Investi président du Faso le 29 décembre 2015, Roch Marc Christian Kaboré comptabilise ce mercredi 6 avril 2016 cent jours à la tête de l’Etat burkinabè. En 10 jours, il a pu nommer un Premier ministre qui a constitué depuis mi-janvier un gouvernement qui a pour tâche essentielle d’exécuter son programme quinquennal et de remettre le Burkina Faso sur les rails après une année de Transition politique ponctuée par un putsch manqué. Les attentes sont nombreuses et les espoirs sont plus ou moins permis pour certaine Burkinabè. Quel bilan à chaud peut-on dresser de la présidence «Roch» après ses 100 premiers jours passés au palais présidentiel de Kosyam? Citoyens «lambda» et leaders de la Société civile donnent leurs avis…
Gilbert Somda Hien président de la Ligue des Consommateurs du Burkina:
« Habituellement, nous apprécions les actions d’un chef d’Etat après 100 jours mais dans le cas de Roch Marc Christian Kaboré, on peut dire que ces 100 jours ont été perturbés par les attentats terroristes, le phénomène des Koglweogo et les incendies provoqués ou non dans la ville de Ouagadougou. Au vu de tous cela, on voit qu’il n’a vraiment pas eu le temps de se consacrer à l’exécution du programme pour lequel il a été élu.
En ce qui nous concerne au niveau de la Ligue des consommateurs, nous n’avons pas vu des actions allant dans le sens d’améliorer l’application du droit des consommateurs. Les marchés burkinabè continuent d’être envahis par des produits contaminés et périmés. Nous avons constaté que la tromperie du consommateur continue. La ligue des consommateurs a saisi des produits sur lesquels il y a eu des tromperies de consommateurs. Donc rien n’a changé par rapport à avant.
Nous avons constaté également que les huiles frelatées continuent d’être vendues dans les marchés. Au niveau de la qualité des services, nous avons constaté que les coupures intempestives d’électricité sont toujours légions, ainsi que les coupures d’eau. Les prix des produits de grande consommation n’ont pas connus de baisses véritables. C’est-à-dire que nous sommes même sous la menace d’une augmentation éventuelle de ces prix par les commerçants à cause d’un programme «SYLVIE».
Après les 100 premiers jours, je pense que le président n’a peut-être pas eu le temps de faire quelque chose pour les consommateurs. La Ligue des consommateurs attend de voir parce que nous avons espoir que le niveau de vie du consommateur va connaitre une augmentation dans le sens positif en ce sens que la qualité des produits va connaitre une amélioration. Et que nous allons consommer des produits et des services de bonne qualité. Donc nous attendons de voir.»
Sawadogo Oumar, étudiant à l’université Joseph Ki Zerbo
« Pour ma part j’estime que ça peut aller. Toutefois, le constat est que ces 100 premiers jours présentent un bilan assez mitigé avec encore plus d’attente de la population surtout la frange jeune. Le président a du pain sur la planche, dans la mesure où son début de mandat est marqué essentiellement par un contexte sécuritaire assez tendu. Notamment avec la polémique à propos des Koglweogo ainsi que la grève des magistrats. Voici des faits qui viennent en quelque sorte noircir ce bilan de 100 jours. Par ailleurs, on a l’impression que le gouvernement n’est pas réactif. Mais on attend de voir la suite d’ici là. »
Abdoulaye Diallo, journaliste-gestionnaire du Centre national de presse Norbert ZongoAbdoulaye Diallo
« Pour moi, 100 jours c’est déjà peu pour faire un bilan. J’estime que 100 jours, c’est le moment de donner le top départ de l’orientation de ce que l’on compte faire. Comme bilan, je remarque qu’il y a eu un petit changement au niveau de la conférence de presse. Il n’est pas comme ce que Blaise Compaoré était au niveau des conférences de presse. Je vois qu’il répond à toutes les questions, même celles qui sont pièges ou banales. En Outre, je ne comprends pas ces derniers temps l’acharnement sur la Transition, je trouve que cela ne doit pas constituer le plus important.
Le plus important étant de voir comment relancer l’économie qui est au ralenti, tous ces dossiers importants qui restent en suspens tel le putsch manqué, les victimes de l’insurrection, Norbert Zongo, Thomas Sankara qu’il faut régler. Pour le moment les informations qu’on a reçues sur ces dossiers l’ont été sous la Transition. C’est elle qui les a données. Mais qu’est-ce que le gouvernement de Roch et lui-même vont faire pour l’avancée de ces dossiers ? On ne sent pas grand-chose…Les 100 jours sont déterminés comme un moment où un gouvernement doit savoir où aller. Mais déjà, moi je ne vois pas les sens où il veut aller avec les dossiers pendants. La question du règlement en justice du dossier du putsch, moi je ne vois pas…Je ne vois seulement une tentative autour du mandat contre Guillaume Soro où les questions de diplomatie veulent remplacer les questions de justice. Je ne vois pas clairement là où il veut aller avec ce dossier ».
Sondo Yasmine, secrétaire de direction
« Pour le moment je ne vois rien de particulier, de spécifique. Je me dis que, à partir du moment où il est au début de son mandat, il gagnerait à faire d’énormes efforts pour la réalisation de ses projets. En 100 jours, on ne peut vraiment pas constater quelque chose. D’ici un an, on essayera d’apporter un jugement comme il se doit. Mais pour l’heure, j’ai comme l’impression qu’il existe une sorte de tourmente au sein du gouvernement avec pas mal de problèmes de tout ordre à gérer. »
«Ce que je peux dire est qu’il y a un problème sérieux car, en trois mois de pouvoir, le nouvel exécutif a fait face à plusieurs difficultés. Il y a eu l’attaque terroriste du 15 janvier, la grogne sociale, la question diplomatique avec les mandats d’arrêts contre Guillaume Soro et Blaise Compaoré, etc. Il faut être clair et net, les 100 jours du pouvoir du président Kaboré ne sont pas reluisants. Mais cela trouve son origine au niveau de la Transition. Cette Transition a miné le terrain avant de partir alors qu’elle devait le déblayer pour le pouvoir actuel. C’était à la Transition de lancer la réconciliation nationale, ce qui n’a pas été fait. Objectivement et en se basant sur des calculs politiques, les 100 jours du président n’équivalent à rien car rien n’a été fait d’abord. L’économie est paralysée, le budget révisé de 2016 n’est pas encore adopté, les marchés sont bloqués, la grogne sociale est partout, … Partout il y a des problèmes.
Ce que nous suggérons c’est qu’il anticipe maintenant sur les événements. Il faut aussi qu’il traite tous les dossiers des Burkinabè sur le même pied d’égalité, sans état d’âme. Pour nous, le nouveau pouvoir doit être en mesure de demander à chaque Burkinabè une participation citoyenne car le pays nous appartient et non à personne d’autre. Nous sommes tous concernés et nous le savons tous que la situation nationale n’est pas reluisante. Par ailleurs, il faut qu’il trouve les voies et moyens pour réconcilier les Burkinabè. Qu’il oublie ce qui s’est passé tout en faisant confiance à la justice, gage d’un nouvel élan patriotique »
Congo Gildas, agent de liaison
«Il est trop tôt de porter un jugement sur ce début de mandat. Je ne vois rien de concret en termes de réalisations visibles. Il est possible qu’il y ait des projets. Son équipe et lui sont assez discrets pour l’instant. Cela me laisse croire qu’ils sont encore à la recherche de leurs marques. Pour l’instant je ne me sens pas séduit par cette équipe. Je suis perplexe en un mot, alors j’attends de voir peut-être un an après.»
Dimitri Kaboré / Guy Serge Aka