La sortie tonitruante de Safiatou Lopez devant le palais de justice de Ouagadougou, qu’elle menace d’incendier, n’a pas laissé indifférent le Parquet qui a, sur sa page Facebook, réagit pour dénouer l’attitude de dame Lopez et indiquer que « ses propos incendiaires sont méticuleusement analysés et seront appréciés avec les rigueurs juridique et judiciaire ».
Une organisation de la société civile dénommée Association pour la promotion de la démocratie et de la participation citoyenne (APDC) dirigée par monsieur Guinko Désiré et madame Lopez/Zongo Safiatou a demandé et obtenu de la délégation spéciale de la commune de Ouagadougou une autorisation dont l’objet était d’organiser un sit-in devant le palais de justice aux fins de contester les décisions de liberté provisoire de certains inculpés qualifiés «d’anciens dignitaires», qui seraient en déphasage avec l’esprit de l’insurrection populaire et de la résistance. Après que les deux leaders suscités ont tenu des propos discourtois de toute sorte à l’endroit de l’institution judiciaire, madame Lopez/Zongo Safiatou a martelé « Ça nous fera mal que le palais de justice connaisse le même sort que l’Assemblée nationale, mais si la justice ne nous donne pas le choix, on n’aura pas le choix ».
Le Procureur du Faso regrette l’octroi de cette autorisation de la délégation spéciale de Ouagadougou en vue d’une manifestation qui s’analyse comme une atteinte grave au principe républicain de l’indépendance de la justice, et tient à rappeler que le moyen légal de contester une décision de justice est l’exercice des voies de recours. La manifestation n’avait pas pour but de dénoncer des actes contraires à l’éthique et à la déontologie dans le traitement d’un dossier judiciaire, mais de contester le sens dans lequel le juge a rendu sa décision. Une organisation de la société civile respectueuse des principes de fonctionnement de l’Etat de droit ne peut pas avoir une telle revendication.
Il est à rappeler que l’indépendance de la justice est un principe sacro-saint qui doit être respecté tant par les pouvoirs exécutif et législatif que par l’opinion publique. La justice est certes rendue au nom du peuple, mais il y a lieu d’observer que les aspirations de cette population peuvent ne pas coïncider dans certains cas avec la réalité de la loi sous l’autorité de laquelle le juge rend sa décision. La «justice d’opinion» telle que revendiquée par les manifestants d’hier s’accommode mal avec l’Etat de droit démocratique et est de surcroît une cause d’insécurité judiciaire pour tous les citoyens, donc une injustice.
En conséquence, cette justice «d’opinion» ou à tout le moins de vengeance revendiquée déshonore notre pays et ne saurait être effective dans notre juridiction. Nous n’allons jamais céder face aux revendications populistes et vides de tout bon sens pour sacrifier des droits dans le dessein éhonté de plaire à tout prix à une certaine opinion publique. Notre attitude est et sera guidée par la vérité de la loi et des faits. Loin de nous toute idée de chercher à empêcher des critiques relatives à notre travail juridictionnel. Nous souhaitons plutôt que ces critiques se fassent suivant les règles de l’art afin de nous permettre de satisfaire les préoccupations des justiciables.
Notre adresse email parquettgi.ouaga@justice.gov.bf a été utilement communiquée afin de permettre à tout citoyen de dénoncer des faits infractionnels (infractions commises par toute personne y compris les acteurs judiciaires dans le traitement d’un dossier) au Procureur du Faso, mais ces dénonciations se font toujours attendre et certains s’attendent à ce que des gens soient condamnés sur la base de la rumeur. Malheureusement, les manifestants d’hier n’étaient pas animés par cet esprit et les propos incendiaires qui ont été tenus sont méticuleusement analysés et seront appréciés avec les rigueurs juridique et judiciaire qui conviennent.
Le Parquet