L’opposition politique a effectué sa rentrée, le jeudi 10 mars 2016 à Ouagadougou, par la tenue d’une conférence de presse. L’occasion pour le chef de file, Zéphirin Diabré et ses lieutenants, d’annoncer les couleurs de leurs futures actions.
Le Chef de file de l’opposition politique (CFOP) au Burkina Faso, Zéphirin Diabré, dont le statut a été maintenu à l’issue des élections couplées de novembre 2015, reprend du service. Le candidat malheureux au scrutin présidentiel a renoué, le jeudi 10 mars 2016 à Ouagadougou, avec ses face à face avec la presse, à l’occasion de la rentrée politique de l’opposition. En plus de ses anciens camarades, « Zéph » est apparu aux côtés de hauts responsables de partis de l’ex-majorité désormais affiliés à l’opposition, notamment le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA), respectivement représentés par leurs premiers responsables, Achille Tapsoba et Me Gilbert Noel Ouédraogo. Les mandants d’autres formations politiques passées aussi dans l’opposition, en l’occurrence la Nouvelle alliance du Faso (NAFA) et l’Union pour un Burkina nouveau (UBN), étaient aussi présents à cette rentrée politique. Cette nouvelle configuration a amené Zéphirin Diabré à se fixer comme priorité des priorités, la bonne cohabitation entre anciens et nouveaux membres de l’opposition. « La priorité des priorités, c’est de faire en sorte que les membres de l’opposition travaillent de façon harmonieuse », a-t-il déclaré. A part ce défi managérial, « Zeph » devra faire face à ses anciens compagnons de route de l’opposition, aujourd’hui au pouvoir. Cette situation ne semble guère l’émouvoir, à l’entendre. « Ceux, qui sont restés dans l’opposition ont fait un choix. Ils estiment, que ceux qui ont pris le pouvoir n’incarnent pas le changement voulu. C’est notre liberté de continuer à être dans l’opposition. Nous allons apprécier les actions du nouveau pouvoir et relever les insuffisances à chaque fois que de besoin. », a indiqué le chef de file de l’opposition. Il a renchéri en ces termes : « Nous sommes une opposition républicaine, qui va être un contre-pouvoir et non une rébellion. Nous allons exercer notre action, dans le cadre des lois de la république. Il y aura des partenariats avec les forces sociales, qui peuvent apporter un plus à notre action ». Aussi Zéphirin Diabré prétend-il être en train de « peaufiner » une stratégie pour conduire les actions de l’opposition dans le Burkina post-transition.
Le cas des «Kogl-wéogo»
Comment l’opposition perçoit-elle les premiers pas du régime de Roch Marc Christian Kaboré ? « Les mesures prises par le gouvernement depuis son installation sont bonnes, mais précipitées. Ce sont des mesures pour contrer la pression, qui commence à se faire sentir et à visée électoraliste, surtout à l’approche des élections municipales(…)», a commenté le président de la NAFA, Adama Compaoré. Le chef de file de l’opposition d’enfoncer le clou, en s’attaquant à l’une de ces mesures dites « fortes » de l’exécutif. « On se demande si la nomination de secrétaires généraux adjoints de ministères est une priorité dans le contexte financier difficile. Cela ne contribue pas à réduire le train de vie de l’Etat. Nous espérons que ce ne sont pas des postes créés pour contenter les militants du parti au pouvoir insatisfaits. Nous y veillerons », s’est exclamé Zéphirin Diabré. L’épineuse question des « Kogl-weogo », ces groupes d’autodéfense à polémique, a également retenu l’attention des responsables de l’opposition. « Si ces groupes d’autodéfense se sont créés, c’est parce que l’Etat a failli à assurer la sécurité des biens et des personnes. C’est la défaillance de l’Etat, qui a entrainé ce phénomène. Mais il faut trouver une formule, pour que cette initiative citoyenne n’aille pas au-delà de la loi. Les Kogl-weogo doivent se faire dans le cadre de la loi, pour ne pas être préjudiciables aux populations. Néanmoins, l’Etat doit s’assumer en s’attaquant à l’insécurité, ainsi les Kolg-wéogo disparaitront d’eux-mêmes », a réagi Zéphirin Diabré. La même position est affichée par le président de l’ADF/RDA. « Il faut que les autorités apportent une solution dans le respect du droit à ce problème », a insisté Me Gilbert Noel Ouédraogo. L’intégration des partis de l’ex-majorité dans l’opposition a fait aussi l’objet d’échanges à cette rentrée politique. Les responsables des partis de l’ex-majorité disent se sentir bien dans l’opposition. « C’est un juste retour pour nous, qui avons été chef de file de l’opposition. Nous nous sentons bien dans la position, que le peuple nous a donnée à l’issue des élections », a confié Me Gilbert Noel Ouédraogo. Le concernant, le président par intérim du CDP, Achille Tapsoba, a raillé : « Nous allons nous mettre à l’apprentissage de ceux qui critiquent et je trouve du plaisir à cela ». Les opposants ont aussi donné leur lecture du blanchiment d’argent à hauteur de 86 milliards FCFA sous la Transition, évoquée la veille en Conseil des ministres. «Nous nous réjouissons, que la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) soit efficace, et nous souhaitons qu’elle le soit encore les années à venir », a relevé Jean Hubert Bazié de la Convergence de l’Espoir. En introduction aux échanges, Zéphirin Diabré a mentionné, que l’opposition compte actuellement une vingtaine de partis. Des démarches, a-t-il fait savoir, ont été entreprises avec l’Assemblée nationale, pour trouver un siège au CFOP, étant donné que son ancien local est désormais occupé par la Haute Cour de justice.
Kader Patrick KARANTAO