Le 26 juin de chaque année est la date retenue par le monde entier pour célébrer la Journée mondiale de lutte contre l’usage et le trafic des drogues. Au Burkina Faso, c’est la ville de Kaya qui a accueilli la commémoration de cette journée, le 27 juin dernier, avec pour préoccupation majeure l’effet de cette consommation sur les enfants dans les mines.
72 heures auparavant, la ville de Kaya était sous une effervescence festive dans laquelle on véhiculait le message de sensibilisation contre la drogue. Débutée depuis le 23 juin par un cross populaire, la célébration de la journée de lutte contre la drogue s’est poursuivie avec les troupes théâtrales et les artistes musiciens. Ceux-ci s’ingéniaient, dans les salles de spectacle, à interpeller la conscience des Kayalais quant aux conséquences de la drogue sur les enfants en général, et sur ceux astreints aux pires formes de travail dans les mines et carrières en particulier. Le choix de cette partie du Burkina pour célébrer ladite journée n’est pas anodin, car cette région, dont Kaya est la capitale, recèle de bien de sites d’orpaillage (plus de 200), d’où le nom de la province Sanmatenga ("la terre de l’or" en mooré). Véritable eldorado pour la population, en majorité les enfants, ces derniers n’hésitent pas à déserter les écoles pour rejoindre ces lieux qui constituent pour eux la caverne d’Ali Baba, mais où la recherche du métal précieux nécessite souvent la prise des drogues. D’où toute l’importance que revêt le thème de cette journée : « Abus de drogues et pires formes de travail des enfants dans les mines et carrières ». Elle était placée sous le patronage de Jérôme Bougouma, ministre de l’Administration du Territoriale et de la Sécurité (MATS) et par ailleurs, Président du Comité national de lutte contre la drogue (CNLD). Pour Sampawendé Ouédraogo, 1er adjoint au maire, le devoir patriotique lui commande à se joindre aux autres pour combattre la drogue qui n’apporte que désolation. Il sera rejoint en propos par Mariam Diallo/Zoromé, gouverneur du Centre-nord, pour qui, la lutte contre la drogue est un challenge qu’il faut gagner, car, affirme-t-elle, un drogué court des dangers qui peuvent déteindre l’avenir de toute la société. "Pour les autorités et les populations du Centre-nord, la situation dans ce domaine est vécue avec appréhension et inquiétude car, avec la multitude de sites aurifères où bon nombre d’orpailleurs usent et abusent de ces produits dangereux, il n’est pas rare de voir des enfants et des jeunes, les bâtisseurs du Faso de demain, s’adonner à leur consommation pour mener les pires formes d’activités, en quête du métal rare" a-t-elle ajouté. Même son de cloche pour Georgette Tamboura, représentant la DG de la CNSS, co-marraine, et le Naaba de Pikou, qui n’ont pas manqué de rappeler les méfaits et dommages que cause la prise de ces stupéfiants. Amadé Belem, secrétaire permanent du CNLD, lui, a brandi un tableau sombre de la situation de ces drogues au Burkina : une hausse considérable des quantités de saisies de cannabis et de médicaments de la rue, un trafic illicite et un transit non négligeables de la cocaïne et de l’héroïne, et enfin, un nombre croissant de consommateurs des produits psycho-actifs. Les conséquences de ces menaces, poursuit-il, sont visibles sur le triple plan sanitaire, sécuritaire et économique, dont les corolaires sont des maladies sur le sujet, la criminalité, les vols et viols, sans oublier le fait que ces derniers disparaissent du tissu productif national parce que devenant des loques humaines. Même si cette situation est préoccupante, elle est loin d’être catastrophique, c’est du reste, l’avis de Jérôme Bougouma pour qui, la situation a juste atteint un seuil où il convient d’alerter tout le monde. "Au-delà du caractère commémoratif, cette journée nous interpelle sur les conséquences de la consommation des drogues sur la santé de la population et surtout de la frange jeune, très fragile et sujette à plusieurs trafics" a-t-il laissé entendre. Pour lui, les troubles à l’ordre public, les accidents liés au non-respect du code de la route ainsi que les résultats catastrophiques des examens du BEPC sont consécutifs à ces drogues dont la prise chez les jeunes semble aller crescendo. En attendant l’érection de centres de traitements psychiatriques appropriés qui s’occuperont du traitement et de la réinsertion sociale, dernier volet de lutte contre la drogue (après la prévention et la répression), les éventuelles victimes de ces drogues devront pour l’heure, se rabattre sur les centres de santé de la place. C’est pour que les jeunes n’empruntent pas ce chemin que, d’après le SP du CNLD, l’information et la vigilance, à tous les niveaux, sont privilégiées. Cette journée s’est poursuivie dans la ferveur théâtrale de la troupe de solidarité de "Mbaboanga", par des remises de prix en nature et en espèce à la meilleure cycliste, au meilleur élève auteur d’une poésie et à l’équipe de football du Sanmatenga FC de Kaya. Le clou de cette célébration a eu lieu hors de la ville, avec l’incinération de près de 18 tonnes (10 t de faux médicaments et 8,5 t pour l’ensemble des drogues (cannabis, cocaïne, héroïne…) de produits dangereux saisis par les services de répressions. La nature s’est aussi invitée à la journée par une pluie impromptue qui est venue mettre fin à la cérémonie dans un sauve-qui-peut de la foule et des autorités. Un communicateur, interprétant ce fait divers, a ironisé en disant que la venue de cette pluie confirme que même la nature s’oppose au phénomène de la drogue .