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Nomination de Lassane Sawadogo á la tête de la CNSS : « récompense á un militant du MPP que l’on n’a pas pu caser » (CFOP)
Publié le jeudi 19 mai 2016  |  L`Observateur Paalga
MBDHP
© aOuaga.com par A.O
MBDHP : un visiteur nommé Zéphirin Diabré
Vendredi 15 avril 2016. Ouagadougou. Le chef de file de l`opposition politique (CFOP), Zéphirin Diabré, a rendu une visite de courtoisie aux responsables du Mouvement burkinabè des droits de l`homme et des peuples (MBDHP)




Intervenue lors du conseil des ministres du mercredi 11 mai 2016, la nomination de Lassané Sawadogo, ancien ministre de la Fonction publique, continue d’alimenter la chronique. A travers la présente déclaration, le chef de file de l’opposition politique (CFOP), Zéphirin Diabré, condamne ce qu’il considère comme une perpétuation des pratiques malsaines du trio RSS sous le régime de Blaise Compaoré.

C’est avec stupeur que l’opposition politique, comme tous les Burkinabè, a appris, en écoutant le compte rendu du Conseil des ministres du 11 mai 2016, la nomination au poste de directeur général de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) de M. Lassané Sawadogo, ancien ministre de la Fonction publique et actuellement député MPP de la province du Zondoma.

Cette nomination est l’illustration parfaite du bafouement par le président Roch Marc Christian Kaboré et son gouvernement, des principes de bonne gouvernance et de lutte contre l’impunité, proclamés par l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Il s’agit d’abord d’une manœuvre politicienne, qui consiste à donner la CNSS en récompense à un militant du MPP que l’on n’a pas pu caser. Cela était d’autant plus urgent que M. Sawadogo Lassané fait partie de la cohorte des frondeurs qui harcèlent la direction du MPP, lui particulièrement, parce qu’il n’a pas obtenu le poste de ministre qu’on leur avait promis pendant la campagne électorale. Tout porte à croire qu’il s’agit là d’un lot de « consolation » parce que rien dans la formation et le parcours professionnel de l’intéressé ne le prédispose à la gestion d’une caisse de retraite et d’allocations sociales. La CNSS, dont tout le monde connaît l’importance pour la retraite des vaillants travailleurs burkinabè, sert ainsi de monnaie d’échange dans une transaction politique visant à calmer des revendications au sein du parti au pouvoir.

Deuxièmement, cette nomination s’inscrit dans le prolongement des méthodes révoltantes que le « trio RSS » appliquait lorsqu’il faisait la pluie et le beau temps sous le régime de Blaise Compaoré, méthodes qui consistaient, entre autres, à nommer à la tête de nos sociétés d’Etat des militants caciques du parti au pouvoir, quand bien même ceux-ci n’auraient pas eu le profil adéquat.

La CNSS, en particulier, a été le lieu favori de la mise en œuvre de cette pratique, comme l’atteste le profil des différents DG qui se sont succédé à sa tête au cours des deux dernières décennies. Ces militants politiques que l’on place à la tête de la CNSS sont potentiellement des instruments pour renflouer les caisses du parti au pouvoir, offrir des marchés aux parents et amis des puissants du moment et, pire, utiliser cette manne financière pour prêter de l’argent aux opérateurs économiques proches du pouvoir, ou prendre des participations dans des projets pilotés par des prête-noms.



Lassané Sawadogo a été limogé avec fracas en 2007



C’est cette tradition de pillage que la nomination de Lassané Sawadogo laisse entrevoir.

Enfin, et c’est le plus inquiétant, le palmarès personnel de Lassané Sawadogo en matière de gestion des fonds publics pose problème et nous conforte dans nos craintes. Nommé ministre en 2003, Lassané Sawadogo a été limogé avec fracas en 2007, pour mauvaise gestion, notamment en raison de son implication dans le scandale de la CARFO, révélé par des enquêtes de la Cour des comptes et de l’Inspection d’Etat. Les rapports de ces deux institutions à son encontre étaient si accablants que le régime d’alors n’a pas eu d’autre choix que de le limoger, malgré les puissants soutiens politiques dont il bénéficiait.

En exemple, dans le rapport public 2008 de la Cour des comptes sur la gestion de la CARFO, et portant sur la période où M. Lassané Sawadogo était ministre de tutelle, il est écrit en page 210 et 211, sous la rubrique « Du bon emploi des deniers publics », ce qui suit :

« Il a été relevé de constater que certaines pratiques dans les dépenses de la CARFO sont contraires au bon emploi des deniers publics. Il en est ainsi :

- des dons et prélèvements de carburant pour les missions privées du ministre de tutelle technique (M. Lassané Sawadogo), du Secrétaire général du ministère et d’autres personnalités ;

- d’un prêt d’un million de francs (1 000 000) FCFA pour le carburant du ministre de tutelle technique (M. Lassané Sawadogo) non remboursé ;

- des missions privées du ministre de tutelle technique (M. Lassané Sawadogo) effectuées avec le véhicule de la CARFO, avec prises en charge du chauffeur et des frais de route.

Au total, sur un montant de 3 602 000 FCFA de carburant hors activités CARFO, 2 612 000 FCFA ont été destinés au ministre de tutelle (M. Lassané Sawadogo) ».

Le même rapport dénonce en page 212, l’immixtion grave du ministre Lassané Sawadogo dans le dossier de la construction du siège de la CARFO à Ouaga 2000, en ces termes :

«- le Conseil d’administration en ses séances des 12 janvier et 25 avril 2007 et par délibération n°07-016/MFPRE/CARFO/CA du 09 mai 2007 avait annulé la procédure de passation du marché entamée pour l’exécution du projet de construction.

Le ministre chargé de la tutelle technique (Lassané Sawadogo), par lettre n°2007-059/MFPRE/CAB du 14/05/2007 a invité le Conseil d’administration à surseoir à la délibération n°2007-016/MFPRE/CARFO/CA du 25/04/2007 ».


Le président Roch tend à perpétuer des pratiques malsaines

Les différentes investigations faites par les corps d’Inspection sur la gestion de M. Lassané Sawadogo ont conduit à l’émission d’ordres de recettes contre lui, pour l’obliger à rembourser des sommes importantes indûment prélevées.

Est-il raisonnable, après cette expérience, de confier encore une caisse de retraites à M. Lassané Sawadogo ?

La CNSS fait partie des « entreprises à caractère stratégique ». De ce fait, la nomination de son directeur général relève directement d’une décision du Président du Faso.

Le président Roch Kaboré est donc responsable de cette nomination, et c’est pour cela que l’Opposition politique l’interpelle personnellement. Si la loi a établi que c’est le Président du Faso qui nomme les dirigeants des entreprises à caractère stratégique, c’est parce que le législateur a pensé que vu son statut, il a le pouvoir de résister aux pressions politiques ou clientélistes et de nommer des personnes compétentes, intègres et patriotes à ces postes.

Malheureusement, il nous est donné de constater, qu’en matière de nomination aux hautes fonctions, le Président Kaboré tend à perpétuer la pratique malsaine de copinage politique qui a fait tant de mal à notre pays. Cette nomination à la tête de la CNSS ne répond à aucun souci de préserver l’avenir de nos retraites. Elle n’est pas un exemple de bonne gouvernance, ni un choix qui rassure.



Ce nouveau – ancien pouvoir est revenu aux méthodes détestables



C’est pour cela que l’Opposition politique la dénonce, et dit clairement qu’elle n’acceptera pas que l’argent de nos retraites soit mis dans les mains d’un prédateur, qui a déjà été épinglé par nos services d’inspection.

Fort de ce constat, l’Opposition politique :

demande instamment au président Roch Kaboré d’annuler le décret portant nomination de M. Lassané Sawadogo comme directeur général de la CNSS ;
invite les travailleurs de la CNSS à faire preuve de grande vigilance dans cette affaire, et à se mobiliser pour éviter que l’avenir de leur maison soit compromis ;
alerte l’opinion publique sur les dérives de ce nouveau –ancien pouvoir, qui est rapidement revenu aux méthodes détestables décriées par notre peuple, et qui se comporte comme si rien ne s’était passé au Burkina Faso ;
invite le gouvernement, à procéder sans délai à une relecture de la loi relative aux entreprises stratégiques, afin que des dispositions adéquates y soient introduites, pour éviter le genre d’abus auquel nous sommes en train d’assister ;
invite les Burkinabè, de tous horizons, à se tenir prêts pour l’exécution de tout mot d’ordre qu’elle viendrait à lancer, pour contraindre le régime à respecter les aspirations profondes de notre peuple.


Ouagadougou, le 17 mai 2016



Zéphirin Diabré
Chef de file de l’Opposition
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