La Croix-Rouge burkinabè, la Croix-Rouge espagnole et l’UNICEF partagent la vision commune que l’emploi des enfants dans les débits de boisson est l’une des pires formes de travail auxquelles ils sont exposés. Pour lutter contre ce phénomène en pleine expansion dans la capitale, ces trois organisations ont organisé le mardi 22 mars 2016 une journée de sensibilisation et d’affichage dans les différents arrondissements de la ville de Ouagadougou. Pour marquer le coup, quatre maquis ont été ciblé de façon symbolique.
C’est par le maquis Tamani Kasseto à Dassasgho que la caravane de sensibilisation a débuté son périple. Dans cet espace où étaient installés des clients à cette heure de la journée, les équipes de la Croix-Rouge ont échangé avec le responsable des lieux, Idrissa Joël Dialla. Ce dernier a marqué son adhésion à cette campagne en s’associant à l’affichage des autocollants et des affiches dans le bar. Il a surtout signé la lettre d’adhésion à la campagne de sensibilisation « Les maquis ne sont pas un lieu pour les enfants ». Ainsi, il s’engage à faire de son espace un lieu que les enfants de moins de 18 ans ne pourront pas fréquenter afin de les protéger contre les risques d’alcoolisme, d’exploitation, de violences sexuelles, etc. Selon lui, « cette action de la Croix-Rouge est bien pour les enfants et pour le pays. Mon souhait est que les autres tenanciers en fasse de même ».
Plus loin, le maquis le Yombo situé en face du boulevard des Tansoaba a épousé aussi l’esprit de cette campagne. En plus des affiches, autocollants, des couvre-verres aux messages évocateurs ont été distribués. Les équipes de la Croix-Rouge se sont montré disponibles pour répondre aux interrogations de certains des clients.
Le cap a été ensuite mis sur le quartier Dapoya au niveau du maquis le Leader où attendait déjà le gérant. Il s’est tout de suite acquitté de la signature de la lettre d’adhésion, fermant ainsi son espace aux mineurs. La dernière escale a été marquée au maquis la Rue Princesse à la rencontre d’un gérant enthousiaste qui a pris un malin plaisir à promener les équipes de la Croix-Rouge dans son établissement afin de constater qu’aucun mineur n’y est employé. Hermann Dabiré a rassuré que les dispositions sont déjà prises pour éviter que ce milieu ne soient fréquentés par des enfants. Là également, des affiches de grand format ont été apposées et des couvre-verres remis symboliquement.
Au terme de la tournée, le responsable en charge de la conduite du projet, Jean-Pierrel Sia a salué la signature des lettres d’engagement par ces tenanciers et espéré que leurs exemples soient suivis par plusieurs autres. Il y a urgence à agir car il s’agit d’aider plus de 32 mille enfants qui sont exploités dans les débits de boisson à Ouagadougou, d’après une étude réalisée en 2015 par la Croix-Rouge burkinabè.
Cette action de sensibilisation est portée à bout de bras par le projet « Prévention et réinsertion des enfants victimes de la traite et de l’exploitation dans les débits de boisson à Ouagadougou – Burkina Faso ». C’est une initiative de la Croix-Rouge burkinabè avec l’appui de la Croix-Rouge espagnole et de l’UNICEF. Au nombre des acquis engrangés, 135 mineurs ont été inscrits dans les différentes écoles de Ouagadougou, 86 jeunes suivent des formations professionnelles en soudure, mécanique, couture et autres. Le projet est arrivé à la conclusion qu’il y a lieu d’entreprendre des actions urgentes concertées et soutenues pour améliorer la situation de ces enfants.
Croix-Rouge burkinabè
Témoignage d’un des enfants du projet : « Je suis venu rejoindre mes deux frères, tous mineurs à Ouagadougou, à la recherche du travail ».
C’est l’histoire de O.A, âgé de 16 ans, originaire de Ouargaye, identifié dans un maquis situé au secteur 28. « Quand je suis arrivé, je dormais dans le maquis avec mes frères et le travail était très pénible. On travaillait plus de 17 heures dans la journée. Le matin à 7h je commence à nettoyer les lieux et à placer les chaises. Après, je me mettais à laver les verres et les assiettes. Quand les premiers clients arrivaient, je leur servais à boire et je faisais d’autres courses comme aller acheter la cigarette et les lotus. Mon patron m’insultait tous les jours par exemple quand je cassais un verre. A la fin du mois avec mon maigre salaire (10.000 f/mois), il me donnait à peine 2 500 f par mois. Il arrivait des moments où je servais en dormant par manque de sommeil, je me sentais très faible et mon souhait c’était de retourner à l’école. Grace à l’appui du Projet, je fais le petit élevage des poules locales ce qui me permet présentement de vivre mieux et de suivre les cours du soir.
C.R.B