Véritable entrepreneur multi casquettes, Thérèse Alice Ouédraogo-Yaro est à la tête de l’Agence générale de commerce et de l’industrie (AGCI) regroupe plusieurs structures telles une agence de voyage, une structure du BTP. Elle est également propriétaire d’immeubles dont la résidence Alice et l’usine Delicio, qui transforme les fruits en jus depuis plus de 10 ans. A l’occasion du 8-Mars dont le thème est cette année « Entreprenariat agricole des femmes : obstacles, défis et perspectives », elle nous accordé un entretien.
Fasozine: Quel sens donnez-vous au 8-Mars ?
Thérèse Alice Ouédraogo-Yaro : En tant que femme, je ne peux qu’être contente d’être à l’honneur ce jour-là que j’apprécie positivement. Cela nous stimule et nous encourage à nous battre pour un avenir meilleur. Mais j’insiste sur le fait qu’au-delà de nous consacrer une journée, il faut nous soutenir davantage dans nos projets et nos activités parce que la femme a trop souffert, alors qu’elle a des potentialités. J’ai toujours participé à cette commémoration en achetant le pagne, en assistant aux manifestations et en organisant quelque chose au village pour que les femmes mangent, boivent et dansent ensemble. Cette année ce n’est pas de cette façon que nous allons le faire, compte tenu des problèmes que le pays traverse. Mais nous trouverons une autre occasion pour rassembler les femmes. Mais en attendant, je pense qu’il faut qu’en plus du volet festif, on mette plus l’accent sur la sensibilisation, la conscientisation, l’éducation et l’instruction des femmes et des enfants, dont l’éducation incombe aussi aux femmes. L’on doit surtout mettre l’accent sur le civisme notamment dans la circulation routière où les accidents font trop de morts inutiles.
Pourquoi avoir décidé d’investir dans la production de jus de fruits ?
J’aimais beaucoup le jus de fruits Savana si bien qu’à la fermeture de cette usine, je suis partie en Inde avec mes petits moyens pour acheter quelques machines qui sont arrivées vers mi-2003. Nous avons installé l’usine à Ponsemtenga, village de ma mère situé dans la commune de Komsilga, à 15 kilomètres de Ouagadougou. On a également un laboratoire là-bas pour assurer la qualité du jus de fruits Delicio que nous avons pris un an pour mettre sur pied. C’est en mars 2004 qu’on a commencé à sortir le jus commercialisé dans des bouteilles.
Combien de femmes travaillent dans votre entreprise?
Nous employons à peu près une quarantaine de personnes. Mais avec les nouvelles machines qui arrivent, nous dépasserons ce nombre. Ce que nous prévoyons est deux fois plus que ce que nous avons présentement. La majeure partie des employés sont des femmes parce que mon objectif était d’aider les femmes du village de ma mère. J’ai remarqué qu’elles souffraient beaucoup et j’ai demandé un terrain à mon oncle, le général Bila Zagré, pour installer Delicio. Les hommes qui y travaillent ne dépassent pas six. Et comme je n’ai pas pu employer toutes les femmes dans l’usine, j’ai créé une association de femmes tisseuses là-bas, et les membres de cette structure valent une cinquantaine. Les Etats-Unis d’Amérique sont même en train de construire un centre là-bas pour elles.
Quels sont selon vous les obstacles, les défis et les perspectives en matière d’entreprenariat agricole des femmes, pour reprendre le thème commémoratif du 8-Mars 2016 ?
Les obstacles sont surtout financiers parce que moi, si j’ai pu réaliser mon usine de jus de fruits, c’est parce que je fais autre chose. Si l’Etat peut vraiment nous aider davantage, ce serait mieux. Moi j’ai d’autres projets dans le domaine agricole comme le confit de lianes, du vin de banane, donc si j’ai plus de soutien ce sera mieux.
Le fait d’être femme constitue pour vous un atout ou un handicap dans vos activités en tant qu’entrepreneur ?
Ni handicap, ni atout parce que les hommes et les femmes sont maintenant égaux. En ce qui me concerne en tout cas, je n’ai jamais été stigmatisée ou lésée du fait de mon genre. Au contraire, il y a des hommes qui me respectent parce que je suis une femme.
Propos recueillis par Juste SAMBAf