Camarades militantes et militants,
Camarades travailleuses et travailleurs des secteurs public, parapublic, privé et informel Burkinabè,
Camarades élèves et étudiants,
Chers invités,
Merci d’être présents ce matin pour la commémoration du cent trentième anniversaire de la lutte héroïque des ouvriers de Chicago.
Ce premier mai 2016, nous le commémorons dans ces locaux flambants neufs de la Bourse du Travail que nous avons officiellement réceptionnée le 3 mars 2016. C’est l’occasion pour nous de réitérer nos remerciements au gouvernement, aux différents ministres qui se sont succédé à la tête du département de la Fonction Publique et du Travail depuis 2006, de rendre hommage à nos devanciers qui ont suivi avec abnégation le dossier. C’est aussi l’occasion de réitérer nos félicitations et remerciements à tous ceux qui ont assuré la conception, la mise en œuvre et le contrôle des travaux, aux services financiers du MFPTPS, aux vaillants travailleurs et ouvriers qui ont exécuté le chantier. Enfin, c’est l’occasion de rappeler au gouvernement que l’engagement qui a été pris en 2013 sur cette rénovation de la Bourse du Travail de Ouagadougou portait également sur celle de la Bourse du Travail de Bobo-Dioulasso et la construction de Bourses du Travail dans les chefs-lieux des onze autres régions du Burkina.
Camarades militantes et militants,
Camarades travailleuses et travailleurs,
Comme de millions de travailleurs à travers le monde, nous commémorons cet anniversaire en hommage à ceux qui ont défriché le terrain de la lutte syndicale en consentant des sacrifices énormes dont les fruits profitent, depuis lors, à la classe ouvrière et aux travailleurs à travers le monde.
C’est l’occasion pour nous de faire un tour d’horizon de la situation internationale et nationale, de faire le point sur les conditions des travailleurs.
Mais auparavant, permettez-moi de vous solliciter l’observation d’une minute de silence à la mémoire de nos camarades décédés depuis le Premier mai 2015, également à celle des victimes du putsch du 16 septembre 2015 et des attaques terroristes du 15 janvier 2016.
Situation internationale
La situation internationale reste marquée par la crise généralisée du système capitaliste impérialiste mondial qui ne cesse de s’approfondir malgré les efforts inouïs que déploient les puissances financières et économiques pour maintenir leur domination sur le monde. Cette exacerbation s’observe au niveau des trois contradictions fondamentales de notre époque à savoir celle qui oppose les puissances impérialistes entre elles, celle qui oppose l’impérialisme et les peuples et celle qui oppose la bourgeoisie au prolétariat.
Ces contradictions se manifestent notamment par :
• les luttes inter-impérialistes pour le repartage du monde, à travers des guerres civiles réactionnaires Irak, Afghanistan, Syrie, Lybie, Yémen, Mali, Côte d’Ivoire, etc.
• le développement du terrorisme, de trafics en tous genres et le blanchiment d’argent à travers les banques et les places boursières, etc.
• la classe ouvrière et les peuples s’élèvent courageusement contre la misère, l’exclusion sociale et économique, la vie chère dans lesquelles les plonge la mondialisation ultralibérale.
En Afrique, malgré l’organisation régulière d’élections, malgré les richesses dont il regorge, notre continent s’illustre négativement aussi bien sur le plan de la démocratie et sur celui du développement. Il ne pouvait en être autrement quand on sait :
- que les élections sont marquées généralement par la fraude, les trafics d’influence et les achats de conscience ;
- que dans de nombreux pays, sont entreprises des révisions constitutionnelles pour permettre à des chefs d’Etat qui totalisent parfois plus de vingt ans au pouvoir de s’y maintenir ;
- que les richesses du continent, qu’il s’agisse des ressources naturelles, des richesses minières, ou des ressources humaines (cerveaux), sont littéralement pillées par les puissances impérialistes et leurs multinationales.
Pendant ce temps, la pauvreté gagne de plus en plus d’africains, l’insécurité se développe avec des agressions meurtrières menées par des bandits mais aussi par des groupes terroristes. Ce développement du terrorisme auquel ne sont pas étrangères les puissances impérialistes est exploité par celles-ci pour installer et renforcer des bases militaires sur le continent dans le but de renforcer leur domination et de défendre leurs intérêts.
Situation nationale
Camarades travailleuses, camarades travailleurs, l’année 2015, première année post-insurrectionnelle a été éprouvante pour le mouvement démocratique en général et pour nos organisations syndicales en particulier. Et pour cause !
Le pouvoir de la transition, au lieu d’être effectivement l’émanation du peuple, a été mis en place à la suite de tractations entre les militaires, les organisations sous-régionales telles que la CEDEAO et l’UEMOA, des OSC, des partis politiques de l’ex-CFOP et même du CDP. Malgré les hommages et autres cérémonies organisées à la mémoire des martyrs de l’insurrection, rien de tangible n’a été entrepris pour leur rendre effectivement justice, notamment par l’identification et la punition des auteurs et commanditaires. On se rappelle que les dignitaires du régime COMPAORE, après avoir bénéficié de la protection du nouveau pouvoir, ont pu quitter tranquillement le pays. Il est scandaleux de constater que près de deux ans après l’insurrection, malgré les pillages subis par les ressources publiques, malgré les nombreux dossiers de crimes de sang et de crimes économiques qui ont jalonné le règne du régime COMPAORE, aucune action sérieuse n’a été engagée pour recouvrer les biens pillés et punir les coupables et autres commanditaires. Ainsi :
Blaise COMPAORE n’est poursuivi que dans le cadre de l’instruction du dossier Thomas SANKARA,
aucune poursuite n’a été engagée contre François COMPAORE et autres membres du clan ;
Aucune suite n’a été jusque-là donnée aux nombreux rapports et audits ayant révélé de mauvaises gestions au niveau des ministères, des institutions, des sociétés. Ainsi, l’immense espoir suscité chez notre peuple et chez bien de peuples du monde par l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre a été trahi par ceux-là qui ont usurpé le pouvoir et qui ont bénéficié du soutien actif de certaines organisations dites de la société civile.
A propos de ce coup d’Etat, il convient de souligner que c’est le caractère de plus en plus impopulaire que prenait le pouvoir de la transition, qui avait fait penser aux putschistes que leur coup allait être soutenu ou à défaut toléré par les populations. Ils n’avaient pas compté avec l’esprit de l’insurrection qui a gagné toutes les couches populaires. C’est pourquoi malgré la complaisance de certaines puissances et le soutien manifeste dont les putschistes ont bénéficié, le peuple a réussi à faire échec au funeste complot. Le mouvement syndical, sans calcul mais avec détermination, a apporté une contribution appréciable à cette résistance populaire à travers le mot d’ordre de grève générale sur toute l’étendue du territoire national et ce jusqu’à nouvel ordre.
La victoire sur les putschistes a ouvert la voie à la salutaire dissolution du RSP et à l’organisation des élections qui ont abouti à la victoire du MPP, parti fondé par ceux qui, pendant plus de vingt ans, ont animé le CDP, bâti le régime et qui pensent s’être blanchis simplement en déclarant qu’ils faisaient leur mea culpa.
Après quelque quatre mois de pouvoir, nous pouvons relever les faits majeurs ci-après :
- L’aggravation de l’insécurité marquée par les attaques terroristes du 15 janvier 2016, une première dans notre pays, mais aussi par la multiplication des braquages sur les routes et autres attaques armées contre les populations. Face à la défaillance de l’Etat dans la protection de populations et de leurs biens, celles-ci ont, en toute légitimité, mis en place des structures d’auto-défense appelées « koglweogo » principalement dans les zones rurales. Les attaques terroristes ont été le prétexte tout trouvé par la France mais aussi par les Etats-Unis d’installer des bases militaires dans notre pays qu’elles cherchent à présent à renforcer, dans le seul dessein de renforcer leur contrôle sur notre pays et sur la sous-région.
- un tâtonnement dans la gestion du pouvoir marquée par une mise en place laborieuse des nouvelles structures et des nouvelles autorités ;
- l’annonce d’un certain nombre de mesures tels que la gratuité des soins pour les femmes et les enfants de moins de cinq ans, le recrutement de 4 200 enseignants à former en 6 mois et qui recevront une allocation forfaitaire mensuelle de 100 000F, le recrutement de neuf mille trois cent (9 300) jeunes dans le cadre des travaux à haute intensité de main d’œuvre.
Concernant la gratuité des soins, il convient d’abord de souligner que les politiques de santé mises en œuvre depuis l’indépendance formelle de 1960 se caractérisent par une absence totale de vision cohérente de la gestion de la santé des populations. En tout état de cause, il faut faire de cette mesure une réalité pleine et entière au profit de notre peuple avec toutes les mesures conséquentes d’accompagnement.
A propos des recrutements, en tant qu’organisations syndicales, nous ne pouvons cautionner le fait que sous prétexte de lutter contre le chômage, le gouvernement lui-même viole les dispositions du Statut Général de la fonction publique et institue un traitement discriminatoire pour des agents qui exécutent le même travail.;
- Les révélations sur la gestion mafieuse de la transition avec les cas de deals de parcelles, les bonus que se sont octroyé les dirigeants de la transition, les cas de blanchiments d’argent portant sur plus de 80 milliards de francs, les multiples irrégularités constatées dans les dépenses publiques notamment dans les passations de marché indiquent que le slogan « plus rien ne sera comme avant » reste toujours à conquérir dans la réalité ;
- Les mises en liberté des maires et autres ministres soupçonnés de malversations, le dégel sans aucune explication à l’opinion des comptes qui avaient été gelés, tout récemment l’annulation des mandats d’arrêt qui suscite de nombreuses interrogations chez les citoyens.
Au niveau du monde du travail, l’enjeu actuel de la lutte syndicale, c’est pour l’essentiel, la lutte pour la mise en œuvre des engagements pris par le gouvernement de la transition à l’occasion de la rencontre annuelle Gouvernement/Syndicats de septembre 2016.
En effet, si les nouvelles autorités ont proclamé qu’elles ne reniaient pas lesdits engagements, force est de constater qu’elles traînent les pieds dans l’application desdits engagements. Cela s’est traduit par des réponses évasives, des promesses peu convaincantes et des justifications récusables à bien d’égards.
C’est ce dilatoire constaté dans la mise en œuvre des engagements, ajouté à la récurrence des atteintes à la liberté syndicale notamment dans le privé qui a conduit le mouvement syndical à prendre les décisions suivantes à la suite de l’AG tenue le 15 avril avec les délégués syndicaux et du personnel de la ville de Ouagadougou :
- adresser une lettre circulaire à l’ensemble des structures de base de l’UAS pour leur demander de tenir des AG unitaires au cours desquelles seront expliqués les différents engagements et leurs enjeux ;
- Exiger du gouvernement un chronogramme précis de mise en œuvre des différents engagements au cours de l’année 2016 ;
- donner au gouvernement le délai de fin avril pour la mise en œuvre effective des activités qu’il a annoncées dans ce délai.
En attendant que les secrétaires généraux se retrouvent, nous pouvons vous annoncer que le gouvernement nous a fait parvenir un certain nombre de documents en guise de réponse aux exigences sus-évoquées. Ainsi, nous avons reçu un chronogramme de mise en œuvre du gouvernement, une correspondance convoquant le comité de relecture de l’arrêté portant procédures de traitement et modalités de liquidation de la retenue salariale pour fait de grève, une autre nous demandant de désigner des représentants au comité chargé de traiter de la question de l’IUTS sur les primes et indemnités des travailleurs du privé et du parapublic.
Dans le même sens, le comité devant finaliser les deux décrets nécessaires à la mise en œuvre de la 081 a effectivement tenu une session à Koudougou et la Commission Consultative du Travail a siégé les 28 et 29 avril passés.
Camarades militantes et militants,
Camarades travailleuses et travailleurs,
Un autre fait qui retient l’attention ces derniers temps, c’est la situation créée à Nagaré où les élèves, après avoir perpétré des actes de violence à l’encontre de leurs enseignants, ont incendié les domiciles de ceux-ci et déchiré le drapeau de l’établissement. Tout en convenant avec beaucoup d’observateurs que ces faits sont graves et inquiétants, nous estimons qu’au-delà de l’émotion qu’ils suscitent, il faut les situer dans le cadre de la crise multidimensionnelle que vit notre société et interpeller l’ensemble des acteurs (Autorités, Parents d’élèves, enseignants, élèves) pour la recherche de solutions à ce genre de dérive. Tout en condamnant ces actes, nous appelons :
- l’Etat et ses démembrements à assumer pleinement leurs rôles régalien de formation des jeunes et de sécurisation du pays et des citoyens;
- les parents d’élèves à s’impliquer davantage dans la vie des établissements et dans le suivi de leurs enfants ;
- les enseignants et les élèves à prendre toujours en compte la nécessaire solidarité et la relation de partenariat qui doit exister entre eux.
Camarades travailleuses et travailleurs,
En terminant notre message, nous nous faisons le devoir d’exprimer notre solidarité militante à l’endroit des travailleurs et des peuples qui se battent à travers le monde pour de meilleures conditions d’existence, pour l’indépendance et la liberté.
VIVE LE PREMIER MAI !
VIVE LA SOLIDARITE ENTRE LES TRAVAILLEURS !
VIVE L’UNITE D’ACTION SYNDICALE !
Unité d'action syndicale
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