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© Autre presse par DR
Réconciliation de Thomas Boni Yayi et Patrice Talon à Abidjan |
Il aura donc fallu un bon repas pour que Thomas Boni Yayi et Patrice Talon, l’ancien et le nouveau présidents du Bénin, redeviennent les amis qu’ils furent jadis. Le miracle s’est produit à Abidjan avec dans le rôle des prêtres sacrificateurs, Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire et Faure Gnassingbé, son homologue togolais. La scène des deux ex-ennemis s’étreignant de façon démonstrative devant les journalistes est d’autant plus inimaginable qu’il y a à peine trois semaines, il a fallu des tractations nocturnes, jusqu’à la veille de la prestation de serment du nouveau président élu, pour que lui et son prédécesseur daignent se rencontrer au palais de la Marina pour la passation de charges. Quelle potion magique les cuisiniers d’ADO ont bien pu mettre dans les plats de leurs illustres convives ? Et qu’est-ce que les deux se sont dit pour fumer ainsi le calumet de la paix ?
On ne sait encore trop. Mais comme à son habitude, c’est un Yayi Boni plutôt lyric qui a déclaré entre la poire et le fromage : «Je voudrais vous dire qu’il y avait cette complicité entre mon frère le président Patrice, et moi-même. C’est une complicité que nous dévoilons aujourd’hui, une complicité positive. Nous étions des amis, nous demeurons des amis et nous resterons toujours des amis». Son vis-à-vis, lui, semble moins enthousiaste lorsqu’il se contente de déclarer : « Cela a été le maître-mot de notre déjeuner aujourd’hui, une bonne ambiance. Et les intrigues de la compétition politique – c’est cela le mot – ne prendront pas le pas sur nos responsabilités d’œuvrer à la paix. Cela prime sur toute autre considération».
On a en effet de la peine à croire que les ressentiments qui se sont cristallisés ces dernières années pussent disparaître en un tour de main, ou, si on préfère, après quelques bouchées d’attiéké bien arrosé. Ne l’oublions pas. A l’origine de cette inimitié légendaire, l’accusation de tentative d’empoisonnement que l’ancien locataire du palais de la Marina avait formulée contre le roi du coton, qui l’avait pourtant auparavant porté à bout de bras et aidé à se hisser au sommet de l’Etat. Et même s’ils avaient tenté de recoller les morceaux, la haine que vouait Yayi à Patrice était si inextinguible qu’il avait déclaré que de son vivant l’homme d’affaires ne serait jamais président du Bénin, avant de parachuter Lionel Zinsou pour faire pièces aux ambitions présidentielles de son adorable ennemi. La suite, on la connait : le métèque Zinsou a été balayé au second tour par l’indésirable Talon avec 65,39% des voix.
Ce qui vient de se passer à Abidjan est plus un gentleman agreement entre hommes d’Etat qu’une véritable réconciliation amicale. Yayi Boni voulant surtout s’assurer que l’autre ne lui a pas réservé un chiot de sa chienne. Il y tient d’autant plus que, pour ses projets futurs (il se susurre dans son entourage que l’ancien président béninois viserait la tête de l’Organisation Internationale de la Francophonie), il a forcément besoin du soutien de l’Etat de l’ex-Dahomey et de son chef. Et si un peu d’attiéké peut aider à avaler la couleuvre…
M. Arnaud Ouédraogo
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