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Art et Culture

Démocratisation de la culture au Burkina: Idrissa Zorom pour un processus «englobant et global»
Publié le jeudi 4 fevrier 2016  |  FasoZine




C’est le juriste, administrateur et gestionnaire culturel, Idrissa Zorom, qui a animé la première conférence publique de l’année 2016 d’Educ Afrique le samedi 30 janvier dernier à l’institut Goethe de Ouagadougou. Le conférencier a entretenu les étudiants, journalistes, hommes de culture et autres travailleurs sur la démocratisation de la culture au Burkina, dont il a dressé un état des lieux, relevé des insuffisances, et fait des suggestions visant à améliorer l’existant.
Le Directeur de la coordination des projets et programmes (DCPP) à la Direction générale des études et des statistiques sectorielles du ministère de la Culture et du Tourisme a, avant toutes choses, circonscrit son sujet et élucidé ses termes-clés. L’on retiendra ainsi que son exposé concerne la période correspondant à la gouvernance de la 4e république, même si Idrissa Zorom a précisé qu’il ferait parfois référence à des époques antérieures en cas de besoin.

Nonobstant l’existence d’au moins 180 définitions différentes du mot culture selon le rapport sur l’étude des impacts du secteur de la culture sur le développement social et économique du Burkina Faso de 2012, le communicateur du jour retient la définition de la culture formellement consacrée par la politique nationale de la culture, qui est celle donnée par l’Unesco : « Ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeur, les traditions et les croyances. »

Culture dominante

Quant au concept de démocratisation de la culture, il serait né au début des années 1960 en Europe et vise à donner accès à tous à la culture et aux arts. Fondée sur une politique volontariste des pouvoirs publics en termes de mesures et actions publiques en faveur de la création des institutions de promotion et de diffusion des biens et services culturels, cette notion serait souvent opposée à celle de démocratie culturelle qui, elle, est liée au fait que chacun puisse élaborer sa propre culture et son propre rapport à la culture. La démocratisation de la culture concourrait ainsi à l’émergence d’une culture dominante, élitiste et à la reproduction des inégalités sociales.

Après avoir fait un tour d’horizon des dispositions juridiques et politiques sur lesquelles se fonde la démocratisation de la culture, notamment la Constitution burkinabè, le DCPP dressera l’état des lieux de sa réalité à travers la mise en œuvre de la politique de démocratisation de la culture et des arts. Il a, pour ce faire, noté l’existence « d’un processus de démocratisation culturelle concrétisé par une approche de facilitation de l’accès à la culture à travers les institutions et infrastructures culturelles étatiques, le soutien technique et financier à la création, à la promotion et à la diffusion des biens et services culturels ».

En matière d’institutions et d’infrastructures culturelles et artistiques, il a cité comme exemples le musée national, la bibliothèque nationale, le théâtre national et la maison de la culture, ainsi que des salles polyvalentes construites lors des célébrations tournantes de la fête de l’indépendance. Sur le plan du soutien aux projets des opérateurs culturels, le gestionnaire culturel a rappelé que les « acteurs culturels privés constitués en associations, en entreprises privées ou à titre individuel reçoivent des appuis financiers du ministère de la culture et des arts sous forme de subvention pour la réalisation de leurs projets culturels ». L’organisation de manifestations culturelles publiques et l’institution de prix ont également été mentionnées par le juriste spécialiste des affaires culturelles comme des actions participant de la démocratisation de la culture.

Accroissement des moyensdes collectivités territoriales

Il a par conséquent cité, entre autres, le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO), la Foire internationale du livre de Ouagadougou (FILO), la Semaine nationale de la culture (SNC) et le Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO), le Grand prix national des arts et de la culture de la SNC, des prix littéraires de la FILO et des Etalons du FESPACO.

En dépit de ces acquis, l’administrateur culturel souligne que le processus de démocratisation de la culture et des arts comporte des insuffisances et limites en ce sens qu’il « ne parviendrait pas à instaurer un développement culturel véritable, qui soit englobant et global, prenant en compte l’ensemble des expressions culturelles et artistiques, car il n’est pas conduit sur la base de référentiels spécifiques comme une stratégie cohérente de démocratisation de la culture et des arts ».

Il suggère par conséquent de « réfléchir une telle stratégie qui intègrera les conditions de soutiens aux opérateurs privés et aux collectivités territoriales qui ont en charge le développement culturel local d’une part, et d’autre part, les modalités de développement des différentes filières artistiques et des formes et expressions culturelles nationales ».

Il recommande en outre l’accroissement des moyens et des ressources des collectivités territoriales en vue du développement des formes d’expressions culturelles et artistiques locales, le renforcement de la formation et de l’éducation artistique à travers sa généralisation dans le système d’enseignement obligatoire, l’élaboration d’une politique de bénévolat culturelle et artistique en vue de renforcer davantage le processus de l’éducation artistique populaire, l’ancrage du développement sur les valeurs et référentiels endogènes conformément au but de la politique culturelle qui est de fonder l’avenir de la nation sur les valeurs et réalités endogènes, la promotion de la créativité culturelle et artistique en vue d’asseoir une véritable diversité culturelle.

Parmi les nombreuses préoccupations soulevées par les participants, celle visant à savoir quel type de culture mérite d’être promu et démocratisé dans un contexte de mondialisation a permis au Pr Yves Dakouo, professeur à l’U.F.R. Lettres, arts et communication de l’université Ouaga 1 Pr Joseph Ki-Zerbo, et auteur du livre Emergence des pratiques littéraires modernes en Afrique francophone, de préconiser d’éviter tout repli sur soi-même, tout en se prémunissant, dans l’ouverture culturelle salutaire, de toute invasion culturelle venant d’ailleurs.

Juste Samba
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