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Approbation de la présidentielle tchadienne par l’Union Africaine : L’UA devrait brûler sa Charte sur la démocratie et la gouvernance
Publié le jeudi 14 avril 2016  |  Le Pays
Dioncounda
© aOuaga.com
Dioncounda Traoré président par intérim du mali




A l’occasion du premier tour de la présidentielle tchadienne, l’UA (Union africaine) a dépêché une mission d’observateurs au pays de François Tombalbaye. Celle-ci, conduite par l’ancien président malien, Dioncounda Traoré, vient de publier une déclaration dans laquelle elle juge le scrutin « crédible et transparent ». La seule insuffisance qu’elle a pu relever se rapporte à ceci : « la composition de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) est à la merci des pressions et des interférences politiques ». Mais cela, précise Dioncounda, n’entache en rien la crédibilité du scrutin. De ce fait, l’UA demande aux partis politiques de respecter le verdict des urnes et de privilégier les recours juridiques en cas de contestation. Le message est clair. Et il ressemble à s’y méprendre, à celui qu’avait adressé Idriss Deby. En effet, bien avant le satisfecit de l’UA et son appel à respecter le verdict des urnes, le candidat Deby avait invité ses compatriotes à ne pas remettre en cause les résultats des urnes. Et ce, alors que la CENI venait à peine d’entamer le dépouillement.

Dioncounda Traoré et ses camarades ont déjà certifié par anticipation les résultats qui sortiront des urnes


L’on peut parier sans grand risque de se tromper que si le dictateur avait le moindre doute sur l’issue du scrutin, il ne se serait pas fendu d’une telle déclaration. Il attend donc sereinement la fin de la comédie car il sait que la CENI annoncera ce que tout le monde sait déjà, c’est-à-dire l’inéluctable coup K.-O. du candidat Déby au premier tour. Là-dessus, il n’a aucun doute à se faire. Ce qui le préoccupe pour le moment, c’est d’étouffer dans l’œuf toute velléité de contestation des résultats que la CENI annoncera d’ici au 23 avril. C’est ce à quoi il s’attèle aujourd’hui, lorsqu’il invite les Tchadiens à s’en tenir au verdict des urnes. Et il vient de trouver un adjuvant de taille pour l’y aider, c’est-à- dire l’UA. Les candidats malheureux qui seraient donc tentés de crier au hold-up électoral, même avec des preuves palpables à l’appui, peuvent d’ores et déjà y renoncer. L’UA les prendrait pour de mauvais perdants, puisque Dioncounda Traoré et ses camarades, au terme de leur villégiature, pardon de leur mission d’observation sur les bords du Chari et de Logone, ont déjà certifié par anticipation les résultats qui sortiront des urnes. Sacrée UA, peut-on s’exclamer en guise d’indignation ! Car, ce faisant, elle vient une fois de plus d’apporter la preuve, pour ceux qui en doutaient encore, qu’elle est un club au service exclusif des chefs d’Etat. De ce point de vue, l’on ne pouvait pas s’attendre à ce qu’elle dise autre chose que ce qu’elle a dit à propos de la présidentielle tchadienne. Car, si elle voulait traduire dans les faits sa Charte sur la démocratie et la bonne gouvernance, à défaut de s’abstenir de faire le déplacement de N’Djamena où le maître des lieux n’a que faire de la démocratie, le minimum serait de fonder son appréciation sur l’ensemble du processus électoral.

L’UA a passé par pertes et profit tous les actes attentatoires à la démocratie

En tout état de cause, ce scrutin s’est déroulé pendant que des opposants et des membres de la société civile étaient en prison. Ensuite, le dépouillement continue de se passer dans le mystère le plus total. Enfin, le scrutin s’est déroulé sur fond d’interdiction des outils de communication qui auraient pu permettre aux Tchadiens de suivre, en temps réel, le déroulement du dépouillement. Tous ces éléments sont suffisamment révélateurs du fait que la présidentielle tchadienne se tient dans un climat de terreur, d’intimidation et d’étouffement de la liberté d’expression. L’UA, peut-on dire, a passé par pertes et profit tous ces actes attentatoires à la démocratie, pour ne voir que le déroulement matériel du scrutin. Mais que voulez-vous ? Il ne pouvait en être autrement, car comme le dit si bien un adage burkinabè, « la gueule tapée ressemble à son trou ». Et le fait de permettre à des dictateurs, au nom du principe de la rotation, d’accéder aux commandes de l’institution panafricaine est une des illustrations parfaites de cet adage. Aujourd’hui, c’est le satrape Deby qui en est le président en exercice. Bien avant lui, d’autres satrapes ont eu l’honneur de piloter l’UA. Le plus illustre, on se rappelle, a été Idi Amin Dada, le boucher de Kampala. Pour toutes ces raisons, l’on peut suggérer à l’UA de brûler sa Charte sur la démocratie et la bonne gouvernance. Car, elle ne sert à rien et tout indique aujourd’hui que cette structure encourage et promeut plutôt des pratiques qui sont aux antipodes de cette belle Charte. Dans la même veine, l’on peut aussi suggérer aux dictateurs de cesser d’organiser des élections dans leur pays. Car celles-ci ne servent à rien. Le moins que l’on puisse dire est qu’elles n’expriment pas le suffrage réel des populations. Les dictateurs, qui savent que personne ne peut les battre dans les urnes, seraient bien inspirés d’utiliser l’argent des contribuables consacré à l’organisation des scrutins, pour construire des dispensaires et des écoles, toutes choses dont le Gondwana manque cruellement aujourd’hui.

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