L’Union pour le Progrès et le Changement (UPC), principal parti de l’opposition burkinabè veut la création d’un ministère de Sécurité "plein", après des attaques armées au Centre de Ouagadougou et au Nord du pays qui ont fait 32 morts et plus d’une cinquantaine de blessés, a affirmé son porte-parole Rabi Yaméogo, dans une interview à ALERTE INFO.
La date des élections initialement prévues le 31 janvier a été fixée au 22 mai, mais des partis avaient évoqué l’insécurité en souhaitant sont report. Quelle est la position de l’UPC ?
Pour l’UPC, nous pensons qu’il revient au gouvernement de prendre toutes les dispositions pour mettre en sécurité les Burkinabè. C’est d’abord son rôle premier. Comme le disais le président Roch Marc Christian Kaforé (élu le 29 novembre après 13 mois de transition), nous sommes dans un environnement. Donc ce n’est pas parce qu’aujourd’hui le Burkina a connu un attentat que tout doit s’arrêter.
Avec ces Djihadistes on est parti sur une longue durée tant au niveau du Burkina que de la sous-région. Il y a des pays voisins qui depuis un certain temps n’ont pas la paix à cause de ces attaques. L’UPC appelle tous les Burkinabè à se lever comme un seul homme et chacun à être un soldat d’abord à son niveau afin d’être vigilant pour se protéger soi-même et la nation. Et les Forces de défenses et de sécurité conventionnelles vont compléter par leurs actions. Il appartient à tout le monde de faire le travail de sécurisation.
Et puis, la sécurité n’est pas absolue même dans les grands pays. Donc il n’y a pas forcement de rapport entre les élections et la sécurité. C’est à l’Etat d’être à la hauteur des enjeux. Des pays comme le Mali et le Nigéria notamment ont organisé des élections dans des conditions difficiles car l’Etat est une continuité. Rien ne détermine si dans les mois à venir nous seront plus en insécurité que dans la sécurité. Tout a été mis à plat sous la transition.
Donc une fois que les élections présidentielles et législatives ont été organisées, il faut boucler la série des élections par les municipales et passer au travail. On doit certes reculer les élections parce qu’il y a eu perturbation due (au coup d’Etat de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle, ex-garde prétorienne du président déchu Blaise Compaoré, le 16 septembre), mais rien n’allait justifier son renvoi jusqu’en septembre comme le souhaitaient certains partis politiques.
Des formations politiques qui veulent bien se préparer évoquent aussi des points d’achoppement au niveau du code électoral qu’on doit revoir ?
Il n’y a pas un parti politique sérieux qui peut dire qu’il n’est pas prêt pour les municipales qui étaient déjà programmées le 31 janvier. Mais comme les délais initialement prévus ont été perturbés par le putsch, c’est plus sage de les reculer de deux à trois mois pour permettre à la Commission électorale nationale indépendante (CENI, l’organe organisateur des scrutins) de le faire. Elle dit qu’elle est prête. Qu’est-ce qui nous empêche d’aller aux élections.
C’est vrai que le code électoral a été querellé sous la transition. Nous estimons au niveau de l’UPC qu’on doit organiser les élections et remettre sur la table tous les textes qui doivent être toilettés pas seulement celui du code électoral. Je pense que le meilleur code, c’est quand on le fait en dehors des élections. Donc nous voulons qu’on achève d’abord avec la série des élections quitte à ce que tous les partis politiques, tous ceux qui souhaitent une modification quelconque fassent connaître leurs intentions. Et il revient au gouvernement de faire une large consultation afin de régler cette affaire par le consensus de tous les acteurs.
Sinon tant que les maires ne seront pas élus on est dans une situation inégale. Ce qui fait que les bailleurs de fonds ne peuvent pas s’intéresser au développement des collectivités locales. Les présidents des délégations spéciales (désignés sous la transition pour remplacer les maires qu’on avait déchu) ne peuvent pas prendre de fortes décisions parce que leur autorité et rôle sont limités. Or, le peuple est dans l’attente.
Comment avez-vous appréciez la gestion de l’attaque armée au Centre de Ouagadougou dans la nuit du 15 janvier ?
L’UPC a appris comme tout le monde qu’il y a eu près de deux heures que les Forces de défenses et de sécurité burkinabè ont mis avant d’intervenir. On a même lu dans certains journaux cette lenteur. Même le ministre d’Etat, ministre de la Sécurité intérieure Simon Compaoré a parlé de cette lenteur en expliquant qu’il fallait attendre l’arrivée des forces spéciales françaises et américaines pour avoir plus de cohérence dans l’action. Pour nous, vu que c’était la première fois que notre pays fait face à ce genre d’attaque, c’est tout à fait normal qu’il ait de flottement.
Maintenant je pense que nous devons travailler de sorte à ce que dans l’avenir, on ne le souhaite pas, qu’on soit plus réactif pour minimiser les dégâts face à une éventuelle attaque. Sinon comme c’est la première fois qu’on fait face à une telle situation, on ne pouvait pas non plus l’aborder avec précipitation car n’étant pas des spécialistes en la matière.
Quelle proposition l’UPC a, à l’endroit du gouvernement pour renforcer la sécurité du pays ?
Vu le niveau de l’insécurité, ça mériterait quand même qu’on ait un ministère de Sécurité plein pour la simple raison que cela ha demander beaucoup de moyens. Et puis il faut aussi des spécialistes. Donc si on part du principe que le renseignement est un élément cardinal où il faut beaucoup de moyens, il faut qu’on ait un ministère vraiment autonome dans le vrai sens du terme.
Que répondez-vous à ceux qui estiment que la dissolution de l’ex-RSP et l’emprisonnement de son patron, le général Gilbert Diendéré, chef du renseignement sous Compaoré, a favorisé les attaques armées ?
Le renseignement ,il faut le dire n’a pas fonctionné pour la simple raison que les Djihadistes on pu asseoir leur base au Burkina avant de passer à l’action. Les Burkinabè doivent avoir désormais le réflexe de signaler tous les faits et gestes des individus jugés suspects. Il faut qu’on soit vigilant partout dans le pays. L’Agence nationale de renseignement est un défaut parce qu’il a fallut attendre l’attaque terroriste pour que le peuple burkinabè puisse savoir qu’elle n’était pas fonctionnelle.
Nous n’allons pas dire que c’est parce que l’ex-RSP (cité corps d’élite) n’est plus qu’il y a eu ces attaques mais nous allons seulement dire qu’il n’y pas des hommes indispensables pour le Burkina. Le général Gilbert Diendéré (actuellement incarcéré après le putsch) et l’ex-RSP ont eu leur mérite. Des corps d’armées comme la gendarmerie ont fait cas de manque de moyens et je pense que c’est à ce niveau que le débat doit être plus concentré.
Des voix s’élèvent pour accuser le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP, parti de Blaise Compaoré) d’être derrière ces attaques en vue de déstabiliser le pouvoir, quel est votre avis sur ce sujet ?
Nous ne sommes pas de ceux qui font leurs analystes sur des suppositions. Les uns et les autres doivent-être assez responsables et éviter les accusations gratuites qui, à mon avis sont inutiles et divisent les Burkinabè. Si un Burkinabè quelque soit son rang et son titre est impliqué dans ces actes terroristes, nous pensons qu’il faut les dénoncer avec preuves à l’appui afin qu’on puisse les punir à la hauteur de leur forfait.
L’UPC n’est pas sur le passé des gens. Nous condamnons tous ceux qui accusent sans preuves. Les accusations gratuites relèvent de la malhonnêteté intellectuelle qu’il faut condamner. Si ceux qui accusent ont des preuves qu’ils les apportent à la justice afin de lui permettre d’avancer dans ses enquêtes.
Je ne pense pas que ce sont les partisans du CDP qui poussent les djihadistes à faire les mêmes attaques dans des pays comme le Mali, Nigéria, France, les USA et j’en passe. C’est un problème mondial et il faut que nous ayons toute la lucidité pour y faire face et éviter des querelles internes qui pourront nous nuire.
BBO