S’il y a une urgence à laquelle les Maliens, en pourparlers à Ouagadougou depuis maintenant plus d’une semaine, doivent répondre, c’est de s’entendre rapidement sur les modalités de retour définitif de la paix dans leur pays. Les islamistes ayant été boutés hors du pays, pardon du Nord, par la Coalition des armées africaines et française.
En effet, on peut bien comprendre la réticence de Bamako à tout octroyer aux occupants actuels de Kidal, même au prix de la paix. Mais, tout porte à croire que les questions qui sont actuellement en discussion à Ouagadougou, le déploiement de l’administration et de l’armée à Kidal, et par ricochet au Nord et la possibilité pour la justice malienne de poursuivre un certain nombre de chefs islamistes, sont bien importantes. Cependant, elles ne doivent pas pouvoir remettre tout le processus en cause. La preuve, c’est que les autorités intérimaires de Bamako (Dioncounda Traoré, président et Djongo Sissoko, son Premier ministre) ne s’accordent pas sur les mêmes positions. Les Maliens d’une manière générale sont divisés par rapport à ces deux importantes questions. C’est pourquoi, il faut discuter et trouver le juste milieu. Mais, à trop tirer sur la corde du côté des intérimaires du Mali, on risque de radicaliser la position de ceux d’en face, qui ne sont pas moins des Maliens et qui, sans doute veulent la paix dans leur pays. Une paix durable qui prend en compte des préoccupations qu’ils ont toujours évoquées et qui pourraient être à l’origine des récurrentes crises, déclarées ou non, au Mali. Ce n’est ni le médiateur de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ni la communauté internationale qui ont créé cette situation. Ils ne sont que des facilitateurs, à défaut, un soutien pour permettre au Mali de redevenir démocratique et de tendre vers le développement. De là, à croire ou à faire croire qu’ils ont pris faits et cause pour des islamistes, ou qu’ils ont des amitiés supposées ou réelles avec les " Maliens " du Nord, c’est mettre la charrue avant les bœufs.
Qu’est-ce que le Burkina Faso et son président ont de particulier à gagner au Mali si ce n’est pas la paix du bon voisinage, le " sigui gnongon ya " comme on le dit au bord du Djoliba ? Si Blaise Compaoré et son pays soutiennent les efforts des uns et des autres pour un retour à la paix au Mali, c’est aussi parce que les Maliens sont des frères et sœurs et la tradition africaine dit que " le problème de ton frère est ton problème ". Ce n’est donc pas parce qu’au Burkina Faso on n’a rien à faire, ou on n’a pas de problèmes à résoudre qu’on fout le nez dans les affaires des autres.
La saison des pluies débute. Le gouvernement et l’ensemble des acteurs du monde agricole sont mobilisés afin que tout cela se passe dans la paix. Tout le monde est d’avis que c’est la période des conflits fonciers, mais également des inquiétudes liées à la pluviométrie. L’adoption de la loi portant création d’un Sénat divise la classe politique et les Burkinabè sur l’utilité d’une deuxième Chambre. Et personne ne sait exactement quelle pourrait être l’issue d’une telle " confrontation d’idées et d’intérêts ". Nos universités publiques ont perdu depuis longtemps les dates du calendrier académique. Des assises nationales sur l’enseignement supérieur viennent de produire des conclusions auxquelles il va falloir trouver des moyens pour les mettre en œuvre.
Au Mali, en dehors de cette crise qu’il faut vite juguler, les problèmes existentiels de développement, de mieux-être des populations subsistent auxquels il faut vite trouver des solutions. Au lieu donc de perdre le temps à Ouagadougou, il va falloir s’entendre rapidement (ce qui ne veut pas dire à l’aveuglette) et aller sur les chantiers du développement. Ça duré déjà plus d’un an.