«Pourvu qu’il se passe quelque chose !» Telle a été la prière in petto de l’auteur de ces lignes lorsqu’il a été désigné pour rédiger un carnet de route sur le voyage d’une vingtaine de journalistes du Burkina du 8 au 10 juin 2013 à Niamey pour la confrontation Niger # Burkina comptant pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2014. Eh bien, le moins que l’on puisse dire est que sa prière a été exaucée, puisque le déplacement des hommes de média en terre nigérienne pour le match, qui s’est joué le dimanche 9 juin au stade Seyni Kountché, a été des plus mouvementés, ponctué qu’il a été de pannes et de changement de véhicules, de découvertes, d’émotions diverses, de moments de villégiature dans la convivialité et la solidarité. Le tout couronné par une victoire (0-1) des Etalons. Qui dit mieux ?
Justin Daboné, Kader Traoré, Adama Ouédraogo Damiss, Mohamed Arnaud Ouédraogo, Hyacinthe Sanou (L’Observateur Paalga), Antoine Battiono (Le Pays), Hamidou Kafando (Radio Salankoloto), Billa Moussavou (Canal3), Philippe Bationo (Le Quotidien), Oumar Kiemtoré (Radio Liberté), Alfred Conségré (Radio municipal de Ouagadougou), Ibrahim Bayili (L’Express du Faso), Bourahima Sawadogo (Canal Arc en Ciel), Ruben Wilson Adjete (Savane FM), Barnabé Kabré (Radio Omega), Mahamadi Kouanda (Radio Jeunesse), Samuel Kola, dit Samidjo (Radio Ave Maria), Lucien Koula (Optima FM), Amadou Junior Zongo (Le journal du Sport) : ce sont là, les journalistes qui ont répondu présent à l’appel pour le départ en direction de Niamey sur le coup de 6h00 le samedi 8 juin 2013 devant le siège de L’Observateur Paalga, sis rue Ousmane Sibiri Ouédraogo.
Après le Ouaga-Laye une semaine plus tôt depuis le même point de départ, nous voici de nouveau embarqués pour un autre périple, de 527 km celui-là. Le temps pour les fumeurs de griller une dernière sèche pendant que d’autres sirotent un petit verre de thé, et voici le car qui démarre pendant que Samidjo enroule autour de sa taille un rosaire kilométrique avec une petite prière. Les chefs de mission sont Kader Traoré et Adama Ouédraogo, initiateurs du voyage (voir encadré).
Le temps menaçant dehors tranche d’avec la bonne humeur teintée de parenté à plaisanterie dans le car. La télé à bord, après quelques réglages de ‘‘l’équipage’’ (Ndlr : le chauffeur et son apprenti), commence à diffuser des clips de musique burkinabè. Soudain, alors que les journalistes se trouvent sur l’avenue Charles de Gaulle à une centaine de mètres de l’hôpital pédiatrique, leur véhicule toussote et s’éteint. «Crevaison !» s’écrient Samidjo et Philippe Bationo. Non, c’est plutôt une panne sèche. «Mais c’est pas vrai, ce n’est pas ta voiture ou quoi ?» s’écrient des pisse-copies, furieux que le chauffeur ne leur ait pas signalé que son carburant n’allait pas atteindre la sortie de la ville, où ils ont prévu de prendre l’essence à une station Ecodis Excel (propriété d’un des mécènes du voyage, Amado Traoré). Bredouillant des excuses, le conducteur s’empresse de prendre un bidon et de courir jusqu’à ladite station qui, heureusement, se trouve à une trentaine de mètres de là. Profitant de cette pause forcée, certains se ruent dans un kiosque pour trouver de quoi grignoter. 15mn après, tout est réglé et le voyage reprend.
«Y a longtemps que je ne suis pas monté dans un arbre»
9h05, escale à Koupéla. L'occasion pour certains de se réveiller avec de la bière fraîche pendant que d’autres préfèrent un plat de riz chaud ou de la viande grillée. Le groupe de journalistes en escale constitue un véritable filon pour les cireurs de chaussures et les vendeurs de lotus et de tombola. Le périple reprend une bonne trentaine de minutes après dans une meilleure ambiance. Chacun trouve de quoi s’occuper selon son hobby : Justin Daboné, le "double gourou", revisite Maïmouna d'Abdoulaye Sadji, d'autres se plongent dns les journaux du jour, quelques-uns devisent en jetant un œil distrait sur les clips. Après seulement quelques minutes de route, le chauffeur signale que son moteur chauffe trop et qu’il faut faire une halte pour qu’il se refroidisse. Nous sommes à hauteur du village de Gounghin. «On va cueillir tous les karités», se disent des confrères prenant d’assaut les buissons au bord de la voie. A l’ombre des arbres fruitiers, c’est un véritable débat sur le sport burkinabè qui commence avec au crachoir Moussavou Billa, Kader Traoré et Arnaud Ouédraogo. 30mn de pause forcée et voilà les voyageurs qui repartent de nouveau après avoir poussé le car pour qu’il démarre. La panne est vite oubliée, chacun retrouvant son loisir. Mais à une cinquantaine de km de Fada, le véhicule toussote le véhicule encore et s’éteint. Nouvelle panne. Cette fois-ci, le bus semble ne plus pouvoir avancer. L’un des chefs de mission, Damiss, appelle alors un ami à Fada pour qu’il vienne avec un mécano. En attendant, revoilà nos scribouillards sous les arbres fruitiers. Il est presque midi. «Y a longtemps que je ne suis pas monté sur un arbre», dit Mohamed Arnaud Ouédraogo qui grimpe sur un karité pour jouer le Mowgli. Grappes de raisins sauvages en mains, les journalistes se lancent de nouveau dans un débat pendant que le chauffeur et son apprenti examinent le bus dans tous les sens pour déceler la panne. D’autres préfèrent tchater sur Facebook. Arrive enfin le mécano. Impossible de réparer le car sur place, conclut-il après une inspection du véhicule. Damiss s’en va alors à Fada avec son ami pour chercher un autre véhicule. Nous sommes torses nus, assis sur des racines, sur le bitume, à même l’herbe ou encore couchés sur des draps, et le temps devient long. On apprend que le véhicule qui doit nous secourir viendra finalement de Ouaga, d’où il aurait démarré depuis «un bon bout de temps». La chaleur faisant et la fatigue gagnant, les esprits s’échauffent. «Ah non, si c’est comme ça, moi je préfère repartir à Ouaga» grommelle Justin Daboné. «J’ai faim !», «J’ai soif» se plaignent d’autres voix.
Le conducteur, considéré comme le principal fautif n’est pas épargné : «C’est pas le car qui est en panne, hein, c’est le chauffeur ! Depuis qu’on a eu une panne sèche, j’ai su que celui-là ne pouvait pas nous amener bien loin. Voilà !»
Samidjo, lui, reste confiant : «C’est de bon augure pour la suite».
Certains préfèrent rejoindre le car pour deviser. «Les gars, j’ai des cacahuètes mais mon eau est finie, comment on fait ? Vous avez l’eau, moi j’ai les arachides», lance Amadou Junior Zongo. Kader Traoré lui répond avec une sorte de parabole : «Connais-tu l’histoire de cet étranger qui avait du tabac pendant que son hôte avait la pipe ?
- Enlève un peu de tabac pour qu'on fume avant de manger, lui a demandé son hôte.
- Non, c’est mieux de manger avant de fumer répondit l’étranger.
Vexé, l’hôte dit alors à sa femme de ne pas servir le repas. Se rendant compte que le repas prenait une éternité pour être servi, le visiteur compris et dit à son hôte :
- On dirait que tu as raison hein, c’est mieux qu'on fume avant de manger».
Et une fois le tabac fumé, le repas fut servi».
«Ok, c’est bon, j’ai compris, moi j’ai les arachides et vous, vous avez l’eau, donc mangeons les arachides d’abord et ensuite buvons», conclut Junior. Eclats de rires dans l'habitacle pendant qu’on se partage les arachides et les bidons d’eau.
13h50. Ouf ! le second car est enfin là. Le transbordement des passagers et des bagages est rapidement fait. «Tout le monde garde sa place», crie Ibrahim Bayili. «Oui mais dans le nouveau car», lui répond-on. La plaisanterie passe bien, et l’atmosphère est plus détendue pendant que le voyage reprend. Beaucoup s’endorment même avant Fada, où Damiss nous attend dans un restaurant dans lequel notre table a été déjà dressée. Du riz à la sauce légumes pour tout le monde, régime végétarien pour les uns, «carnivore» pour les autres ; «majoration» pour Philippe Bationo, et voilà le petit monde de la presse qui reprend la route, tout joyeux. Il est 15h et demie. Occasion pour Justin Daboné d’appendre que la chanson «Ya 2kas, ti fo yél ti boin (C’est 2kas, et puis tu dis quoi ? traduite de langue nationale mooré)», reprise en chœur par les jeunes gens dans le car, reprend en fait son expression favorite : «Ton problème est où ?». Une pluie s’invite au voyage alors qu’il est 16h10. Petit cours de français avec Justin Daboné, qui, amoureux et véritable puriste de la langue de Molière, ne manque pas de corriger ses jeunes frères. Ces derniers apprennent ainsi, entre autres, qu’on ne dit pas «j’ai envie de ch...» mais plutôt «je dois satisfaire un besoin pressant». Tout comme on ne dit pas «on rentre à Niamey» mais «on est en partance pour Niamey».
18h30, nous voilà à la frontière du Niger. Samidjo esquisse quelques pas de danse dont lui seul a le secret.
«Il est là, le connard là ?, Jonathan Pitroipa», demande, taquin, un douanier nigérien au poste de Makolondi. «Oui, le meilleur joueur africain est là et il va marquer», répondent les journalistes en chœur.
«Venez voir, ils vendent les chapeaux de Saponé ici», s’écrie Samidjo en apercevant une maisonnette peinte en rouge et blanc sur laquelle est dessiné le fameux chapeau. «Ce n’est pas une boutique de vente des chapeaux de Saponé mais plutôt de préservatifs nigériens appelés Foula dont le symbole ressemble au chapeau de Saponé», lui souffle à l’oreille Arnaud Ouédraogo qui semble s'y connaître. «Vierge Marie !» s’écrie Samidjo qui remonte dans le car sans demander son reste.
Le roaming laissant à désirer, il faut se résoudre à acheter une puce locale sans oublier de régler les montres, le Niger ayant une heure d’avance sur le Burkina. Le temps de goûter aux dattes et de remplir les formalités, et les voyageurs sont «en partance pour Niamey».
20h, Niamey enfin. Les habitués de la capitale nigérienne réveillent leur carnet d’adresses : «Je connais un colonel», «je connais un confrère», «j’ai un taximan choc choc». D’autres se voient déjà sirotant de la «conjoncture» (surnom de la bière nigérienne). Conduite par le président de l’association des journalistes nigériens, Mohamed Slimane, la délégation rejoint ensuite la Résidence Mermoz, où elle installe ses pénates pendant qu’il pleut sur Niamey. Samidjo prend congé de la délégation pour aller dormir chez un ami qui devait le conduire le lendemain matin à l’église de Niamey, où il devait couvrir l’ordination du premier évêque nigérien, Mgr Laurent Lompo. La pluie ne décourage pas certains téméraires qui, si tôt les dernières gouttes tombées, prennent la ville en mains alors que des délestages réguliers l'affectent.
«Niamey by night» dans le noir
Le matin du dimanche 9 juin 2013, pendant que la consécration de Mgr Laurent Lompo bat son plein à l’église de la capitale, des journalistes cherchent à prendre leur petit déjeuner. Kader Traoré et Antoine Bationo sortent pour récupérer les badges pour le match. Ils reviennent avec 20 sauf-conduits (le nombre exact de journalistes) à l’heure du déjeuner.
Le temps de faire un tour dans le quartier pour digérer et de prendre des paris sur le match avec le personnel nigérien de l’hôtel et voici l’heure d’aller au stade. «Maazou va marquer de la tête et Pitroipa va pleurer», promet le cuisinier alors que le car démarre pour le stade à 14h et demie.
Une fois devant le stade Seyni Kountché, il faut chercher deux tickets d’entrée pour le chauffeur et son apprenti et montrer patte blanche avant d’avoir accès à la cuvette. Juste à temps pour entendre les hymnes nationaux et observer la minute de silence avant le match. Charles Kaboré était suspendu pour cette rencontre, et il lui a été interdit d’accès à la tribune officielle par les forces de l’ordre postées là. Les policiers, qui n’ont pas reconnu le capitaine burkinabè, n’ont visiblement pas jeté un coup d’œil aux affiches géantes annonçant le match partout à Niamey avec face à face Maazou et Charles. Il faut l’intervention de membres de la Fédération nigérienne de football pour que Charles puisse passer, pendant que la partie débute.
Hormis l’épisode avec Baba Alpha (voir encadré) et le cas de cette supportrice nigérienne qui a perdu connaissance et a dû être évacuée par les sapeurs-pompiers, le match se déroule sans accroc majeur. Il est même un peu ennuyeux pour certains, qui préfèrent jouer au scrabble sur leur tablette. Les journalistes burkinabè et nigériens se muent rapidement en supporters. Les piques ne manquent pas. «Votre meilleur joueur d’Afrique là, nous l’avons attaché, il ne pourra rien faire» ; «Penalty, Hum l’arbitre n’ose pas siffler, c’est le pays de Blaise Compaoré !»entend-on du côté nigérien. «Maazou, c’est maïs !» ; «Comme Alain ne pouvait pas venir, il a envoyé son petit frère (Bertrand Traoré) : Ndlr» répondent des Burkinabè. L’ouverture du score par Pitroipa libère le camp burkinabè, qui chambre celui nigérien. Beau joueur, l’on se serre la main à la fin du match, soldé par une victoire burkinabè (1-0). Le fair-play n’empêche pas des boutades : «ça va aller ! Vous avez une bonne équipe. Nous aussi avant on perdait comme vous, maintenant nous sommes vice-champions d’Afrique».
Contrairement à la sélection nigérienne dont le car essuie des projectiles en quittant le stade, la délégation des journalistes burkinabè s’en va avec quelques saluts des supporters nigériens. Escale pour envoyer des articles à Ouaga par mail et retour au pied-à-terre. A leur arrivée à la résidence Mermoz, le personnel fuit littéralement les journalistes. Coincé dans la cuisine, le cuistot, lui, ne peut qu’encaisser les moqueries : «Tu avais mal vu hein ! C’est Pitroipa qui a marqué de la tête et Maazou a pleuré !». «Merci» se contente-t-il de répondre. Pendant que les plus âgés décident de boire une bière à l’hôtel à la santé des Etalons, les «jeunes gens» décident d’aller le faire en ville. Vite un bain et une tenue de ville, et le car dépose les noctambules au centre ville. Puis le chauffeur rentre se coucher pour reprendre des forces pour le voyage retour du lendemain. Les jeunes gens entreprennent de tester toutes les boîtes de nuit situées sur la rue afin de faire leur choix. Leurs critères de sélection semblent être la musique, le confort du cadre et les clientes. Finalement, ils jettent leur dévolu sur le "Zanzi", une boîte de nuit à l’intérieur de laquelle ils retrouvent d’ailleurs le défenseur du onze national, Mohamed Koffi, venu sans doute faire son «décrassage» d’après match. Il est bientôt rejoint par Ali Rabo et Henri Traoré pendant que les coupures d’électricité s'enchaînent. «Ça, c’est un Niamey by night dans le noir», hurle un journaliste pour couvrir le son des baffles dans lesquels le DJ ne cesse de louer les Etalons. Les occupants du salon VIP attirent naturellement l’attention des clients de la boîte mais surtout celle des clientes. L’une d’elles, la plus entreprenante vraisemblablement, se mêle au groupe pour esquisser quelques pas d’Azonto. Au grand bonheur de... qui engage la conversation avec la charmante et callipyge demoiselle. «Avec moi, c’est 100 dollars ou rien», tranche, entre-temps, la go court vêtue. Renonçant à faire le calcul mental d’une conversion en F CFA, notre «Roméo» s’avance vers ses caramades et demande : «100 dollars, ça fait combien même ?». «1 dollar ça fait 500 F CFA. Ajoute deux zéros et tu sauras», lui répond-on. Le résultat de son calcul mental semble littéralement refroidir les ardeurs du chaud lapin, qui prend aussitôt congé de la pin-up. Le groupe des joueurs s’agrandit avec Bertrand Traoré et Benjamin Balima, qui font un passage en flèche. Un à un, les autres footballeurs se retirent également. Soudain, alors qu’il est minuit passé, un nuage de poussière enveloppe la ville, s’engouffrant à l’intérieur de la boîte de nuit. Et comme pour ne rien arranger, une nouvelle coupure d’électricité plonge la salle dans le noir. Mieux vaut sortir pour respirer un tant soit peu. Dehors on se croirait en pleine tempête de sable. Il est temps de rentrer pour les journalistes qui hèlent deux taxis dans lequel ils s’engouffrent. Direction Mermoz. Le délestage est général et la ville est plongée dans le noir. C’est d’ailleurs dans l’obscurité que chacun rejoint sa chambre alors que Kader rappelle à tous que le départ est fixé à 9h.
Le match Niger # Burkina est au centre de toutes les conversations au petit déjeuner, le lundi 10 juin 2013. Les actions de jeu, l’émotion de Benjamin Balima, la piètre prestation de certains canassons, l’entrée salvatrice de Bertrand, le coaching sur mesure de Paul Put ; tout est passé en revue par ces spécialistes du foot burkinabè. 9h, il est temps de régler les notes et de prendre congé du personnel de l’hôtel avec lequel des liens se sont vite tissés. Beaucoup veulent faire un tour au marché : «Je veux du kilichi», «il me faut des criquets», «si moi je ne rentre pas avec des dattes, je suis mort». Néanmoins, l’on fait une halte pour avoir de la connexion afin d'envoyer des articles à Ouaga. Il nous faut ensuite demander notre chemin à un commerçant, qui, très serviable, accepte de monter avec nous pour nous montrer «l’usine de kilichi». Manque de pot, ce n’est pas encore prêt. Il faut arriver chez un autre vendeur, cent mètres plus loin. Pendant que les uns font le trajet à pied et que les autres reprennent le car, Ibrahim Bayili, lui, se fait remorquer sur une moto. Bien lui en prit, car il arriva le premier sur les lieux et s’empressa de se faire servir. Il aura plus de chance que les autres, car, à la vue d’une vingtaine de clients, le boucher diminue visiblement les quantités. De l’autre côté de la voie, à l’ombre d’un hangar, une demi-douzaine de jeunes hommes sont en pleine préparation du kilichi. Avec les journalistes, les questions ne manquent pas. «Quand on ramène la viande de l’abattoir, on la découpe en lamelles puis on la faite cuire sur feu doux. La cuisson prend une journée. On en exporte au Burkina, au Nigeria, en Côte d’Ivoire et même au-delà», synthétise un boucher répondant ainsi à une série de questions. Alignés en rang, tous s’achètent un ou plusieurs paquets. Le vendeur de viande grillée d’à côté est également assailli par le groupe, qui dévore littéralement ses morceaux. «Les dattes, on va les payer à la frontière, car on n’a plus le temps», lance Kader alors qu’il est midi. Le fleuve fait partie des dernières images prises de Niamey.
La chaleur est étouffante sur le chemin du retour. Les journalistes recherchent en vain le douanier nigérien qui avait traité Pitroipa de connard. «Désolé hein, on est venu vous battre et on s’en va» plaisantent-ils avec les forces de l’ordre. «Mon portable est original, il change d’heure automatiquement quand on passe la frontière», annonce fièrement Samidjo pendant que l’on se rapproche du Burkina; malheureusement, son appareil ne change pas d’heure lorsque le car franchit les limites territoriales, déclenchant l’hilarité de ses voisins. «Chinetoc, ce n’est vraiment pas fiable. N’aie pas honte, change l’heure manuellement, c’est pas grave», le moque-t-on. «Je nargue les Nigériens d’ici», nous confie un agent du poste de péage ajoutant que, depuis le matin, les supporters ne font que passer. Nouvelle escale incontournable à Koupéla pour se restaurer alors qu’il est 18h et que le groupe est en partance pour Ouaga, qu’il ralliera à 20h passé. Un ban pour Kader et Damiss, un autre pour le chauffeur et chacun rejoint son domicile pour conter son aventure.
Hyacinthe Sanou
Ouaga-Niamey-Ouaga
Un trublion nommé Baba Alpha
Si les confrères nigériens dans l’ensemble, le président de l’association des journalistes sportifs, Mohamed Slimane, en tête, ont été fidèles à la tradition de l’hospitalité africaine, faisant tout pour agrémenter le séjour des journalistes burkinabè, il y a cependant eu une exception qui confirme la règle : Baba Alpha de la chaîne LTV. La délégation burkinabè a cru d’abord avoir affaire à un xénophobe lorsque ce dernier, se pointant en retard au stade, a voulu devancer les journalistes burkinabè déjà en rang pour passer la sécurité. Aux forces de l’ordre qui lui ont enjoint de respecter les gens en respectant le rang, il a crié : «ici c’est le Niger, je suis chez moi, je fais ce que je veux». Puis, on a pensé qu’il s’agissait tout simplement d’un aigri lorsqu’une fois dans la cuvette, il a ordonné à son cameraman de venir se placer devant des confrères burkinabè, leur cachant ainsi la vue et en criant : «Ils nous ont fait la même chose à Ouaga». Vive colère des Burkinabè qui lui expliquent avoir eux-mêmes été victimes de l’épisode ouagalais lorsque la tribune de presse a été envahie par des supporters. Ils se calment finalement et le laissent à ses vociférations, et vont occuper des places plus en hauteur que leur ont trouvées des confrères nigériens. Finalement, ils se rendront compte à la conférence de presse d’après match que ce Baba Alpha n’est qu’un trublion, adepte de la provocation lorsque ce dernier s’en prendra vertement au sélectionneur nigérien, Gernot Rohr. «Avant vous, le Niger ne perdait jamais à domicile et n’encaissait pas plus d’un but à l’extérieur. Aujourd’hui tous ces acquis sont perdus. Depuis votre arrivée à la tête de l’équipe nationale en septembre 2012, en 4 matches, le Mena a encaissé 3 buts contre le Congo, 3 contre le Gabon, 4 contre le Burkina et 1 à domicile. Qu’avez-vous donc encore à prouver aux Nigériens ?» a-t-il lancé à la figure de l'entraîneur. «Les questions de M. Baba Alpha, on les connaît depuis la CAN où les gens de la CAF nous avaient dit qu’il y a un véritable acharnement de votre part et je vois que ça continue», a répliqué Gernot Rohr expliquant que, pour lui, le Niger avait par contre progressé dans le jeu sous sa houlette et que toute l’équipe a tout donné. Baba Alpha revient à la charge : «Vous êtes un menteur ! Le Niger n’a pas besoin de gens comme vous». «Baba, s’il te plaît ! Il faut que tu respectes les gens quand même. Tu seras évacué hein !», lui dit le maître de cérémonie. «Evacues-moi ! C’est un menteur. L’Egypte 7 fois champion d’Afrique, on l’a battue avec un entraîneur nigérien. Et tu dis qu’on a bien joué ? Tu es un menteur !» a continué à vociférer notre trublion de confrère nigérien. No comment !
Kader Traoré, l’un des initiateurs du voyage
«Rebelote au mondial 2014 ? Pourquoi pas !»
Quatre questions à Kader Traoré, journaliste à L’Observateur Paalga, coïnitiateur du voyage de Niamey avec son collègue Adama Ouédraogo Damiss.
Comment vous est venue l’idée d’organiser un tel voyage ?
• Au début, notre idée, c’était de chercher un véhicule personnel 4*4 pour aller vivre le match des Etalons à Niamey. Après réflexion, nous nous sommes rendu compte que la location d’une voiture revient sensiblement à la même chose qu'à celle d’un car. Nous nous sommes alors dit : pourquoi ne pas prendre en même temps un car et associer quelques amis de la presse sportive pour aller vivre l’ambiance à Niamey ? De fil en aiguille, nous avons approché certaines bonnes volontés, qui n’ont pas hésité un seul instant à nous aider. Pour preuve, l’appui consistant du DG du Groupe Ecodis Excel, Amadou Traoré (ancien président du RCK), bien connu dans le milieu du foot, du ministre des Sports et des Loisirs, Yacouba Ouédraogo, et du P-DG du Groupe SOMIKA, El hadj Adama Kindo, nous a vraiment procuré des commodités pour que nous puissions effectuer le voyage à Niamey.
Que s’est-il passé avec le premier car, qui est tombé en panne?
• Quand vous effectuez les petites missions de ce genre, il y a des faits anecdotiques qui viennent agrémenter un peu le trajet. J’en veux pour preuve cette panne qui est survenue à une cinquantaine de km de Fada, où nous avons été contraints de changer de car parce que le moteur du premier avait des difficultés à poursuivre le chemin. Dieu merci, tout s’est bien passé et rapidement. Dès lors que nous avons contacté notre partenaire qui nous avait loué le premier bus, il a automatiquement réagi en envoyant un autre. En moins de deux heures d’attente, le second véhicule est venu nous secourir, et nous avons pu continuer sans aucune autre difficulté. C’est ça aussi qui agrémente ce genre de voyage.
Quel est le bilan que vous tirez de ce voyage ?
• Un bilan positif à tous les niveaux. Nous avons voyagé dans des conditions acceptables. Nous sommes arrivés à Niamey sains et saufs. Les Etalons ont remporté la victoire, et nous sommes revenus à Ouaga en bonne santé. Au vu de tous ces éléments, nous pouvons dire que tout s’est bien passé et que nous sommes satisfaits de ce séjour à Niamey.
Peut-on s’attendre à ce que vous rebelotiez notamment pour le mondial 2014 au Brésil ?
• Niamey, c’est la capitale la plus proche de Ouaga. Ce n’est vraiment pas évident qu’on puisse organiser ce genre de voyages pour le Brésil parce que là, ça doit se passer en avion. C’est beaucoup plus lourd à supporter. Mais pourquoi pas ? Nous n’écartons rien. On ne sait pas qui peut épouser notre idée et voler à notre secours. Peut-être que si les bonnes volontés nous accompagnent, nous tenterons de faire quelque chose,même si le Brésil n’est pas la porte d’à côté. En attendant, il faut d'abord se qualifier.