Depuis le samedi 8 juin 2013, les acteurs de la crise malienne discutent à Ouagadougou, sous l’égide du médiateur, Blaise Compaoré, de la difficile question de Kidal, la capitale de l’AZAWAD. Cette partie malienne est toujours aux mains du Mouvement national pour la libération de l’AZAWAD (MNLA). L’objectif recherché à Ouagadougou, c’est d’obtenir un accord entre les protagonistes afin que l’élection présidentielle prévue pour fin juillet prochain, se tienne sur toute l’étendue du territoire malien. Pendant qu’à Ouagadougou, le médiateur et son entourage se débattent pour sauver un pays voisin et frère qui s’appelle le Mali, des jusqu’au-boutistes, des oiseaux de mauvaise augure, dans leurs bureaux à Bamako, pronostiquent déjà l’échec des négociations. Pour eux, le Mali n’a pas besoin de laver son linge sale à l’étranger. L’histoire se répète encore pour le médiateur Blaise Compaoré. Critiqué, vilipendé par les faucons du régime de Laurent Gbagbo, en Côte d’Ivoire, le salut ivoirien s’est obtenu finalement par le dialogue à Ouagadougou, le 4 mars 2007. C’est par le dialogue que la restauration de l’autorité de l’Etat et le redéploiement de l’administration sur l’ensemble du territoire national ivoirien ont été possibles. On se souvient aussi de la crise guinéenne qui a trouvé son dénouement à Ouagadougou, par la signature d’un accord le vendredi 15 janvier 2010. Il n’y a pas lieu d’avoir une courte vue. Les faits sont là. L’histoire récente de la sous-région a donné raison à ceux qui ont fait confiance au président Compaoré en lui confiant la médiation dans les crises qui ont sécoué des pays de l’Afrique de l’Ouest.
Pour le cas malien, l’on retient que déjà, l’homme a réussi à faire fléchir les positions de certains irréductibles du Mouvement national pour la libération de l’AZAWAD qui ne parlaient que d’indépendance. Aujourd’hui, il est question d’autodétermination. Demain ce pourrait être une revendication de meilleures conditions de vie pour les peuples du septentrion malien.
Les responsables des mouvements armés savent que leur intransigeance pourrait hypothéquer la paix au Mali, mais aussi celle de la sous-région ouest-africaine.
Il y a une fracture entre le Nord et le Sud du Mali. La méfiance et l’incompréhension entre les deux parties du territoire s’est amplifiée. Depuis la reprise des hostilités entre l’armée malienne et les groupes du Nord pour la reconquête de cette partie du pays et précisément de Kidal, les Maliens qui ont la peau noire se plaignent des exactions commises par les Touaregs dans la ville convoitée. C’est pour apaiser les esprits que le médiateur préconise l’arrêt des hostilités. Cela permettra de mettre en œuvre le second point de son plan, à savoir le redéploiement de l’administration au Nord-Mali.
Si l’objectif de la communauté internationale est d’aboutir à des élections pour normaliser la situation malienne, il ne serait pas de trop de demander aux Maliens d’accompagner le médiateur dans sa tâche. Les critiques négatives, les présuppositions et les discours radicaux distillés par certains médias maliens ne sont pas de nature à ramener la paix.
Après Ouagadougou, le Mali va devoir réconcilier toutes les populations du pays issues des différentes ethnies. Les rebelles touaregs savent que leur avenir n’est pas encore assuré au Mali. C’est pourquoi, ils ne se pressent pas à déposer les armes. C’est aux autorités de Bamako de les rassurer par des actes. Tant que la place des Touaregs ne sera pas assurée au Mali, la paix durable dans la région sera un leurre.
Certes, l’armée malienne semble avoir actuellement une force de frappe qui lui a permis de reprendre Anefis. Mais est-elle sûre de pouvoir contrôler l’ensemble du territoire pour de bon, face à des groupes qui semblent mieux maîtriser le Nord et qui traversent à leur gré, les frontières des pays limitrophes ? Refuser de négocier avec les modérés touaregs, c’est s’illusionner que la guerre au Mali se gagnera uniquement à coups de canon. Comme nous l’avions mentionné dans nos précédents écrits, tôt ou tard, les acteurs maliens se retrouveront pour des négociations et pour la pacification de l’ensemble du territoire. Ni l’armée française, ni celle du Mali, ni celle de la Mission internationale de soutien au Mali ne pourra ramener la paix durable sans associer le dialogue politique. Les Nordistes maliens peuvent perdre la bataille mais pas la guerre. Ils se feront toujours entendre lorsque les soldats étrangers s’en iront. Bamako doit définitivement trouver une solution à la rébellion touarègue qui occasionne chaque fois, des morts et des milliers de déplacés. Tant que les populations du Nord se sentiront oubliées, elles se feront entendre en désobéissant à Bamako.
A l’issue de l’élection présidentielle de juillet prochain, il va falloir poursuivre le dialogue. Le démocratiquement élu du peuple malien au soir du 28 juillet, devra en faire sa principale tâche s’il veut avoir la quiétude et se consacrer à la mise en œuvre de son programme politique.
Les Maliens et la communauté internationale peuvent mobiliser 55 milliards de FCFA pour tenir le scrutin de juillet, mais leurs efforts pour la paix définitive doivent se poursuivre après les élections. Un mécanisme de suivi permanent devra contribuer à concrétiser les intentions. L’Etat malien est à reconstruire. Son armée, ses forces de sécurité, sa justice, son administration et sa partie Nord en particulier peuvent mieux se porter. Malheureusement, le pays n’a pas les moyens de sa politique et de ses ambitions sans l’aide de la communauté internationale. Il a besoin de soutien, d’assistance. Faute de quoi, les forces de décomposition reprendront du poil de la bête et la sous-région n’aura que ses yeux pour pleurer. Alors que ceux qui passent le temps à jaser ou à jacasser, se fassent oublier afin de laisser libre cours à la négociation, au dialogue, à la paix.