Pas une saison des pluies ne passe au Burkina sans que l’on ne parle de mort d’hommes des suites d’un conflit foncier. Et pourtant, le nombre de conflits fonciers ne fait qu’augmenter. A chaque saison pluvieuse, le problème de terre sème la zizzanie entre habitants d’un même village ou de deux villages, très souvent, liés par le sang. Rien que le 2 juin 2013, un conflit foncier opposant les habitants du village de Yirini situé dans la commune de Tambaga, à l’Est, a causé la mort de quatre personnes. Des pertes en vies humaines que l’on aurait pu éviter si une solution durable avait été trouvée à ces conflits fonciers récurrents. Alors quelles sont les causes de ces conflits ? Quelles solutions pour les éviter malgré la révision de la loi portant réforme agraire et foncière au Burkina Faso ? Le plus souvent, c’est après les affrontements que les autorités administratives se présentent en pompiers pour, soi-disant, calmer la situation. Or, il faut seulement un peu d’attention de la part de l’autorité administrative ou coutumière, pour éviter ses pertes en vies humaines. On a parfois la fâcheuse impression que l’Etat est laxiste sinon attentiste. Ces conflits existaient bien avant, mais ils ont été exacerbés par plusieurs facteurs. Tout d’abord, il y a la pression démographique. La population augmente mais la terre n’augmente pas en termes de superficie. Si fait qu’un certain nombre de personnes peuvent se retrouver à se quereller pour le même lopin de terre qui, avant, n’était cultivé que par deux ou trois personnes. C’est pourquoi on a parfois des frères qui s’entre déchirent pour la terre.
En plus de la pression démographique, il y a la technologie qui permet à une seule personne d’emblaver plusieurs hectares à la fois. Pourvu qu’elle ait les moyens de sa politique. Ce qui nous permet de dire que la terre a de la valeur. Toute chose que les paysans n’ignorent pas. Alors, profitant de la cupidité de certains paysans, des opérateurs économiques s’approprient de vastes portions de terre souvent à l’insu de tous les propriétaires puisqu’au village, la terre n’appartient pas qu’à une seule personne. Ce qui devient source de conflit dans les villages. C’est à croire que les paysans ne connaissent pas les textes sur la réorganisation agraire et foncière. Oui, le texte est méconnu des populations. Mais la vérité est que, malgré les différents toilettages, le texte a toujours des limites. Ce qui fait que son impact dans une situation de conflit foncier est méconnu. Alors, que peut faire la Justice face à de telles situations ? La justice ? On ne sait pas trop le rôle qu’elle joue dans la résolution de ces conflits. Car, très souvent, elle renvoie dos à dos les deux parties prenantes au conflit. Ce qui n’est pas sans conséquences. Pour les paysans, le perdant en Justice est toujours le moins disant. Si fait qu’il existe une crise de confiance entre les paysans et la Justice. Alors, que faire pour résoudre à l’amiable ces conflits fonciers ? C’est là que la collaboration des chefs coutumiers est sollicitée. Malheureusement, le concours de ces sages du village est souvent négligé. En fait, le problème des conflits fonciers est profond et est rattaché à l’environnement moral, politique et administratif. La Réorganisation agraire et foncière (RAF) est une bonne chose. Mais elle se justifierait plus si elle tenait compte de nos réalités socioculturelles. Ce qui pourrait nous permettre d’éviter, à chaque saison pluvieuse, des conflits entre agriculteurs ou entre agriculteurs et éleveurs. Au mieux, si la RAF n’y parvient pas, que les coutumiers s’y mettent. Il y va de la quiétude sociale.