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Le Premier ministre :nous encourageons un audit sur notre gestion...
Publié le lundi 28 decembre 2015  |  Sidwaya
Rencontre
© aOuaga.com par Séni Dabo
Rencontre gouvernement/syndicats : c`est parti pour la 8e édition
Mardi 1er septembre 2015. Ouagadougou. Le Premier ministre Yacouba Isaac Zida a donné le coup d`envoi de la 8e rencontre annuelle gouvernement/syndicats des travailleurs




Avec la presse, le Premier ministre, Yacouba Isaac Zida, a répondu sans langue de bois, à toutes les préoccupations posées des journalistes. Pendant plus 90 minutes, le chef du gouvernement en fin de mission, s’est ouvert à la presse. Nous vous proposons en intégralité ce point de presse.

S : A quelle date allez-vous porter le grade de général de division ?

Y.I.Z : J’ai été promu au grade de général depuis le 26 novembre 2015. Le décret prenant effet à partir de sa date de signature, je considère avoir porté le grade de général de division depuis ce jour. Maintenant, si vous voulez me voir en tenue, attendez que je puisse déposer mes charges de Premier ministre. Parce que je ne veux pas donner l’impression aux Burkinabè qu’ils ont un militaire comme chef de gouvernement. Cela ne donnera pas une très bonne image à notre démocratie en construction.

S : Avez-vous été consulté pour le poste d’ambassadeur du Burkina Faso à Washington ?

Y.I.Z : Oui, j’ai été consulté. Mais, comme vous le savez, l’ambassadeur représente le chef de l’Etat. Et comme nous sommes dans une phase de Transition, je ne pouvais pas abandonner mon poste plus tôt. Quand nous allons terminer la Transition, ça sera avec un autre président du Faso. Alors, avoir été consulté par un chef d’Etat pour représenter un autre chef d’Etat, cela peut paraître un peu bizarre. C’est pourquoi, nous mettons ce sujet de côté. Ce qui nous paraît urgent, c’est l’installation du nouveau pouvoir. Après, on verra. Ma nomination au poste d’ambassadeur n’est pas le plus important au Burkina Faso. Les Burkinabè ont d’autres priorités.

S : Il y a eu des attaques répétées de terroristes au Burkina Faso pendant la Transition. Ne peut-on pas dire que vous avez, quelque part, fait preuve de laxisme ?

Y.I.Z : La situation sécuritaire au Burkina Faso n’est pas plus critique qu’elle ne l’est en France ou ailleurs. Ce n’est pas la peine de s’affoler. Nous pensons aussi que les attaques terroristes dont nous avons été victimes trois fois de suite pendant la Transition, notamment la prise d’otage de Tambao, l’attaque d’Oursy et plus récemment de Samorogouan, ne sont pas propres au Burkina Faso. La menace terroriste est partout, dans la sous-région, et au-delà. La question, c’est de voir comment notre pays développe des initiatives pour faire face à cette menace. Je crois que les spécialiste en la matière, notamment les Forces de défense et de sécurité sont en train de s’organiser, d’occuper le terrain. Je ne peux pas dévoiler toutes les opérations en cours, mais vous pouvez être tranquilles. Ce problème n’est pas au-delà des capacités de nos forces de défense et de sécurité. Il va falloir que le gouvernement les accompagne avec les moyens logistiques nécessaires. En réalité, le grand banditisme fait plus de morts que les attaques terroristes. Chaque semaine, l’on a, au minimum, trois décès. On en parle peu. Il faut aussi arriver à bout de ces attaques dans les quartiers périphériques de Ouagadougou, à l’Est, au Centre-Est, etc. où l’on enregistre les plus grand nombre.

S : Et dans la gestion des mouvements d’humeurs des éléments de l’ex Régiment de sécurité présidentielle (RSP) qui ont abouti au coup d’Etat du 16 septembre 2015 ?

Y.I.Z : Dans le dossier RSP, je puis dire que le gouvernement de la Transition n’a pas du tout été laxiste. En toute chose, il faut de la planification, mûrir chaque question pour éviter d’agir dans la précipitation. Il ne s’agit pas de questions personnelles, mais d’enjeux pour 17 millions de Burkinabè. En la matière, nous avions le devoir de nous assurer que les choses se passent le mieux possible. Comme nous l’avons d’ailleurs appris dans notre fonction de militaire, la plus belle des victoires est celle qu’on obtient sans tirer un coup de feu. Nous savions effectivement que le RSP constituait un danger pour le pays. Mais, il fallait prendre le temps pour arriver à fondre ce régiment dans la république. Cela suppose qu’on arrive à un changement de mentalités au niveau du RSP. Si cela ne portait pas fruit, qu’on arrive à dissoudre le régiment et le remplacer par une autre structure faite d’hommes et femmes burkinabè. Nous avons pris le temps qu’il fallait. D’aucuns ont pu penser que c’était de la faiblesse, une façon de ne pas affronter la question. Mais aujourd’hui, à l’heure du bilan, je pense que nous n’avons pas eu tort d’avoir choisi cette voie qui, finalement, a payé. Nous nous sommes définitivement débarrassés du RSP.

S : Qu’est-ce qui se passe à la Maison d’arrêt et de correction des Armées (MACA) quant à la rumeur d’une tentative d’évasion de détenus?

Y.I.Z : Il n’y a pas eu véritablement une tentative d’évasion à la MACA. Il y a eu des informations selon lesquelles, de jeunes soldats, qui pensaient pouvoir libérer le général Diendéré et remettre en place le RSP. Cela est absurde. Néanmoins, ce genre de questions, dès lors que des armes peuvent crépiter, il faut faire le point de la situation avec de la patience. Donc, nous avons procédé à des interpellations pour leur faire comprendre qu’un tel projet, même avant d’être mis en œuvre, est voué à l’échec. Ils devront répondre devant la justice.

S : Les périodes de Transition sont perçues comme des moments opportuns pour tracer les sillons d’une démocratie véritable. Quel bilan faites-vous des réformes que votre équipe a opérées dans ce sens ?

Y.I.Z : La Transition a dû faire des réformes profondes. Le problème du Burkina Faso était relatif à la gouvernance. Pas seulement du fait des hommes, mais parce que les conditions étaient favorables à une mal gouvernance. La Transition avait, certes, sa feuille de route consignée dans la Charte de la Transition, à savoir organiser des élections pour le retour à un ordre constitutionnel normal. Mais, à côté de cela, nous avons compris que le peuple burkinabè avait besoin d’un changement. C’est pourquoi nous nous sommes engagés dans des réformes institutionnelles profondes. Et au bilan, je peux vous dire ma satisfaction. En une année, la Transition a pu adopter 108 lois. Ce qui n’a jamais été vu en cinq ans de législature. Si je prends le cas de la Fonction publique, nous avons pu procéder, de concert avec les syndicats, à la relecture de la loi 013 qui faisait polémique. Il y avait des agents de l’Etat à double vitesse, des fonctionnaires bassement rémunérés et des contractuels permanents avec des salaires plus importants. Nous avons corrigé cela et ramené les travailleurs du public à un pied d’égalité. Beaucoup d’autres questions ont été revues à travers la relecture de cette loi. Dans un autre secteur, lorsque vous prenez le statut de l’armée, nous nous sommes dits qu’il n’était pas bien que des militaires fassent de la politique. L’article 12 des nouveaux textes stipulent qu’un militaire qui veut s’engager en politique doit démissionner de l’armée. Aujourd’hui, quand on parle du statut des forces armées nationales, personne n’évoque ces questions, pourtant déterminantes pour l’avenir de notre nation.

S : Lors d’une interview sur les ondes d’une radio de la place, vous avez indiqué que des enregistrements qui circulent sur les réseaux sociaux sur de supposés écoutes téléphoniques entre le général Bassolé et le président de l’Assemblée nationale ivoirienne, Guillaume Soro étaient authentiques. N’est-ce pas une intrusion de l’exécutif dans le judiciaire ?

Y.I.Z :C’est authentique parce que nous avons obtenu ces écoutes à partir des moyens techniques et scientifiques. Pourquoi quand Angela Merkel a dit que Obama l’écoute, vous ne dites pas que c’est faux. Ce sont des moyens techniques qui n’ont pas été fabriqués au Burkina Faso. On a acheté ces outils là avec l’argent du contribuable burkinabè, c’est pour que cela serve à sa sécurité.

S : Après avoir déclaré que les enregistrements étaient authentiques, avez-vous eu un entretien avec Guillaume Soro ?

Y.I.Z : Guillaume Soro et moi, nous nous connaissons avant qu’il ne soit président de l’Assemblée nationale. Et même avant d’entrer en politique, il était en exil ici au Burkina Faso. Mais suite aux récents évènements les choses ont changé. Lorsque je suis sorti de prison et que j’ai reçu les principales informations sur le putsch, je l’ai appelé en tant qu’ami pour lui dire qu’il a fait un faux pas. Je l’ai conseillé de condamner le putsch parce qu’il n’y a pas d’issue pour ceux retranchés au camp Naba Koom. Au départ, il était d’accord et il m’a demandé de lui rédiger un texte. Je l’ai fait avec l’aide du ministre de la Communication. Il l’a reçu par mail et il m’a dit qu’il a présenté le texte au président Ouattara qui lui a dit de ne pas condamner le coup d’Etat. C’était faux, puisque j’ai eu la version officielle après. Il espérait toujours que ceux qui étaient retranchés au camp Naba Koom allaient reprendre le dessus.
J’ai de l’estime pour Guillaume Soro. Pour avoir combattu en Côte d’Ivoire un régime xénophobe, ne serait-ce que pour cela, j’avais de la sympathie pour lui. Nos relations ont pris un coup et j’attends de voir s’il y aura un changement dans l’avenir.

S : Est-ce vrai que vous avez été rappelé à l’ordre par le Président Roch Marc Christian Kaboré à propos des appels téléphoniques diffusés sur les réseaux sociaux et qui brouillent les relations entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso ?

Y.I.Z : J’ai aussi appris comme vous que le Président Kaboré m’a remonté les bretelles. Cela ne s’est jamais passé, même s’il est vrai que nous en avons parlé une fois, lorsque je suis allé le féliciter pour son élection à la tête du pays. Lors de nos échanges, il n’a pas été question de remonter mes bretelles. D’ailleurs, ce que j’ai dit ailleurs, je l’ai répété devant lui, car je suis convaincu de ce je dis. Je ne pense pas que son avis soit contraire au mien. De toute façon, avant qu’il n’arrive c’est moi qui traite le dossier et je connais mieux le sujet que lui. Quand il sera investi, nous lui passerons le dossier pour qu’il gère.
En plus, pour moi, les relations entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso sont très importantes et vont au-delà des individus. Comme j’ai l’habitude de le dire, les hommes passent, les nations restent. Depuis que nous sommes arrivés au gouvernement dans le cadre de la Transition, je me suis investi pour que les relations entre les deux pays soient des plus normales possibles. Nous sommes allés en Côte d’Ivoire faire un mini conseil des ministres avec le gouvernement ivoirien. Après, le président Kafando est allé à Abidjan. C’est une main tendue à l’endroit des autorités ivoiriennes qui semblaient ne pas très bien nous gober. Mais le dialogue n’a jamais été interrompu. Le président Alassane Ouattara m’a souvent appelé ou il envoie des émissaires à Ouagadougou. Nos relations auraient pu être pires, mais nous l’avons évité le temps que les nouvelles autorités élues s’installent. D’ailleurs, à Abidjan, j’ai demandé au président Ouattara de ne pas couper le dialogue avec les hommes politiques burkinabè. Je dis cela pour vous faire comprendre qu’il n’y a pas de problèmes entre les deux pays ; ce sont des bisbilles entre des individus. Vous allez me demander quels sont mes rapports avec le président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro ? Je vais répondre avant que vous ne reveniez là-dessus. C’est un ami. A un certain moment, il s’est peut-être trompé en opérant de mauvais choix. Il a été mal inspiré de se ranger du côté des putschistes. Pour quelqu’un qui a investi toute sa jeunesse, plus de dix ans, à combattre la xénophobie, je ne comprends pas qu’il se range aujourd’hui du côté des putschistes contre la démocratie. Il s’est trompé et j’ose croire qu’il reviendra à de meilleurs sentiments.

S : Des voix s’élèvent pour demander un audit de la gestion de la Transition. Qu’en pensez-vous ?

Y.I.Z : Je suis très favorable et je pense que c’est incontournable. Il est inadmissible que le contrôleur supérieur d’Etat passe sans faire l’audit de la Transition parce que, quand nous sommes arrivés nous avons exigé l’audit de tous les départements ministériels. Nous encourageons un audit sur notre gestion pour montrer l’exemple.

S : Quelle justice de façon précise laissez-vous aux Burkinabè au-delà du statut de la magistrature ?

Y.I.Z : Au niveau de la justice, c’est comme je l’ai dit, je ne suis pas rentré dans le fond, mais soyez rassurées, nous avons entrepris des réformes profondes parce que nous avons procédé à l’opérationnalisation de la Haute Cour de justice. Elle n’existait seulement que sur les textes mais personne n’a jamais vu une Haute Cour de justice ici. C’est la Transition qui a opérationnalisé cette Cour pour permettre de juger les anciens dignitaires du régime Compaoré.

S : Aujourd’hui quelle santé financière léguez-vous aux prochains dirigeants ?

Y.I.Z : La Transition a fait beaucoup d’efforts sur le plan économique. A notre arrivée, nous avons trouvé d’abord un déficit de trésorerie d’environ 214 milliards de FCFA. C’est un déficit qui pouvait nous amener à un non payement des salaires. Nous avons travaillé à combler très vite ce déficit, et Dieu merci, les partenaires financier et technique en voyant dès le départ notre bonne volonté à travailler au retour à un ordre constitutionnel normal, les sanctions de la Banque mondiale ont été levées. L’Union européenne qui était prête à prendre des sanctions a dû renoncer ; elle a même doublé son appui budgétaire qui est passé de 35 milliadrs à 70 milliards. En termes de bilan, la Transition a pu finaliser des conventions à hauteur de 300 milliards de FCFA mais à côté de cela, pendant que nous encaissons nous avons aussi négocié d’autres financements dans la perspective des gouvernements à venir. En termes de négociations, nous sommes à une enveloppe de 474 milliards que les futurs dirigeants vont devoir encaisser. La santé financière est meilleure que celle que nous avons trouvée sans parler de la dette intérieure. Quand nous sommes arrivés, l’économie était un peu moribonde parce que l’Etat devait presqu’à tout le monde. De novembre 2014 à novembre 2015 nous avons payé près de 300 milliards de dette intérieure. Cette somme est allée dans les caisses des opérateurs burkinabè. A côté de cela, nous avons élaboré et mis en œuvre le Programme socioéconomique d’urgence de la Transition pour apporter une réponse immédiate à certains besoins urgents. Nous avons économisé 25 milliards sur le train de vie de l’Etat. Ce qui a permis de faire des réalisations sur le plan éducatif, et sanitaire mais aussi de financer les activités des jeunes et des femmes

S : Qu’est-ce-qui explique les dernières nominations d’ambassadeurs, si on considère qu’ils vont représenter un président qui n’a pas encore pris fonction ?

Y.I.Z : Je crois qu’il n’y a véritablement pas de problèmes par ce que ce dont vous parlez en dehors de la ministre déléguée au budget, les autres étaient des ambassadeurs déjà. C’est la Transition qui les a appelés au regard de leurs compétences pour servir la Nation

S : Que ce qu’on peut retenir comme acquis en ce qui concerne la presse ?

Y.I.Z : Je voudrais rassurer que la Transition s’est fixée pour objectif au départ de créer les conditions de libre exercice des activités de la presse. Au regard de la contribution de la presse dans l’éveil des populations, nous ne pouvions pas ne pas faire d’efforts pour l’aider à continuer cette mission. Nous avions à cœur de prendre ce secteur d’activités en charge. Nous pensons avoir atteint notre objectif, en améliorant les conditions d’exercice des journalistes. Mais en retour, il faut que les journalistes travaillent à assainir leur milieu. Il n’est pas normal que des gens, qui pratiquent un métier aussi noble, vendent leurs âmes pour des broutilles. Quand on voit un journaliste mêlé à une affaire de coup d’Etat ou de fraudes aux concours, cela ne fait pas honneur à la profession. Il y a donc un défi à relever, en l’espèce assainir le secteur, et personne ne le fera à la place des journalistes.
Ministre de la Communication, Frédéric Nikièma à la rescousse :
Il y a quatre textes qui ont été adoptés sous la Transition. Il s’agit de la dépénalisation des délits de presse. Au-delà de cette dépénalisation, il y a la nomination des directeurs qui est remplacée maintenant par des appels à candidature pour désigner les responsables des médias d’Etat. Dans ces textes, on prévoit un fonds de développement de la presse et cela est une réalité.
Au niveau de la RTB, nous sommes dans un processus actuel qui permet d’aller vers une société d’Etat. Avec l’appui de nos partenaires, un consultant a été engagé pour voir dans quelle mesure nous pouvons évoluer vers une société d’Etat et je pense que c’est une revendication majeure au niveau des médias d’Etat
Au-delà de cela, vous avez soulevé un point très important, la convention collective. Sur ce point, vous savez le rôle que l’Etat doit jouer en soulageant un certain nombre d’acteurs privés. C’est en cela que les mesures qui ont été prises, que ce soit dans le cadre de la défiscalisation ou à travers le fonds d’appui, visent à apporter une viabilité financière aux entreprises de presse pour leur permettre d’appliquer la convention collective. Toute chose, qui permettra aux journalistes de vivre dans de meilleures conditions. Mais le débat semble se limiter seulement à la dépénalisation des délits de presse, ce qui est réducteur, en témoignent les mesures que j’ai évoquées. Je tiens aussi à rappeler que la subvention a augmenté, passant de 250 à 400 millions de francs CFA. Avec ces avancées, il faut noter que la Transition avait cette volonté de mettre en œuvre un certain nombre de chantiers, qui doivent permettre à la presse d’avoir un cadre législatif efficace et d’avoir des moyens pour accomplir sa mission. La mise en œuvre des réformes doit se poursuivre avec le nouveau gouvernement.

S : Le Conseil des ministres du 25 novembre 2015 a pris la résolution de se pencher sur la situation des agents de la Fonction publique, qui sont allés à la retraite sans pouvoir faire de concours professionnels. Qu’est-ce qui est prévu pour les agents de maitrise de la communication ?

Y.I.Z : Nous avons trouvé ce dossier sur la table, et avons travaillé à résoudre cette question des travailleurs. Et le problème n’est pas seulement au niveau de la communication, mais également dans d’autres ministères. Nous avons alors recommandé que le problème soit examiné de façon globale, et avons pris un texte dans ce sens. Reste maintenant au nouveau gouvernement de s’en saisir.

S : Quelle appréciation faites-vous des prestations des médias privés au Burkina Faso ?

Y.I.Z : La presse privée a fait un travail remarquable, du point de son indépendance. Au moment où la presse publique était encore aux ordres, la presse privée s’est assumée. Le vent de liberté et de démocratie, qui souffle sur le Burkina est à mettre à l’actif de la presse privée. Certains médias, tels que l’Indépendant, se sont affichés et cela a encouragé la création d’autres médias privés.

S : Au sujet de la tentative d’évasion, vous avez parlé d’éléments inexpérimentés. Ceux-ci sont-ils tous de l’ex-RSP et combien sont-ils ?

Y.I.Z : Ce n’est pas une affaire d’ex-RSP, car vous savez qu’ils ont été réaffectés dans les différentes garnisons. Certains se sont bien intégrés et se sont même vus confier des responsabilités. Mais n’empêche qu’il y ait toujours des brebis galeuses. Et c’est à la justice de statuer sur le sort des intéressés.

S : Que deviendra Yacouba Isaac Zida après la Transition ?

Y.I.Z : Je suis un soldat, qui est à la disposition des autorités. Là où on m’enverra, soyez sûrs que j’accomplirai bien ma mission.

S : Est-ce que votre promotion au grade de général ne pose pas problème au sein de l’armée, vu que l’Etat-major n’était pas favorable à la disposition de la réforme du statut de l’armée permettant la promotion d’un lieutenant-colonel au grade de général ?

Y.I.Z : Sur la question du grade, je ne sais pas ce qui pose véritablement problème. A l’adoption de la charte de la Transition, j’ai apposé ma signature au nom de l’armée burkinabè, car elle avait décidé que je devais assurer les fonctions de chef de l’Etat. Je sais que certains journalistes étaient là, quand le général Zagré a lu la déclaration de l’armée. Je ne sais pas ce qui avait guidé cette décision, mais je la pensais sage. Quand on a passé le témoin au président Kafando, certains m’ont proposé de prendre le grade de général et de me mettre à l’écart.
A l’époque, j’aurais pu accepter, mais le président Kafando voulait que je l’accompagne. Est-ce qu’il fallait que je refuse ? Je faisais partie de ceux qui sont allés le chercher dans sa ferme de Dayoubsi. Refuser de l’accompagner allait être irresponsable de ma part. Nous avons entendu des gens dire « oui, on voulait un président civil et Zida ne veut pas donner le pouvoir ». Mais je vais vous dire aujourd’hui que j’ai appelé le président Kafando le 1er novembre, dès que l’armée m’a donné le pouvoir le matin. Je l’ai appelé entre minuit et une heure du matin. Et je lui ai dit ceci : « Bonsoir grand frère, j’espère que je ne vous dérange pas ». Il m’a dit : « Non pas du tout ». Je savais que je ne dérangeais pas, car un homme comme lui ne peut pas dormir pendant que son pays brûle. Il a commencé par m’encourager Il m’a ensuite avoué qu’il suit les informations et m’a souhaité beaucoup de courage. Je l’ai remercié puis je lui ai dit, « nous allons avoir besoin de vous ». Ce rappel vise à vous faire comprendre certaines choses. Quand il a accepté de prendre la charge du pays, il m’a demandé de l’accompagner en acceptant d’être Premier ministre. Je ne pouvais pas refuser.
Alors, après avoir assumé les fonctions de Président du Faso, Premier ministre, ministre de la Défense, cela ne me gênerait pas de retourner dans l’armée Lieutenant-Colonel. Mais je pense que cette situation allait gêner l’armée. Il s’agit d’une simple question de bon sens. Je vous laisse poursuivre la réflexion sur cette question.

S : Votre grade pose-t-il réellement un problème dans l’armée ?

Y.I.Z : Pour ce qui concerne le grade de général, je ne sais pas pourquoi cela va poser un problème à l’armée

S : On a souvent entendu dire que le Premier finance des Organisations de la société civile, surtout au temps fort de votre guéguerre avec vos frères d’armes de l’ex-RSP. Qu’en est-il réellement ?

Y.I.Z : On m’accuse de financer les OSC. Je ne sais pas comment je pourrais le faire. Avant les 30 et 31 octobre, qui les finançait ? Je les ai connues au sein de l’Etat-major général des armées, lorsqu’elles sont entrées demander à l’armée de prendre ses responsabilités. J’étais ce jour-là dans la salle de réunion. Ibriga, je le connaissais parce qu’il m’a enseigné. J’ai vu dans la salle Hervé Kam, Smokey, Sam’s K le Jah. Il n’existait auparavant aucune relation entre nous.
Qui les a financés pour qu’ils viennent à l’Etat-major dire à l’armée de prendre ses responsabilités ? Je pense que ces OSC se sont constituées parce qu’elles sentaient le besoin de s’organiser pour défendre leur pays. Aujourd’hui, quand on dit que nous leur avons donné de l’argent, cela ne fait pas sérieux. Le Burkina Faso a mis la barre très haut ; il faut aussi élever le niveau du débat.

S : Ne craignez-vous pas d’être rattrapé à l’avenir par certains dossiers, dont celui relatif à Romuald Tuina.

YIZ : Non ! Je suis tranquille. Si à l’avenir, pour un quelconque dossier de justice lié au crime de sang ou économique, je suis interpellé, ce sera avec plaisir que je vais répondre. Je crois que le dossier Tuina a été jugé. C’était une tentative de coup d’Etat et des militaires de l’ex-RSP ont été jugés. Ce dossier doit être clos, à moins qu’il n’y ait une autre affaire Tuina.

S : Selon nos informations, vous vous êtes opposé au départ à l’exil de Fatou Diendéré au Togo. Est-ce réel ?

Y.I.Z : Je me suis opposé à l’exil de Madame Fatou Diendéré. Pour moi, tous ceux qui ont soutenu le coup d’Etat devraient répondre devant la justice. Il n’y a pas de raison qu’on facilite la sortie d’une personne ayant soutenu le putsch. Nous avons eu l’information et nous sommes entrés en contact avec les autorités du Togo pour leur dire que nous ne sommes pas d’accord. Nous avons besoin de Fatou ici pour la mettre à la disposition de la justice. C’est tout à fait normal pour que le peuple sache ce qui s’est passé. Il ne suffit pas de poser des actes qui ont coûté la vie à des Burkinabè et aller se cacher dans un pays voisin au risque de compromettre les rapports entre les deux Etats.

S : Votre gouvernement a-t-il aidé la justice militaire à transmettre certains mandats d’arrêt en particulier celui contre l’ancien président Blaise Compaoré ?

Y.I.Z : Sur la question de la justice, lorsque le mandat d’arrêt est émis, il revient au gouvernement par voie diplomatique de transférer au pays concerné. C’est vrai que pour ce cas-là, nous savons où se trouve Blaise Compaoré. Le gouvernement, à travers le ministère en charge des Affaires étrangères, a transmis le mandat d’arrêt à l’ambassade de la Côte d’Ivoire. Si l’on ne savait pas où il était il y avait une autre voie. Traditionnellement les mandats d’arrêt sont mis à la disposition d’interpole. Je pense que de ce point de vue, le gouvernement a fait ce qu’il devrait faire.

S : N’avez-vous pas pris des mesures populistes pour redorer le blason de la Transition ?

Y.I.Z : Concernant les mesures que nous avons annoncées, c’était de bonne volonté, mais dans l’application effectivement c’est difficile. Par exemple quand nous arrivions, le parking municipal était pratiquement la propriété de quelqu’un. Au moins, nous avons réussi à le mettre à la disposition de l’Etat. Il faut prioriser les besoins. Si nous nous mettons à investir 10 milliards pour construire un parking municipal dans ce contexte de Transition, je pense que ce n’est pas la priorité. Sinon il y a déjà le plan. L’Etat va voir avec les partenaires privés pour la réalisation. En ce qui concerne la journée continue, est-ce qu’il y a un pays à côté qui ne l’applique pas ? Nous avons pris cette mesure pour alléger les souffrances de travail.

S : Qu’est-ce que la Transition a fait pour les musulmans pour parfaire l’organisation du Hadj?

Y.I.Z : L’organisation du Hadj a été de mon avis correctement traité par la Transition. Il y a longtemps l’organisation du Hadj revenait à l’Etat. Nous avons fait cette expérience mais à un moment où nous nous sommes dit que c’était une mauvaise expérience et qu’il fallait privatiser l’activité. Cette année la part contributive de l’Etat a été d’offrir plus de 1000 visas supplémentaires.

S : Quelles sont les insuffisances de la Transition ?

Y.I.Z : De façon sincère, la Transition a eu des insuffisances. Nous ne pouvions pas résoudre toutes les questions du Burkina Faso. Tout ce que nous avons fait, c’est d’avoir un climat apaisé pour les élections. C’était notre mission première. La Transition s’est investie dans bien de secteurs telles la justice, la santé, l’éducation, l’économie. Je conviens avec vous qu’on n’a pas pu tout faire. Je regrette du fait que la question de l’emploi n’a pas pu avoir suffisamment de réponse. Nous avons pu financer 3600 micros entreprises ou initiatives pour permettre l’auto-emploi. Mais cela n’est pas suffisant, au regard de la taille des besoins.

S : Qu’est-ce qui reste de l’insurrection des 30 et 31 octobre ?

Y.I.Z : Nous, nous croyions que l’on allait passer à la 5ème République. Vu le délai qui était imparti à la Transition, l’on ne pouvait pas se lancer dans cette aventure, au risque de ne pas prendre les avis de tous les acteurs nationaux en compte. Le souci c’est de bien faire. Pour passer à une 5ème République, il faut que l’on s’assure que la nouvelle Constitution réponde aux attentes du peuple burkinabè. Si en ce moment on estime que l’on peut consigner dans la nouvelle Constitution que l’insurrection des 30 et 31 octobre est une forme de changement constitutionnel du régime, c’est aux Burkinabè de prendre acte de cela. L’on peut avoir également un format dans cette Constitution fixant le nombre des membres du gouvernement à 25 pourquoi.

S : Si vous devrez être noté sur 10 quelle note donnerez-vous à la Transition ?

Y.I.Z : Depuis quand vous avez vu un élève se noter lui-même ? C’est vous qui devriez noter la Transition.

Propos retranscrits par La Rédaction
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Sidwaya N° 7229 du 8/8/2012

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