La grande farce ! C’est le moins que l’on puise dire de la cérémonie d’investiture du président ougandais, Yoweri Museveni, qui a eu lieu, hier, 12 mai 2016. «Moi, Yoweri Katuga Museveni, je jure au nom de Dieu Tout-Puissant, que je remplirai fidèlement mes fonctions de président de l’Ouganda, que je ferai respecter, préserverai, protégerai et défendrai la Constitution, que je respecterai les lois de l’Ouganda et que je veillerai au bien-être des Ougandais », a déclaré solennellement le maître de Kampala, devant un parterre de chefs d’Etat africains venus pour la circonstance. Ne riez pas ! Museveni voudrait se moquer des démocrates du monde entier qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Car, comment un président qui viole honteusement les droits de l’Homme et les libertés individuelles et collectives, emprisonne à tour de bras ses opposants et des journalistes, peut-il se targuer de respecter les lois de son pays et surtout de veiller au bien-être de ses compatriotes ? Les faits parlent d’eux-mêmes. En effet, à la veille même de sa prestation de serment, Museveni a intimé l’ordre à tous les fournisseurs d’accès à l’Internet de bloquer les réseaux sociaux, on ne sait trop pour quelle raison. Et ce n’est pas tout. Le principal opposant au régime, l’intraitable Kizza Besigyé qui avait contesté l’élection du président Museveni, dénonçant des fraudes massives, a été encore mis en prison pour avoir, dit-on, organisé sa propre prestation de serment, le 11 mai dernier.
Museveni n’est pas prêt à quitter le pouvoir, à moins que la nature en décide autrement
C’était sans compter avec la férule de Museveni qui n’hésite pas à réduire au silence toute voix rebelle dans son pays. Comment pouvait-il en être autrement quand on sait que Museveni crie à qui veut l’entendre que l’Ouganda lui doit sa stabilité et sa croissance économique ? C’est à peine s’il n’en fait pas son jardin potager. A ceux qui lui demandaient de quitter le pouvoir, le fils de Ntungamo leur a répondu en ces termes : « Comment pourrais-je quitter une bananeraie que j’ai plantée et qui commence à donner des fruits ? » En tout cas, tous ceux qui rêvaient d’une alternance en Ouganda, doivent déchanter puisque Museveni n’est pas prêt à quitter le pouvoir, à moins que la nature en décide autrement. On imagine bien la gêne qui était la leur lorsque les présidents John Magufuli de la Tanzanie et Uhuru Kenyatta du Kenya se laissaient prendre en images aux côtés de leur hôte du jour qu’ils ont voulu honorer au nom de l’esprit de bon voisinage. Quant aux autres présidents comme Idriss Deby du Tchad, Teodoro Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale, Omar El Béchir du Soudan et Robert Mugabé du Zimbabwe, leur présence à cette messe de requiem de la démocratie paraît pour le moins normale. Ils sont allés apporter leur soutien à un frère satrape. C’est ce que l’on appelle échange de bons procédés entre dictateurs.
B.O.