Le 28 février dernier, s’est tenue à Bamako une rencontre quadripartite entre l’opposition, la majorité, les mouvements armés du Nord et les organisations de la société civile, pour échanger sur les pistes de solution envisageables pour la restauration de la paix et de la sécurité sur l’ensemble du territoire national.
Première du genre, cette rencontre pour la paix, qui a regroupé dans la capitale malienne les principaux protagonistes de la crise malienne, intervient au moment où les groupes armés du Nord semblent, eux aussi, disposés à fumer entre eux le calumet de la paix. En témoigne l’épisode de la rentrée du Gatia à Kidal, le mois dernier, qui avait fait craindre une reprise des hostilités avec la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), tant l’irruption de ce groupe armé proche de Bamako dans le fief des rebelles, avait fait monter le mercure et craindre le pire.
A plusieurs reprises, les protagonistes de la crise malienne ont fait preuve de mauvaise foi
Finalement, il y a eu plus de peur que de mal, et les frères ennemis du Nord ont réussi à s’accorder sur l’essentiel, sans heurt. Cela était déjà un pas important dans le sens de la normalisation de la situation au Mali. Avec le recul, l’on peut se convaincre que l’acte audacieux du Gatia aura été l’élément déclencheur que l’on espère salutaire pour la paix au Nord-Mali. Autrement, il y a fort à parier que l’on en serait encore à une situation de guerre froide qui ne pouvait que retarder le retour tant espéré à la normale.
Avec la rencontre de Bamako du week-end dernier, tous ces faits constituent autant de signaux favorables à un retour de la paix. Mais pour combien de temps ? Est-on tenté de se demander, tant les acteurs de la crise malienne nous ont habitués à des retournements spectaculaires de situation, qui les renvoient la plupart du temps pratiquement à la case départ, depuis près de trois ans que dure la crise. Tant et si bien que l’on pouvait légitimement s’interroger sur la volonté réelle des protagonistes de sortir de cette crise dont on se demandait si elle ne faisait finalement pas leur affaire. En tout cas, à plusieurs reprises, les protagonistes de la crise malienne ont fait preuve de mauvaise foi dans la mise en œuvre des différents accords censés les conduire vers le bout du tunnel. Cette fois-ci sera-t-elle enfin la bonne ? En tout cas, l’on peut d’ores et déjà saluer l’esprit de la rencontre du week-end dernier, qui pourrait marquer un tournant décisif dans la recherche de solutions pour une sortie de crise au pays de Soundiata Keïta. Et cela est à l’honneur des acteurs politiques, notamment l’opposition qui en est l’instigatrice et les autres acteurs qui ont apparemment accepté de jouer le jeu. Car, cela participe, à n’en pas douter, de la décrispation de l’atmosphère sociopolitique qui pourrait augurer de lendemains meilleurs pour le Mali. Il faut maintenant espérer que rien ne viendra remettre en cause un processus aussi bien engagé.
Au demeurant, dans ce contexte de lutte contre le djihadisme et le terrorisme sous toutes ses formes et au regard de la tournure de certains événements, il y a lieu de croire que la paix elle-même, est en train de s’imposer aux Maliens dont les populations sont certainement lassées d’une situation qui n’en finit pas de les maintenir dans la précarité.
Il ne faudrait plus répéter les erreurs du passé
D’abord, parce que la CMA elle-même, semble avoir perdu de sa verve et de sa superbe sur le terrain, et éprouvé beaucoup plus de difficultés face aux autres groupes armés dont le Gatia qui est un groupe pro-Bamako, mais aussi face aux forces armées maliennes dont la réorganisation semble les avoir rendues beaucoup plus opérationnelles sur le terrain.
Ensuite, l’intensification des offensives menées depuis quelque temps par les Occidentaux contre Daesh, notamment en Syrie et surtout en Libye voisine, pour faire le ménage des djihadistes de l’Etat islamique, impose quelque peu aux Maliens de se donner la main pour mieux faire face aux éventuels flux de ces apôtres de l’obscurantisme qui seraient tentés d’y trouver une terre de refuge ou de repli. Ce, d’autant plus que le souvenir de janvier 2013 est encore vivace dans les esprits. En effet, l’on n’a pas encore oublié que c’est de cette Libye en déconfiture totale suite à la disparition du guide Mouammar Kadhafi, qu’étaient parties les colonnes de djihadistes qui, profitant du désordre qui régnait au Nord-Mali, y avaient installé leurs pénates avant de mettre le cap sur Bamako. Il a fallu l’intervention énergique des forces françaises de l’opération Serval pour les freiner dans leur élan et leurs visées expansionnistes.
Il ne faudrait donc plus répéter les erreurs du passé. C’est pourquoi toute initiative qui vise à ramener la paix au Mali est à encourager. Et il est heureux de voir qu’au moment où la diplomatie internationale semble s’en être totalement remise aux seuls accords d’Alger dont l’opérationnalisation a visiblement pris du plomb dans l’aile, des solutions domestiques sont aussi à l’étude pour essayer de sortir le pays de l’ornière. Les signaux sont donc bons. Pourvu que ces initiatives puissent aboutir pour que Kidal revienne dans la république. C’est tout le mal que l’on puisse souhaiter au Mali.