Ceci est une déclaration du Mouvement de libération nationale - Burkina Faso (MLN-BF) relative à la Déclaration de politique générale du Premier ministre Paul Thièba Kaba.
C’est devenu une tradition dans la vie politique burkinabè. Après sa nomination, le premier ministre fait une déclaration par laquelle il engage sa responsabilité devant la représentation nationale. C’est une obligation constitutionnelle consacrée par l’article 63 de la constitution qui stipule que : « Dans les trente jours qui suivent sa nomination, le Premier ministre fait une déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale.
Cette déclaration est suivie de débats et donne lieu à un vote. L’adoption de cette déclaration vaut investiture.
Si la déclaration de politique générale ne recueille pas la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale, le Président du Faso met fin aux fonctions du Premier ministre dans un délai de huit jours ».
La déclaration de politique générale prononcée le 5 février ayant été adoptée par l’Assemblée 72 voix contre 53 abstentions sur 125 députés présents, le Mouvement de libération nationale-Burkina Faso (MLN-BF) prend acte de l’investiture de Monsieur Paul Kaba Thièba en tant que premier ministre, chef du gouvernement, donc habilité à diriger et coordonner l’action gouvernementale.
Devant les représentants du peuple, le premier ministre a annoncé plusieurs chantiers qu’il compte lancer et qui reprennent pour l’essentiel, le programme du candidat Roch Marc Christian Kaboré. Il s’est personnellement engagé- répétant à plusieurs reprises « mon gouvernement »- à conduire des réformes aussi bien institutionnelles que politiques, économiques et sociales nécessaires au bien-être des Burkinabè.
Tout en lui souhaitant bonne chance, le MLN-BF voudrait faire quelques observations :
• Le nombre de voix abstentionnistes (53/125 députés) montre que le chef du gouvernement ne bénéficie en réalité que de la totale confiance des députés de la majorité présidentielle. Autrement dit, une bonne partie de l’Assemblée nationale refuse de lui accorder un blanc-seing et attendent de le juger à l’œuvre. Le MLN-BF partage cette posture et fait sien l’adage selon lequel, c’est au pied du mur qu’on reconnait le maçon
• Dans son discours, le premier ministre a rappelé quelques indicateurs sociaux de notre pays en soulignant qu’en termes de développement humain, le Burkina « est classé au 183e rang sur 188 en 2014 selon l’Indice de développement humain (IDH) du PNUD. En outre, plus de 40% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté estimé à 153 530 FCFA par an et par personne ». Autrement dit, sur 19 millions d’habitants, plus de 7 millions vivent avec moins de 12 000F CFA/mois.
Mais d’où tire-t-il le chiffre de 40% ? En rappel, la Stratégie de croissance accélérée pour le développement durable (SCADD) mentionnait qu’en 2009-2010, 43,9% de la population vivait en dessous du seul de pauvreté estimé à 108.454 F CFA contre 46,9 en 2003 avec 82 672 F CFA. En sept ans, le niveau d’extrême pauvreté aura seulement baissé de 2,5%. Le MLN-BF voudrait savoir comment en l’espace de 5 ans, on est passé de 43,9 à 40% ?
• Le premier ministre a aussi indiqué que « le taux de croissance moyen enregistré au cours des dix dernières années (2006-2015) est de 5,5%, alors que le taux de croissance démographique au cours de la même période est ressorti à 3,1% par an. Avec un tel niveau de croissance du PIB, il nous faudra attendre 15 ans pour doubler le revenu par tête des burkinabé ». Sur la même période donc, l’augmentation du PIB par tête n’a été que de 2% !
Le chef du gouvernement ne donne cependant aucune indication des leviers sur lesquels il compte accélérer la croissance, en dehors des secteurs primaire et tertiaire. Il ne dit rien non plus sur ce qui pourrait être sa politique en matière de maitrise démographique. Ces interrogations appellent de sa part des réponses sans ambiguïté.
• Relativement aux finances publiques, il a informé l’assemblée nationale que « le déficit budgétaire hors dons ressortirait à 489,2 milliards de FCFA, soit -7,5% du PIB ; y compris les dons, le niveau du déficit est de 163,7 milliards, soit -2,5% du PIB », ajoutant que « l’accroissement démesuré des charges courantes notamment des salaires, dégrade le ratio masse salariale sur recettes fiscales (49% en 2015 contre une norme UEMOA de 35% au maximum). Cette situation pourrait se dégrader davantage en 2016, compte tenu des engagements d’augmentations salariales accordées par le gouvernement précédent (révision de la loi 13 de 1998, révision du statut des magistrats, des agents de la Douane, des greffiers et des agents de l’ASCE-LC, etc.»
Le MLN-BF note que dans le même temps, Paul Kaba Thièba annonce le recrutement de tous les étudiants ayant un diplôme supérieur. Quelque soit leur statut (contractuels ou titulaires), ce qui peut contribuer à réduire le chômage des jeunes, une bonne chose en soi et souhaité par le MLN-BF, mais cela aura des incidences sur les finances publiques. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire.
• Sur la nouvelle constitution, le MLN-BF marque sa disponibilité à participer aux débats préparatoires devant déboucher sur un texte consensuel consacrant l’avènement de la cinquième république
• Le MLN-BF note avec intérêt les engagements chiffrés pris par le premier ministre visant à améliorer l’offre de santé sur l’ensemble du territoire. Ces engagements suscitent beaucoup d’espoirs dans les villes et les campagnes et le MLN-BF ne manquera pas de rappeler, à intervalles réguliers, l’exécutif à ses engagements.
Il en est de même en ce qui concerne l’éradication des écoles sous paillottes qui sont une honte pour un pays aspirant à l’émergence. Sur un total de 800 écoles sous paillottes, vous avez pris l’engagement, monsieur le premier ministre, d’en normaliser 160 en 2016. Chiche !
• Le gouvernement compte 29 ministres dont sept (7) femmes, soit une proportion de 24,1%. Certes, c’est mieux que dans le précédent gouvernement et le premier ministre semble s’en satisfaire. Mais le compte n’y est pas. La loi sur le quota genre impose 30% de femmes dans les institutions et autres instances de décisions.
• Comme beaucoup de Burkinabè, le MLN-BF a été intrigué d’apprendre que trois semaines après la formation du gouvernement (13 janvier), le chef du gouvernement ait déjà négocié et obtenu d’importantes sommes, plus de 4 milliards de F CFA, destinées au bitumage des routes et la construction de pistes rurales. Si c’est vraiment le cas, le MLN-BF le félicite pour son entregent auprès des organismes financiers et sa capacité à mobiliser une telle somme en un temps record. Le MLN-BF se demande toutefois si ces rapides résultats ne sont pas l’aboutissement de négociations déjà entamées par les précédentes équipes gouvernementales. L’Etat étant une continuité, la pierre que chaque Burkinabè apporte à l’édification du pays doit être reconnue.
• Enfin, le MLN-BF se réjouit de voir que les propositions des autres candidats à l’élection présidentielle ont été considérées et en particulier la proposition de sa candidate à l’élection présidentielle, Françoise Toé, de combattre les accidents de la route en inscrivant l’apprentissage du code de la route dès l’école primaire a été prise en compte dans le programme du premier ministre. Le MLN-BF salue cette ouverture d’esprit. C’est le signe que notre démocratie se bonifie. Au-delà de nos divergences, chacun a bien le souci du développement de notre cher Burkina.
Ouagadougou le 08/02/2016
Françoise Toé
Candidate à l’élection présidentielle du 29/11/2015
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