Ouagadougou - Au moins deux magistrats travaillant sur l’enquête du coup d’Etat manqué de septembre au Burkina Faso ont été dessaisis de ce dossier épineux et médiatique avec des ramifications diplomatiques, ont indiqué lundi à l’AFP de hauts responsables du tribunal militaire à Ouagadougou.
Officiellement, il s’agit d’un réaménagement technique pour simplifier la procédure dans les dossiers du putsch et de l’assassinat de l’ancien chef d’Etat Thomas Sankara, qui a vu la justice burkinabè lancer des mandats d’arrêt contre l’ancien chef d’Etat Blaise Compaoré, réfugié en Côte d’Ivoire, mais aussi contre l’actuel président de l’Assemblée nationale ivoirienne Guillaume Soro.
"Le commissaire du gouvernement (procureur militaire) le lieutenant-colonel Norbert Koudougou, et le juge d’instruction Sébastien Rapademnaaba" ont été dessaisis en vertu de "décrets signés par le président du Faso" Roch Marc Christian Kaboré, également ministre de la défense, selon un haut responsable, magistrat à la justice militaire.
Le dessaisissement de Sébastien Rapademnaaba a été confirmé par un juge d’instruction et le responsable d’un syndicat de magistrat interrogés par l’AFP, qui ont fait état d’un décret présidentiel.
De leur côté, des sources judiciaires et militaires ont pointé du doigt des tiraillements entre les différents magistrats, mais aussi un mécontentement de la hiérarchie face à certaines fuites à la presse de parties du dossier.
M. Koudougou, qui avait organisé plusieurs conférences de presse sur le dossier, est devenu une figure médiatique ces derniers mois. "Pour le commissaire du gouvernement (...) dans notre système (judiciaire), le parquet est soumis à une subordination hiérarchique donc il peut être déplacé quand on le veut", selon le haut responsable, magistrat à la justice militaire.
Au total, trois juges d’instruction, deux juges militaires et un civil instruisaient le dossier du coup d’Etat et celui sur l’assassinat du capitaine Thomas Sankara sous la supervision du commissaire du gouvernement.
Le 28 avril, la Cour de cassation du Burkina a annulé pour vice de forme tous les mandats d’arrêt internationaux émis par ces juges d’instruction du tribunal militaire contre le président Blaise Compaoré pour son implication présumée dans l’assassinat du président Sankara en 1987 lors du putsch qui l’a porté au pouvoir, et contre Guillaume Soro, le président de l’Assemblée nationale ivoirienne pour son rôle présumé dans le coup d’Etat manqué de septembre au Burkina.
Mais le commissaire du gouvernement avait aussitôt annoncé le lendemain que la justice burkinabè allait réémettre ces mandats d’arrêt qui touchent au moins dix-sept personnes parmi lesquelles Fatou Diallo, l’épouse du général Gilbert Diendéré, le cerveau présumé du coup d’Etat manqué du 17 septembre.
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