La campagne pour l’élection présidentielle du 21 février 2016 au Niger n’a pas encore débuté, qu’un des 15 prétendants au trône, en l’occurrence, Hama Hamadou, ravit déjà la vedette aux autres. Alors que le principal opposant à l’actuel président, Mahamadou Issoufou, candidat à sa propre succession, croupit en prison pour une affaire de trafic présumé de bébés, sa candidature a été validée par le Conseil constitutionnel. Coup de théâtre, pensent certains. Normal, trouvent les observateurs les plus avisés, pour qui Hama Hamadou n’a pas été déchu de ses droits civils et politiques par les juges. Et ce qui est encore plus atypique, c’est que le candidat Hamadou va devoir vivre la campagne électorale en prison, puisque sa demande de liberté provisoire a été une seconde fois rejetée par la justice en début de semaine. Cette situation renforce la conviction des avocats de l’accusé, que l’affaire de trafic présumé de bébés relève plus des manœuvres politiques que du droit commun. Hama Hamadou ne serait pas le seul accusé dans le dossier à ne pas bénéficier de liberté provisoire, que son entourage allait voir les choses autrement. La garde rapprochée de l’ancien président de l’Assemblée nationale du Niger a toujours cru, à tort ou à raison, que leur « héros » était l’homme à abattre par Mamadou Issoufou dans son projet de nouveau bail présidentiel. En ce que Hama Hamadou constitue une sérieuse entrave aux ambitions renouvelées de l’actuel président pour la conduite du pays. Si tel est vraiment le cas, l’homme fort de Niamey a manifestement réussi son coup, vu que son principal challenger est au cachot. Dans ce cas de figure, plus rien ne peut l’empêcher de rempiler au soir du 21 février prochain. Mais la situation dans laquelle se trouve Hama Hamadou lui fait une sacrée publicité, qui pourrait renforcer la sympathie dont il jouit auprès de l’opinion publique nigérienne. La victimisation pourrait bien profiter au candidat-prisonnier, contrairement à ce que d’aucuns croient. Seul le peuple nigérien est souverain et peut confier son destin à qui il veut. Il ne paraît pas évident que Hama Hamadou remporte le scrutin du fond de sa geôle, et de surcroît face à la puissante machine politique du chef de l’Etat, mais sait-on jamais. La campagne par procuration du prisonnier pourrait se révéler payante et lui ouvrir les portes d’un destin exceptionnel. Tout dépendra de la stratégie que les lieutenants de son parti, le Mouvement démocratique nigérien (MODEN), vont mettre en place pour la campagne électorale. S’ils réussissent à transformer le handicap de leur leader en une arme dans la pêche aux voix, cela peut se révéler fructueux. Ne perdons pas de vue que le dernier mot revient aux électeurs. Si ceux-ci estiment que le candidat-prisonnier fait leur affaire, ils lui donneront la majorité dans les urnes. Nous n’en sommes pas encore à ce scénario inédit, mais toujours est-il que le score, que fera Hama Hamadou à ce scrutin présidentiel, permettra de mesurer sa cote de popularité dans le landerneau politique nigérien. Et éventuellement de se faire une idée sur le degré de dangerosité, qu’il est censé représenter pour le président Mamadou Issoufou. En attendant d’en savoir sur la prestation du prisonnier-candidat à la future présidentielle, rendons-nous à l’évidence qu’il a quelque peu troublé le sommeil du président Issoufou. Parce que tout semble indiquer que ses déboires ont commencé à l’approche de l’échéance électorale. Comme s’il y avait une volonté affichée de le « neutraliser » politiquement comme le soutiennent fermement certains. On peut dire, que Hama Hamadou part défavorisé dans la bataille pour le contrôle du pays, mais son ambition de briguer la magistrature suprême n’a pas pu être totalement balayée. Parviendra-t-il à passer de la prison au palais présidentiel ?
Kader Patrick KARANTAO
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