Dans le cadre de la visite du Premier ministre français au Burkina Faso, Monsieur Manuel VALLS, le Président du Faso S.E.M. Roch Marc Christian KABORE a accordé un entretien en exclusivité à TV5 Monde le 20 février 2016 en marge de cette visite.
Des journalistes de la RTB/Télé, RTB/Radio et de Burkina Info ont également assisté à l’entretien. Ci-dessous un large extrait de cet interview
On va venir à vos relations qui sont complexes avec la Cote d’Ivoire, avec l’affaire des écoutes téléphoniques et les mandats d’arrêts internationaux contre Guillaume SORO, le président de l’Assemblée nationale ivoirienne et contre l’ancien Président Blaise COMPAORE dans l’affaire Thomas SANKARA. Vous vous êtes vus avec le Président ivoirien Alassane OUATTARA à Addis Abeba. Qu’est-ce que vous vous êtes dits ?
Je voudrais d’abord vous rassurer que les relations entre la Cote d’Ivoire et le Burkina sont excellentes malgré tout ce qu’on peut dire. Hier 19 février 2016 dans la soirée, nous avons eu une conversation téléphonique avec le Président Alassane Ouattara. Je crois que les enjeux qui nous lient sont plus forts que les préoccupations que vous évoquez et ce sont des enjeux historiques. Nous avons des chantiers ensemble au plan des infrastructures, un commerce que nous développons entre nos deux pays, environ quatre millions de Burkinabè qui vivent en bonne entente avec les Ivoiriens. Nous travaillons également pour que des Burkinabè, notamment les éléments de l’ex RSP qui se sont rendus à Abidjan, parce que nous avons également lancé des mandats d’arrêt contre ces personnes aussi, pour que la sécurité ivoirienne puisse les rapatrier au Burkina Faso.
Et vous pensez justement qu’ils vont être rapatriés ? Vous êtes optimiste ?
Des efforts sont déjà en cours et je crois que très bientôt nous aurons quelques informations d’eux.
Monsieur le Président comment faire ? Parce que la justice burkinabè travaille sur ces mandats d’arrêt et du côté d’Abidjan, on sait que cela fâche. Comment vous gérez cela entre la real politique et votre opinion publique qui demande des résultats à la justice ?
Pour nous, nous disons que nous sommes dans un Etat de droit et nous sommes soucieux de l’indépendance de la justice. C’est pour cela que lorsque le Président Alassane Ouattara a dit qu’il souhaitait que nous en discutions au plan diplomatique, nous avons estimé que nous pouvions poursuivre ce débat diplomatique qui est un débat de renforcement de la coopération et de l’amitié entre nos deux pays, tout en considérant également que la justice à son indépendance et poursuit son travail. D’aucuns ont laissé comprendre que le Président du Faso a voulu tordre le bras à la justice pour demander instamment qu’on lève le mandat d’arrêt contre Guillaume Soro, mais cela n’a jamais été le cas. Et je crois que les discussions qui sont menées aujourd’hui au sein du corps judiciaire sont des discussions qui ont trait à la qualité et à la procédure avec lesquelles les mandats d’arrêt ont été établis.
Vous encouragez la justice burkinabè à continuer son travail en toute honnêteté ?
Je vous ai dit que la justice est indépendante. Je n’ai ni à les encourager, ni à les décourager. Chacun est dans son domaine. Je suis Président du Faso et les réformes de la justice ont fait en sorte que depuis lors, ni le Président du Faso, ni le ministre de la Justice ne sont membres du Conseil Supérieur de la Magistrature. Donc, c’est une justice qui est indépendante. Notre rôle en tant que jeune démocratie, c’est de travailler à ce que cela soit une réalité
Pour vous le retour de Blaise Compaoré , l’ancien Président pour qu’il passe en jugement est une question importante, que vous voulez absolument avant la fin de votre mandat ?
Nous avons dit simplement que nous devons travailler à la réconciliation nationale et que cette réconciliation nationale passe par la vérité, la justice et le pardon. Pour nous, si Blaise Compaoré veut revenir dans son pays, il devra répondre devant la justice de ce pourquoi, il est accusé. Ce n’est pas plus compliqué que cela. Il a le droit de revenir mais voilà la condition et comme je le dis nul n’est au-dessus de la loi.
Si la justice burkinabè demande que l’ex Président soit extradé vers Ouagadougou, est ce que le Président ivoirien va l’accepter ?
Pour l’instant nous l’avons demandé mais nous n’avons pas encore de résultats. Nous avons par ailleurs appris qu’il a acquis la nationalité ivoirienne et que par conséquent selon des textes, on ne doit pas extrader des Ivoiriens vers d’autres pays. Vous savez, en matière de droit on peut trouver beaucoup de subterfuges. Pour l’instant, notre mandat d’arrêt est toujours d’actualité en ce qui le concerne et en ce qui concerne les autres Burkinabè pour lesquels des mandats d’arrêt ont été déposés auprès de la Côte d’Ivoire
Comment le Burkina Faso peut s’y prendre pour le retour des ex RSP de Côte d’Ivoire et qui constituent une menace sécuritaire pour ce pays ?
Les ex RSP qui sont en Côte d’Ivoire ne sont pas très nombreux. Le plus gros lot de ces ex RSP est réparti dans les casernes et ce que nous devons demander, c’est que ces personnes rentrent dans la conception de l’Armée républicaine. Ceux qui sont à l’extérieur, nous avons lancé des mandats d’arrêts contre eux. Ces mandats d’arrêts que nous avons lancés en demandant aux autorités ivoiriennes de s’en occuper commencent à porter leurs fruits. Nous nous en réjouissons et nous encourageons toujours les autorités ivoiriennes à poursuivre ce travail. Parce que tous ceux que nous avons appréhendés au Burkina Faso n’ont pas été exécutés contrairement à ce qui a été dit. Tout le monde passera au Tribunal, sera jugé et écopera de la peine qu’il mérite. De ce point de vue, c’est la coopération policière et de gendarmerie qui va nous permettre de résorber le cas de ces quelques dizaines de personnes qui sont à Abidjan et de les faire rentrer au pays pour que nous puissions terminer avec ce processus de coup d’Etat qui a eu lieu dans notre pays.
La Direction de la Communication de la Présidence du Faso