Dans la déclaration ci-dessous, la section du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) du Kouritenga, sous la signature de son président, Saïdou Kaboré, s’érige contre une association de lutte contre l’insécurité appelée « Kogleweogo », dont les pratiques sont d’un autre âge. Une organisation aux méthodes somme toute condamnables qui interpellent l’opinion et l’autorité.
Depuis un certain temps, on entend parler d’association de lutte contre l’insécurité avec des ramifications dans certaines localités et dénommée ‘’Kogleweogo’’. Ladite association comporterait des membres appelés ‘’juges’’. Elle aurait un pouvoir d’interpellation (arrestation), de détention, de verbalisation (amende) et de correction (sévices corporels, privation alimentaire).
A Koupéla, chef-lieu de la province du Kourittenga, nous avons été mis devant un cas assez édifiant.
En effet, un habitant du village de Yinga, du nom de Zoungrana Paul, a été accusé de vol de 02 bœufs par un nommé Damiba Mathieu, demeurant à Nakalbo (village voisin de Yinga), propriétaire des bœufs. Suite à sa plainte auprès de structure compétente, Zoungrana Paul va être détenu dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Koupéla pendant 06 jours avant d’être libéré.
Mécontent de cette mise en liberté, Damiba Mathieu va s’attacher les services d’une association ‘’Kogleweogo’’ sise dans une localité de la province du Ganzourgou ; province voisine du Kourittenga. Une expédition de cette association, forte de 06 membres armés, a procédé à l’enlèvement de Zoungrana Paul à son domicile à Yinga le samedi 05 décembre 2015.
Selon l’intéressé que nous avons rencontré le 30 décembre 2015, il a été ligoté et suspendu à un arbre dans la brousse. Il a ensuite été déplacé sur un second site. Il a séjourné 03 jours sur le premier site et 04 jours sur le second. Sur le deuxième site il a été ligoté contre un arbre et fouetté avec des fouets flambés dans un feu allumé à côté de lui. Il a ensuite été détaché et jeté sur le feu. En témoignent les images du dos. Il a eu la vie sauve, dit-il, grâce à la clémence du chef d’équipe qui aurait demandé à ses éléments de le libérer, car il n’est pas coupable. C’est ainsi qu’il a été déposé par celui-ci le samedi 12 décembre 2015 chez le chef de Yinga à qui il aurait signifié l’innocence de Zoungrana Paul maltraité par ses éléments. Vu son état, il s’est rendu au CMA de Koupéla le dimanche 13 décembre 2015 pour ses soins et a aussi posé plainte à la Brigade territoriale de gendarmerie de Koupéla. Damiba Mathieu a donc été arrêté et déféré à Tenkodogo. (Nous n’avons pas pu le rencontrer).
Convoqués par la Brigade territoriale de gendarmerie de Koupéla, les membres de ‘’Kogleweogo’’ n’ont pas daigné répondre.
Mais de sources sécuritaires, les membres de ‘’Kogleweogo’’ s’organiseraient pour venir en nombre impressionnant, voire 200 environ, et armés pour exiger la libération du nommé Damiba Mathieu.
Il convient de signaler que sur le deuxième site de détention, 03 tombes auraient été montrées à Zoungrana Paul et que s’il n’avoue pas, il va finir comme ces derniers.
Ces différents éléments révèlent l’existence dans notre pays d’une organisation armée non républicaine, sans limite territoriale avec un pouvoir d’arrestation, de verbalisation, et de torture voire d’exécution sommaire.
Le dos de Zoungrana Paul nous rappelle avec frayeur le dos du cuisinier de François Compaoré dans l’affaire David Ouédraogo qui a conduit à l’assassinat du journaliste Norbert Zongo. Nous avons également toujours en mémoire les attaques non encore élucidées des brigades de gendarmerie de Ourci et de Samorogan avec des pertes en vie humaine de nos gendarmes.
Le haut-commissaire de la province du Kourittenga a déjà entrepris des actions de sensibilisation et il convient de le saluer à sa juste valeur et l’encourager dans ces actions.
En tout état de cause, la section MBDHP du Kourittenga, conformément à sa mission de veille et de défense des droits humains :
dénonce et condamne fermement ces actes de barbaries sous le prétexte de lutte contre l’insécurité ;
interpelle les autorités au plus haut niveau sur leur obligation de garantir la sécurité à tous les habitants du Burkina Faso ;
exige d’elles que toute la lumière soit faite sur ces tombes anonymes.
Les différents maillons de l’Etat sur le plan volonté politique, judiciaire et sécuritaire ont le devoir de s’assumer pleinement et de faire la lumière sur ces groupes armés : leur organisation, leur parrain, leur dotation en moyens d’intervention et leurs agissements sur le terrain, car se joue là toutes leurs crédibilités.
Le MBDHP, section du Kourittenga, appelle enfin les populations à se démarquer de telles organisations dont on ne connaît pas véritablement les tenants et les aboutissants.
Pour la section MBDHP du Kourittenga
Le président Saïdou Kaboré