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Reforme de l’orthographe : la réformette de toutes les discordes
Publié le jeudi 11 fevrier 2016  |  L`Observateur Paalga
Rentrée
© aOuaga.com par A.O
Rentrée scolaire : le maire de l`arrondissement 9 de Ouaga sur le terrain
Mardi 1er octobre 2013. Ouagadougou. Le maire de l`arrondissement 9, Constant Lamoussa Ouédraogo, a effectué une tournée dans les écoles de son ressort pour voir comment se déroule la rentrée des classes




La réforme de l’orthographe portant sur 2400 mots, qui date de 1990 mais applicable en 2016, fait des vagues en France et dans le monde francophone. Entre nostalgie et conservatisme, beaucoup d’usagers de la langue de Molière voient en cette réforme un pas de plus dans le déclin du français. Du ramdam pour rien ?


Le français est une langue retorse, pleine de pièges comme une rizière Viêt-Cong et aussi difficile à dompter qu’un mustang en liberté. En effet, contrairement à la plupart des langues, il y a dans le français un hiatus entre la prononciation et la graphie des mots de sorte que l’orthographe est un vrai casse-tête. Il faut dire que depuis l’adoption du français comme langue administrative au 14e siècle au détriment du latin, il y a eu une volonté des clercs et des juristes d’élever cette langue de soldats et de paysans au niveau du latin et du grec.

C’est ainsi que l’orthographe du français, au lieu d’être phonétique (écrit comme on prononce), est étymologique. On a utilisé la graphie grecque ou latine pour donner une noble filiation à cette langue d’origine roturière occasionnant une pluie de confettis th, ph, t et s (devant les consonnes) sur les mots. Parfois on a complexifié jusqu’à l’absurde l’orthographe. Tels les mots abbaye, couenne, poêle et oignon, qui sont des pièges terribles parce que leur prononciation ne renseigne aucunement sur leur orthographe.

C’est pourquoi la dictée française demeure la bête noire des élèves, tant ils se perdent dans cette forêt inextricable de règles et d’exceptions : quand faut-il mettre un accent circonflexe sur le u et le ? Quand un mot composé s’écrit-il avec un trait d’union, et comment accorder le participe passé avec son complément d’objet direct ? C’est à s’arracher les cheveux par touffes entières pour trouver la bonne orthographe…

La langue étant au service des usagers et non l’inverse, des réformes ont été faites au cours des siècles pour adapter la langue à l’usage. Mais pourquoi cette réformette qui ne concerne que 2 400 mots sur les 60 000, soit 3% de la langue, cristallise-t-elle autant les résistances ? La langue française a connu plusieurs réformes, et il suffit de lire la chanson de Roland, le premier texte en français, dans sa première version imprimée, ou Rabelais et Montesquieu dans le texte pour le constater.

Et pourquoi la disparition annoncée de l’accent circonflexe suscite tant d’émoi ? Ce chapeau chinois qui coiffe les i, les o et les u du français ajouterait-il beaucoup de charme au français et sa disparition serait-elle si catastrophique ? Ce chapeau est un fantôme du s disparu et il est comme le pansement visible d’une amputation. L’enlever pourrait être perçu comme une guérison et une opération cosmétique. Et puis, il ne disparaît pas complètement, il coiffera toujours certains mots pour éviter la confusion entre homonymes comme sur et sûr, mur et mûr et dans la conjugaison au passé simple.


Des frondeurs aux motivations disparates


La campagne contre cette réforme à dose homéopathique qui ne remet pas fondamentalement en cause l’orthographe actuelle rassemble des gens dont les motivations sont parfois très divergentes. Comme on dit, ils partagent la même natte, mais ne font pas les mêmes rêves.

Pour certains, cette opposition prend l’allure d’une défiance contre le gouvernement de Hollande que l’on soupçonne de mettre en place une stratégie dilatoire avec cette réforme au lieu de s’attacher à des problèmes autrement plus cruciaux.

D’autres y voient un business juteux fait sur le dos des écoliers de l’espace francophone, une manne offerte aux éditeurs de manuels scolaires pour renflouer leurs caisses avec de nouvelles éditions estampillées R comme réforme. Cette réforme est aussi perçue comme l’intrusion du marché dans le bastion de l’éducation, une sorte d’obsolescence programmée introduite dans la langue comme si le français est devenu un vulgaire produit de consommation au même titre que le réfrigérateur, le poste de télé ou la photocopieuse.

Enfin, il y a ceux qui s’attachent à une conception élitiste de la langue, et qui refusent que l’on lève les difficultés. Bien écrire la langue est un plaisir qui vient de la maîtrise des difficultés et du sentiment d’être un élu de la langue. Ainsi François Bayrou, agrégé de langue classique, défend la préservation de l’identité latine de la langue française à travers sa graphie ancienne et se refuse à suivre la nouvelle orthographe.

Il y a quelque chose de risible dans ces gesticulations, car la langue est condamnée à évoluer ou à dépérir et disparaître. Cette réforme honnie n’en est pas une ; c’est au plus une rectification superficielle. Elle valide une nouvelle orthographe de quelque 2 400 mots sans interdire l’ancienne. Donc elle permettra seulement à ceux qui ont des problèmes avec l’ancienne orthographe d’écrire sans craindre le ridicule. Et les autres, nostalgiques d’un mythique français pur (une Arlésienne) continueront à saupoudrer leurs textes d’accents, de traits d’union, de lettres inutiles comme des ornements surannés qui distillent un parfum d’authenticité.

Pour finir, comme le disait Voltaire, « l’écriture est la peinture de la voix ; plus elle est ressemblante, mieux elle est». Donc vivement que la réforme soit plus radicale et plus structurelle pour que orthographe s’écrive ortograf et que l’on arrive à écrire enfin comme on parle. Une réforme fondamentale qui établira une relation bijective entre le mot et le son et qui réalisera l’égalité de tous devant l’orthographe. «Liberté, Egalité, Fraternité» aura au moins un sens : devant l’orthographe. Et ce n’est pas rien…





Saidou Alcény Barry
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