De 10h à 18h 30, soit plus de huit heures d’horloge. C’est le temps mis par le chef du gouvernement, Paul Kaba Thiéba, pour faire l’état des réalisations du nouveau pouvoir en place pendant les quatre mois écoulés. Cet exercice du vendredi 6 mai 2016 dénommé « Discours sur la situation de la nation », aussi éprouvant tant pour l’orateur du jour que pour les auditeurs, renforcé en cela par la chaleur étouffante dans l’hémicycle, la pénurie d’eau qui règne en maître à Ouagadougou et les nombreuses attentes de la population, devrait plutôt s’intituler «Discours sur la soif de la nation».
Pour qui quittait le centre-ville et dépassait le siège du FESPACO en cette matinée de mai déjà chaude, la présence policière sur la voie indiquait qu’un événement d’importance doit se tenir à quelques jets de pierre de là. Et pour en être plus convaincu, il suffisait d’emprunter une nouvelle bretelle à droite qui mène au petit quartier Baoghin, plus précisément à l’Hôtel des députés transformé par la force des choses en siège de l’Assemblée nationale, une certaine insurrection populaire étant passée par là. A la guérite, il faut montrer patte blanche avec le passage obligé par le détecteur de métaux. Ce sont les mêmes précautions sécuritaires qui sont de rigueur pour avoir accès à la salle où se tiennent les sessions des députés. A 10h19, le président de l’Assemblée, Salif Diallo, et le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba, font leur entrée.
Au second, la redoutable tâche de faire son Discours sur la situation de la nation 2016, en vertu de l’article 109, alinéa 2 et 3 de la Constitution. Le 5 février dernier, au même endroit, il s’était plié à un exercice du genre avec sa Déclaration de politique générale. Cette fois-ci, il y est pour faire aux parlementaires le bilan des quatre mois à la tête du gouvernement et dessiner les perspectives pour l’année en cours. L’occupant du perchoir a néanmoins pris soin de le rassurer en ces termes, bien sûr après les salamalecs d’usage : «Rassurez-vous, monsieur le Premier ministre. Cette fois-ci, il n’y aura pas de vote pour sanctionner votre prestation. Nous savons qu’en quelques mois, vous n’avez pas fait de miracle, mais vous pouvez nous faire l’état de vos réalisations ». Sourire de soulagement de l’invité qui, pendant près de trois heures, fera le tour d’horizon des « prouesses » gouvernementales. Tout y passera : processus électoral, réformes constitutionnelles et de l’Etat, sécurité et autorité de l’Etat, Justice et droits humains, crimes économiques, défense nationale, sécurité intérieure, Koglwéogo, diplomatie, Fonction publique et modernisation de l’administration, dialogue social, économie, secteur privé, énergie, eau, agriculture, élevage, mine, etc. Drapé dans son Faso danfani et mouchoir jetable en main pour éponger la sueur sur son visage, il s’est plié volontiers à cette injonction constitutionnelle.
Le Premier ministre à l’Assemblée Le discours sur la… soif de la Nation De 10h à 18h 30, soit plus de huit heures d’horloge. C’est le temps mis par le chef du gouvernement, Paul Kaba Thiéba, pour faire l’état des réalisations du nouveau pouvoir en place pendant les quatre mois écoulés. Cet exercice du vendredi 6 mai 2016 dénommé « Discours sur la situation de la nation », aussi éprouvant tant pour l’orateur du jour que pour les auditeurs, renforcé en cela par la chaleur étouffante dans l’hémicycle, la pénurie d’eau qui règne en maître à Ouagadougou et les nombreuses attentes de la population, devrait plutôt s’intituler «Discours sur la soif de la nation». L’arrivée du président de l’Assemblée nationale a annoncé le début de la cérémonie Après son discours, le Premier ministre à l’écoute des députés.
Il sied de faire remarquer que la climatisation laissait beaucoup à désirer et une chaleur presque étouffante régnait dans la salle. Le président de l’Assemblée nationale, à un certain moment, prit soin de s’excuser mais les dégâts étaient visibles. Les visages blêmes, députés, ministres, diplomates et journalistes utilisaient ce qu’ils avaient sous la main pour s’éventer. En cela, la distribution aux invités, avant le début de la céré- monie, du journal-maison a été… bouffée d’oxygène. La soif et la chaleur étaient donc les grands invités de la rencontre, ce que n’avait certainement pas prévu la Constitution. A la fin du discours du chef du gouvernement, trente minutes ont été octroyées pour permettre aux différents groupes parlementaires d’élaborer leurs questionnaires.
La clef de répartition du temps offert à chaque entité pour s’adresser au PM était la suivante : 30 minutes pour le MPP, 20 pour l’UPC, 15 pour le CDP, 15 pour le groupe Burkindlim et 10 minutes pour Paix et Justice. Ceux qui semblaient plus inspirés par les Muses et ont voulu déborder du temps réglementaire ont été vite recadrés par le maître des lieux qu’est Salif Diallo, qui ne manquera pas par ailleurs d’adresser quelques petites piques aux questions de ses anciens amis du CDP et autres anciens mouvanciers qui s’alarmaient - exagéré- ment à son goût - de la situation nationale. Toujours est-il que le nombre de questions mises en exergue a prouvé que les députés avaient vraiment soif d’informations. Conséquence, les invités ont visiblement fini par s’agacer du temps pris pour répondre, à commencer par Salif Diallo qui a finalement envoyé, par le truchement d’un huissier, un bout de papier dans lequel il a certainement demandé au Premier ministre d’avoir pitié de luimême et de ceux qui l’écoutent. Le stock de questions n’a donc pas été épuisé et les retrouvailles ont finalement pris fin aux environs de 18h30, au grand soulagement de tous.
Issa K. Barry & Dieudonné Ouédraogo (Stagiaire)
Une chaleur à ne pas mettre un diplomate dehors
Ponctuels comme à leurs habitudes, les diplomates accrédités dans notre pays ont pris place peu avant 10 heures. Juste avant le début de la session, le service d’information et de communication de l’Assemblée a distribué aux invités le journal-maison dénommé « Les Echos de l’AN », un mensuel d’information du parlement. Après avoir furtivement parcouru quelques pages, il a été rapidement transformé en éventail. En levant le regard, nous remarquons que beaucoup de gens dans la salle, y compris les illustres ambassadeurs, en faisaient de même avec ce parchemin, le seul moyen disponible pour s’offrir de l’air .Il y avait dans l’hémicycle un inconfort lié au manque de système d’aération et à la climatisation défectueuse.
Le microclimat qui y régnait n’était pas du tout accueillant ni pour les députés, pourtant habitués aux rigueurs tropicales, encore moins pour nos hôtes étrangers, notamment occidentaux. Qu’on ne nous dise pas que, une fois de plus, la légendaire loi de l’hospitalité burkinabè a été respectée. Tout au long de son intervention, il était visible que le PM aussi suffoquait. Il a eu maintes fois recours à son mouchoir de poche pour éponger l’abondante sueur dans laquelle il était trempé. Dans l’aprèsmidi, de géants brasseurs d’eau et d’air bourdonnants ont été installés, remédiant un tant soi peu au supplice de ceux qui étaient condamnés à rester en salle, nos chers diplomates ayant profité de la première occasion pour s’engouffrer précipitamment dans leurs voitures climatisées. Malheureusement, le bruit des pales de ces infernales machines a créé un autre désagré- ment et non des moindres : l’on ne s’entendait plus. Il n’était pas besoin d’un long discours pour connaître la situation de la nation. L’état de la nation était dans la salle : la chaleur et la soif… de changement.