L’association Tous pour le combat de la solidarité et de l’intégration (Tocsin) questionne, dans la lettre ouverte ci-dessous, la Cedeao sur son « mutisme » face aux expulsions de travailleurs migrants de Guinée.
« A Son Excellence Monsieur Kadré Désiré OUEDRAOGO,
Président de la Commission de la C.E.D.E.A.O.
Questionnement sur les exactions de l’Etat guinéen à l’encontre des travailleurs migrants et au sujet l’inertie de la C.E.D.E.A.O.
Monsieur le Président,
Le Tocsin, association burkinabè reconnue d’utilité publique se fait le porte-voix de nombreux migrants burkinabè victimes d’exactions en Guinée. Déjà le 15 décembre 2015, à travers la presse, le Tocsin interpellait les autorités Burkinabè, l’Etat guinéen et la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (C.E.D.E.A.O.) au sujet des entraves aux droits humains subis par des Burkinabè en Guinée. « Le 24 novembre 2015, 248 de nos compatriotes dont 241 hommes et 7 femmes avaient été arrêtés et chassés comme des malpropres de Guinée, renvoyés au Burkina Faso. Ayant été dépouillés de tous leurs biens, ils sont donc arrivés sans bagages et sans argent. » Une centaine de Burkinabè étaient détenus dans des conditions indignes d’un être humain par la gendarmerie départementale de Siguiri en Guinée.
A nouveau, le samedi 23 janvier 2016, nous avons assisté à l’arrivée de deux groupes d’une centaine et de quatre-vingt Burkinabè expulsés de Guinée, et les expulsions ne semblent pas être à leur fin. Tous les témoignages recueillis auprès de ces personnes rapatriées font état de traitements dégradants et inhumains comme la grande promiscuité dans les lieux de détention, la sous nutrition et la mal nutrition des personnes interpellées, les violences verbales. A cela, s’ajoute la spoliation des victimes de leurs biens (argent, or, habits et autre biens matériels).
Certains d’entre eux ont été séparés de leurs conjointes guinéennes et de leurs enfants.
Nous au Tocsin, sommes désagréablement surpris par les horreurs évoqués dans ces témoignages et par les lieux, acteurs et victimes concernés. Visiblement, les migrants africains dont les Guinéens sont mieux traités en Europe et ailleurs. A-t-on encore conscience de la sagesse africaine qui dit que : « Lorsque la pluie vous bat, gardez-vous de vous battre entre vous. »
Face à cette situation, nous nous posons de nombreuses questions jusque-là sans réponse sur le silence sinon l’impuissance de la C.E.D.E.A.O face à ces exactions :
La libre circulation des personnes dans l’espace C.E.D.E.A.O., le droit de résidence et d’établissement conformément au « Protocole sur la Libre Circulation des Personnes, le Droit de résidence et d’établissement » ne seraient-ils que des vœux pieux ?
Les lois nationales sont-elles au-dessus des règles communautaires ?
L’irrégularité de la présence d’immigrants peut-elle justifier des violations graves de leur dignité d’homme et leur spoliation des biens acquis à la sueur de leurs fronts ?
Le Tocsin par la présente tient à condamner avec fermeté le déni répété des droits humains à l’encontre de nos compatriotes par les autorités guinéennes. Il demande à la C.E.D.E.A.O. d’aller au-delà des bonnes intentions et de veiller au respect de ses règles pour protéger les ressortissants communautaires dans son espace et éviter des répercussions fâcheuses. »
Tous pour le Combat de la Solidarité et de l’Intégration
Ouagadougou, le 1er février 2016
Pour le Bureau Exécutif, le Président
Arouna SAVADOGO
Commandeur de l’ordre du Mérite