devait me laisser à la gendarmerie ou m’amener à la Maison d’Arrêt et de Correction de l’Armée (MACA). C’est-à-dire des individus ont monté le coup et je devais assumer ou endosser. Ce sont des genres d’actes d’incivisme et ce n’est pas un exemple qu’ils sont en train de donner à la nouvelle génération. Ca n’éduque pas notre jeunesse c’est pourquoi nous avons décrié cette sortie.
Alors que répondez-vous à ceux qui estiment que la justice est manipulée par les politiques surtout avec la libération ces temps-ci des ex-dignitaires du parti de l’ex-président Blaise Compaoré?
Aujourd’hui est-ce que Safiatou Lopez ou la population à la preuve qu’Eddie Komboïgo, président du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), que j’appelle affectueusement grand frère est vraiment impliqué dans le coup d’Etat ? Nous savons tous que ce monsieur à un moment donné avait disparu et n’avait pas pris part aux différentes réunions de la délégation étrangère qui était venue pour ramener la situation à la normale. Si Mme Lopez a des preuves qu’elle saisisse la justice. Sinon si elle le dit parce qu’elle n’aime pas la tête du monsieur là il y a problème.
Si après des enquêtes qui ont bien suivi les procédures judiciaires, la justice aboutit au fait qu’il doit être libéré provisoirement cela ne devait pas déranger un citoyen burkinabè parce que quoi qu’on dise, Eddie Komboïgo est un Burkinabè donc un frère qui a de la famille ici. Si des gens se sont pas contents et accusent les juges de ne pas faire leur travail, qu’est-ce qu’ils veulent ? Que les juges le condamne même s’il est innocent.
Quelle est votre opinion sur le fait que le président burkinabè Roch Kaboré a une fois encore décrié la gestion de l’ex-Premier ministre de la transition Isaac Zida ?
Je dis il faut que le président Roch Marc Christian Kaboré comprenne qu’on n’est plus aux époques antérieures. Aujourd’hui pourquoi ne pas faire cette déclaration médiatique ici au Burkina et la faire à l’étranger (Dakar, à son arrivée pour le sommet de la CEDEAO). Nous avons des journalistes ici compétents qui peuvent traiter l’information. Il n’a qu’à arrêter avec ce genre de pratiques parce que le peuple n’est plus dupe. Les gens ne sont plus prêts à se laisser faire. Zida est Burkinabè avant tout, pourquoi ne pas donner les informations sur les médias au Burkina.
Quant à la position de l’ADP sur la gestion de Zida, aujourd’hui nous nous disons que Zida doit venir répondre et s’il est fautif il doit payer parce qu’il est venu à l’issue d’une insurrection populaire où nos amis sont tombés sous nos yeux. Donc il était censé incarné le vrai changement mais nous avons remarqué qu’il a même fait pire que l’ancien régime et c’est ce que nous décrions. Donc pour nous il est impératif qu’il vienne répondre de gré ou de force.
Aussi nous avons décrié certaine façon d’agir des organisations de la société civile telles que le CCNOSC qui ne sont jamais sorties sous la transition pour demander qu’il ait justice pour nos amis qui sont tombés lors de l’insurrection populaire du 30 et 31 octobre 2014. Elles ne sont jamais sorties demander que l’ex Premier ministre Zida viennent répondre, ni demander que les gens puissent répondre en ce qui concerne tous les dossiers de crimes (sang et économiques). Mais pourquoi s’acharner sur un seul individu pendant que sous la transition des gens on fait pire que l’ancien régime. Donc je dis qu’il faut que les gens travaillent à la paix et à la tolérance dans ce pays.
Quelle appréciation faites-vous de l’annulation du mandat d’arrêt visant le président de l’Assemblée nationale ivoirienne Guillaume Soro ?
Moi j’ai toujours été contre ce mandat parce que j’ai toujours dit qu’il allait desservir le peuple burkinabè notamment nos frères qui résident en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui quand vous partez en Côte d’Ivoire, les Burkinabè vivent comme s’ils étaient chez eux. Je me demande même sur quelle base la justice militaire avait pu lancer ce mandat puisque jusque-là les écoutes téléphoniques n’ont pas été authentifiées. Parce que si c’est seulement les publications des réseaux sociaux, nous, nous disons que ces écoutes n’étaient pas des preuves tangibles pour pouvoir incriminer la deuxième personnalité d’un Etat voisin.
Pour cela, nous apprécions positivement l’annulation de ce mandat qui va permettre à nos frères burkinabè vivant en Côte d’Ivoire d’être plus dans la sérénité parce que beaucoup ont été troublés après l’émission de ce mandat.
On a appris que la justice militaire a transféré le dossier à la justice ivoirienne. Nous espérons que notre justice a adjoint les authentifications des écoutes sinon sans cela ça va être compliqué. C‘est vrai qu’à l’époque Isaac Zida et le président du Conseil national de la Transition (CNT, organe législatif) Chériff Sy avaient dit que ces écoutes ont été authentifiées mais en son temps le ministre de la Sécurité (Alain Zagré) a indiqué qu’elles n’ont pas été authentifiées. Donc il y avait même une contradiction qui nous a permis de dire que ce dossier était un flou total.
Quel est votre avis sur les 92 membres désignés par Roch Kaboré pour la commission Constitutionnelle ?
Je vois que les nouvelles autorités sont en train de commettre les mêmes erreurs que les anciennes autorités. Quels ont été les critères qui ont servi à désigner ces 92 personnes. Moi je suis président d’une OSC je n’ai pas été informé de quoi que ce soit et je n’ai participé à aucune rencontre concernant l’affaire de la nouvelle Constitution.
Aujourd’hui quand vous êtes une organisation sérieuse et vous dites la vérité aux gens on travaille à vous marginaliser, à vous exclure sur des décisions importantes. Je vois certaines OSC qui figurent sur la liste je me demande sur quelle base elles ont été choisies. Et nous ne sommes pas les seules organisations à décrier cela. Donc il faut qu’on renforce la bonne gouvernance dans ce pays.
BBO