Selon l’Organisation des Nations unies, la consommation industrielle d’eau devrait doubler d’ici à 2025, en raison des délocalisations et du développement des industries dans les pays en voie de développement. Des régions comme l’Afrique de l’Ouest devraient donc redoubler d’effort pour trouver les financements nécessaires à la préservation de la ressource. Et pour cela, l’une des solutions est de faire contribuer le secteur privé qui constitue l’un des plus gros consommateurs d’eau.
L’eau est une ressource naturelle limitée, nécessaire à la vie et aux systèmes écologiques, et essentielle au développement économique et social. Malheureusement, elle est de plus en plus menacée par une croissance démographique et une urbanisation combinées, qui entraînent une demande d’eau plus forte dans des régions comme l’Afrique de l’Ouest. Ainsi, les écosystèmes, milieux producteurs et régénérateurs de cette ressource, sont menacés, pollués voire détruits, d’où la nécessité de trouver des solutions pour protéger cette ressource. Au Burkina, la loi d’orientation sur la gestion des ressources en eau a été votée en février 2001 et formalise les principes de gestion. « Les dispositions de la loi prévoient un certain nombre de principes tels que ceux du « préleveur payeur » et du « pollueur payeur », a indiqué le coordonnateur régional de l’Initiative pour la réduction de la pauvreté et la gestion de l’environnement (PREMI), Maxime Somda. Il a fait savoir que sur la base de cette disposition, il y a une autre loi qui a été votée qui se nomme « contribution financière en matière d’eau ». Cette disposition juridique est une taxe parafiscale prélevée auprès des gros utilisateurs d’eau au profit des agences de l’eau (structures chargées de gérer durablement les bassins hydrographiques du Burkina). En outre, il a révélé que le premier décret qui est pris concerne le prélèvement d’eau. Il permet d’appliquer le principe du « préleveur payeur ». Cela concerne, non seulement les prélèvements d’eau, mais aussi toutes activités qui occasionnent une modification des régimes d’eau. Selon ce décret, il faut débourser 1FCFA pour 1m3 d’eau prélevé. L’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA) qui est assujetti à cette taxe paye en moyenne 700 millions de FCFA à l’Agence de l’eau de Nakambé qui gère le bassin dans lequel l’ONEA prélève l’eau pour desservir la ville de Ouagadougou. M. Somda a précisé que pour que le Burkina puisse fixer un tel taux, il a fallu faire une étude financière et économique avec l’Office national des Eaux et assainissements (ONEA) pour définir le taux à appliquer sans que cela n’ait une incidence sur la facture du consommateur. Toutefois, il a souligné que pour le moment, seul l’ONEA paie cette taxe. Il existe actuellement, une sensibilisation des autres gros utilisateurs à la payer. « Mais pour que ces taux n’influencent pas les prix unitaires de l’entreprise, l’Etat est en train de travailler avec ces usagers, à trouver des taux adaptés », a attesté le coordonnateur régional du PREMI, Maxime Somda. Il a ajouté qu’il existe un autre décret qui est pris pour créer une police de l’eau. Maintenant, il y a un travail qui est en train d’être fait pour l’applicabilité de ce décret. Il a même révélé que les rapports sur la police de l’eau ont été validés et seront déposés au Conseil national de l’eau qui regroupe tous les acteurs de l’eau (l’Etat, le privé, les ONG…). Par ailleurs, il a expliqué que la loi dispose que l’on ne doit pas taxer les consommations d’eau domestique. Le consommateur peut donc prélever jusqu’à 2000 m3 d’eau par jour sans être taxé. Ce qui signifie que la loi a néanmoins préservé le caractère social de l’eau.
Les réticences du secteur privé
Contrairement au Burkina, même si le cadre juridique est planté en Côte d’Ivoire, les décrets d’application n’ont pas encore été pris, à cause des péripéties politiques que le pays a connues. Le chef de service de la réglementation à la Direction , a indiqué que le secteur privé a été impliqué dans une étude qui permet de savoir comment ces structures sont prêtes à débourser en rapport avec leur consommation d’eau. « C’est en fonction de ces seuils que nous allons fixer les redevances. La principale difficulté est que beaucoup de ces entreprises pensent que payer une redevance va grever leur budget », a-t-il avoué. Argument que confirme le directeur de production d’Abidjan de la Société de distribution d’eau de Côte d’Ivoire (SODECI), Olivier François Gosso. « Nous sommes d’accord pour le principe du « préleveur payeur », mais s’il y a une taxe à payer, cela risque de se répercuter sur la facture d’eau », a-t-il averti. Il se dit conscient de la nécessité de protéger la ressource pour les générations futures. Cependant, il a souhaité que chaque acteur joue son rôle, c’est-à-dire l’Etat, le consommateur et l’entreprise. Il a suggéré que compte tenu du fait que c’est l’Etat ivoirien qui définit la politique de l’eau et qui fixe les prix, qu’il puisse également créer l’environnement juridique nécessaire à appliquer cette loi. En somme, une volonté politique est nécessaire dans tous les Etats ouest-africains pour obliger chaque acteur à jouer son rôle dans la protection de la ressource.