Elle avait été annoncée lors du dernier sommet de l’Union africaine tenu à Addis-Abeba en fin janvier, après la victoire diplomatique du régime burundais qui avait opposé un « niet ! » catégorique au déploiement projeté de quelques 5000 soldats de la force multinationale africaine. Après ce revers, la conférence des chefs d’Etat avait annoncé l’envoi d’une mission de haut niveau à Bujumbura pour poursuivre les discussions.
Presque un mois se sera finalement écoulé avant que les émissaires de l’Union africaine ne soient reçus à Bujumbura. C’était hier jeudi, dans le sillage du secrétaire général des Nations unies qui y avait séjourné en début de semaine sans pouvoir arracher grand-chose de la part de son interlocuteur si ce n’est le principe du « dialogue inclusif », mais à ses propres conditions qui sont celles de l’exclusion pure et simple de tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont tenté de déstabiliser son régime comme l’ont fait à ses yeux la plupart de ses opposants.
Du coup, la question de savoir si les prestigieux missi dominici pourront réussir là où Ban Ki-moon n’a pas obtenu un franc succès qui, pour le coup aurait permis un tant soit peu de recoller les morceaux d’un pays qui part en lambeaux du fait de l’obstination d’un seul homme. Un homme qui après avoir violé l’esprit et la lettre de la constitution a contraint tous ceux qui s’y opposaient, journalistes et hommes politiques à l’exil si ce n’est pire ! S’offrant au passage un troisième mandat présidentiel dont la jouissance, à son grand désarroi, pose encore et toujours problème.
Mais il faut croire que ce n’est pas le seul hic dans cette histoire, à voir la composition de la délégation de négociateurs africains, car plutôt que de tenter d’extraire la paille dans l’œil d’un Pierre Nkurunziza, certains de ses membres gagneraient à extirper la poutre qui abstrue leur vue. En effet, si l’on excepte Macky Sall et Jacob Zuma qui peuvent se vanter de présider aux destinées de démocraties africaines éprouvées, il faut bien reconnaître que les trois autres chefs d’Etat et de gouvernement posent problème.
Mohamed Ould Abdel Aziz de Mauritanie, général putschiste qui a mis fin à une expérience démocratique et qui, depuis, s’est « acheté » une conduite se faisant élire, puis réélire au suffrage universel ;
Ali Bongo Ondimba qui a hérité du fauteuil de papa, lequel avait fait le nécessaire pour que le reste de sa dynastie n’ait nul besoin de tripatouiller une constitution taillée sur mesure ;
Enfin, le premier ministre éthiopien Haile Mariam Dessalegn dont le pays reste l’une de ces douces « démocratures » dont regorge le continent noir.
Voilà donc l’équipe qui doit faire fléchir l’irréductible de Bujumbura et le pousser à accepter enfin les conditions d’un véritable dialogue inclusif. A l’évidence, il y a eu une erreur de casting quelque part. Mais quels arguments des dirigeants avec de tels états de service pourront-ils développer pour espérer faire mieux que le secrétaire général des Nations unies… On se le demande.
H. Marie Ouédraogo