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Contestation de la victoire de Mahamadou Issoufou: l’opposition franchira-t-elle la ligne rouge ?
Publié le jeudi 24 mars 2016  |  Le Pays
Mahamadou
© Autre presse par DR
Mahamadou Issoufou candidat à sa succession à la tête du Niger




La Commission électorale nationale indépendante (CENI) du Niger a annoncé, le mardi 22 mars, le verdict du second tour de la présidentielle. Mahamadou Issoufou est réélu, haut la main, pour un second mandat avec un résultat de 92,4% des voix. N’eût été la particularité du contexte nigérien, les démocrates du monde entier auraient crié à un score soviétique. Mais au regard des circonstances dans lesquelles ce 2e tour s’est tenu, ce score s’inscrit dans l’ordre normal des choses. C’est plutôt le score de 7,5% des voix réalisé par le candidat de l’opposition, Hama Amadou, qui peut étonner. En effet, non seulement ce dernier n’a pas pu faire compagne, mais aussi et surtout son camp avait appelé, avec force et sans ambiguïté, à boycotter ce second tour de la présidentielle. L’on peut donc en déduire que le message n’a pas été reçu 5/5. Cela dit, le principal enjeu de ce scrutin n’était pas le score réalisé par l’un et l’autre, mais le taux de participation. Si l’on s’en tient à la CENI, celui-ci est de 59%. Ce taux, il faut le dire, dans l’hypothèse où il serait conforme à la réalité, ferait de Mahamadou Issoufou un président dont la légitimité serait difficilement contestable. De ce point de vue, il pouvait faire dans le triomphalisme en invitant ses partisans à pavoiser dans les rues de Niamey. Mais manifestement, l’homme s’en est démarqué. Mieux, les premiers propos du président réélu appellent à l’apaisement et au rassemblement.

La maison commune dont parle le président Issoufou n’est pas à l’abri d’une bourrasque

Dans une brève déclaration à la presse, il a, en effet, laissé entendre ceci : « Je voudrais que la victoire du 20 mars ne soit pas celle d’un seul camp mais celle du pays tout entier. Ne gaspillons pas nos énergies dans de vaines querelles, pour construire notre maison commune. Notre pays doit renforcer son unité ». Le ton de Issoufou est donc loin d’être celui d’un boutefeu, et cela est à son honneur au regard des défis pressants qui attendent le Niger. Mais il en faut plus pour ramener la sérénité et la paix des cœurs dans ce pays qui, depuis l’entame du processus électoral, s’est installé dans une logique manichéenne qui ne préjuge rien de bon pour le Niger. Et ce ne serait pas exagéré de dire que la période électorale s’est déroulée dans un climat de guerre où à tout moment les choses pouvaient basculer. Malheureusement, même avec la victoire de Mahamadou Issoufou au second tour de la présidentielle, censée mettre un terme au processus électoral et même avec les paroles d’apaisement et de rassemblement que celui-ci vient de tenir tout juste après sa réélection, l’on peut faire le constat que les signaux demeurent au rouge et que la maison commune dont parle le président Issoufou n’est pas à l’abri d’une bourrasque qui pourrait la faire tanguer dangereusement. En effet, la probabilité d’un tel scénario est plus que jamais très forte au Niger. A l’appui de cela, l’on peut citer les propos tenus par Amadou Boubacar Cissé, un des leaders de la COPA, la coalition ayant soutenu Hama Amadou qui devrait pouvoir regagner sereinement son pays à sa sortie d’hôpital ; la Cour de cassation ayant estimé qu’il ne peut y avoir de procès au pénal dans l’affaire du trafic présumé de bébés nigérians sans un jugement préalable par un tribunal civil. Il faut préciser que ses propos ont été tenus dès que les résultats du second tour ont été rendus publics par la CENI.

Tout le monde doit savoir raison garder pour ne pas exposer le pays aux périls qui le guettent

Amadou BoubacarCissé a en effet déclaré ceci : « Les choses sont très claires. Ce jour 22 mars 2016, nous sommes au jour J-9. Dans neuf jours, notre pays n’aura plus de président légitime ». Plus loin, il enfonce le clou en disant : « A partir du 2 avril 2016, la COPA revendiquera la légalité républicaine, au nom de la souveraineté populaire, le mandat du président Issoufou finissant le 1er avril 2016 à minuit ». Pour appeler le chat par son nom, l’on peut dire que ces mots sonnent comme un appel à la sédition. Et cette attitude de l’opposition nigérienne pourrait être le parachèvement d’une stratégie qui, tout au long du processus électoral, n’a pas failli quant à sa cohérence. Tout indique, en effet, qu’elle s’est présentée à cette compétition électorale avec le leitmotiv suivant : faire feu de tout bois pour empêcher la réélection du président sortant. Pour cela, elle avait cherché sans succès la petite bête susceptible de gripper la machine électorale. Après l’échec de cette étape, l’opposition avait passé à une étape supérieure en appelant au boycott du second tour de la présidentielle. Là aussi, l’on peut prendre le risque de dire, sous réserve que les résultats publiés par la CENI soient ceux véritablement issus des urnes, que l’opposition n’a pas été suivie par les Nigériens comme elle l’aurait souhaité. Pour dérouler sa stratégie jusqu’au bout, elle appelle tout bonnement les Nigériens à une insurrection pour faire barrage à celui qu’elle ne veut pas voir même en peinture, aux commandes du Niger pour encore 5 ans, c’est-à-dire Mahamadou Issoufou. La grande question que l’on peut se poser dès lors et qui vaut son pesant d’or, est la suivante : l’opposition franchira-t-elle la ligne rouge à partir du 2 avril prochain ? Et franchir la ligne rouge au regard de ce qui précède, pourrait consister à rendre le pays ingouvernable par des actions de rue de manière à pousser Mahamadou Issoufou à la faute au cas où celui-ci choisirait de rétablir l’ordre par la répression. Personne ne devrait souhaiter ce scénario-catastrophe à ce pauvre pays, qui a, quoiqu’on dise, connu des avancées significatives en matière de démocratie, depuis qu’il s’est débarrassé des ambitions pouvoiristes de Mamadou Tandja. Tout le monde doit savoir raison garder pour ne pas exposer le pays aux périls qui le guettent aujourd’hui. L’un d’eux est la menace djihadiste. Déjà, celle-ci s’est signalée pendant la période électorale et même avant. Si d’aventure, la météo politique déjà délétère venait à évoluer jusqu’au tsunami, ce serait pain bénit pour les fous de Dieu. Ces derniers, traqués comme on le sait en Syrie, en Irak et en Libye par l’Occident, pourraient trouver dans un Niger affaibli par des querelles politiques byzantines, une terre promise pour poursuivre leurs basses besognes. Les Nigériens doivent donc en prendre conscience ici et maintenant en optant pour l’apaisement et le dialogue pour sauver la maison commune. Et pour cela, aucun renoncement n’est de trop. Mahamadou Issoufou semble déjà avoir accompli sa part de chemin en appelant au rassemblement et au dialogue et même plus, à un gouvernement d’union nationale. Avant lui, la communauté internationale, notamment l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), par la voix de Michel Kafando, avait lancé le même appel. Il reste à souhaiter que tous ces appels soient entendus du côté de l’opposition pour sauver l’essentiel. Car, après tout, la politique, ce n’est pas la guerre.

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