Le 24 mai dernier, il a été officiellement lancé la campagne agricole 2013-2014 au Burkina. Au regard de l’importance de l’activité agricole dans le pays (80% de la population pratique l’agriculture), c’est tout naturellement que la question préoccupent les premières autorités nationales. C’est ainsi donc que chaque année, avec fort tapage médiatique, le gouvernement décide officiellement d’ouvrir la route à nos laborieuses populations pour les pénibles travaux champêtres. Une décision pourtant qu’attendent peu ou prou les paysans qui, à la première goutte de pluie, prennent la route des champs. Rythmés par le cycle infernal de la nature, les paysans n’attendent que la magnanimité du ciel pour s’accrocher à leurs dabas et pioches, jalousement gardées dans un coin du grenier. Et c’est cela la réalité de nos producteurs agricoles qui ignorent même l’existence de cette solennité gouvernementale au cours de laquelle les mesures d’accompagnement à eux offertes sont présentées, sans que la majorité d’entre eux n’ait connaissance de ces mesures. Tout de même, on ne peut pas faire le bonheur de quelqu’un tout en le tenant à l’écart. Ceci dit donc, quelle chance de réussite pour notre agriculture strictement dépendante des aléas climatiques ? Pour sûr, le gouvernement a déjà fait ses estimations pour la compagne 2013-2014: plus de 5 millions de tonnes de céréales attendues. Et pour y parvenir, une batterie de mesures allant de l’accompagnement financier à celui matériel a été prise par les autorités. Au regard de ces mesures prises, d’ailleurs depuis des lustres, dont les résultats tardent à être probants, nous sommes enclin d’affirmer que « mieux vaut une chèvre qui met bas qu’une vache stérile ». Ce proverbe africain illustre parfaitement l’état de gestion de notre système agricole ponctué de déclarations stériles que d’actes concrets.
Par ailleurs, il ne s’agit pas seulement de prévoir le tonnage de céréales à produire, mais aussi indiquer le pourcentage de la population à nourrir. Le pouvoir multiplicateur de la population exige l’augmentation plus grande des subsistances, selon le vœu de Robert Malthus pour qui, cette composante est inéluctablement à prendre en compte, d’autant plus que la population s’accroît en progression géométrique alors que les subsistances ne s’accroissent qu’en progression arithmétique.
Fort de cet indicateur irréfutable dans la production, notre politique agricole doit absolument s’orienter vers une modernisation pointue pour espérer une autosuffisance alimentaire. L’agriculture de subsistance ou extensive, jadis fortement pratiquée sous nos cieux, doit être définitivement abolie pour céder la place à l’agriculture intensive, qui, au regard des changements climatiques, reste malheureusement la seule alternative pour une production excédentaire. Le passage à cette agriculture nécessite naturellement des moyens culturaux modernes. Lesquels moyens nous donneront une mécanisation de l’agriculture. L’histoire de l’agriculture des pays agricoles comme l’Inde, le Brésil, qui fait de nos jours des émules, a été certes un long processus d’intensification, mais il faut tout de même reconnaître que cette performance a été soutenue par une politique agricole conséquente. Puisque ces Etats s’efforçaient d’améliorer la productivité agricole de manière à satisfaire des besoins toujours croissants en aliments. L’amélioration de cette productivité a été possible grâce aux moyens modernes de productivité. Comparaison n’étant pas raison, le Burkina, avec ses plaines propices à une agriculture intensive doit inéluctablement recourir à la biochimie et l’ingénierie modernes que de s’appuyer toujours sur l’agriculture traditionnelle.
Au lieu donc de se chatouiller et rire lors des cérémonies de lancement de la campagne agricole, le gouvernement doit se doter d’une politique agricole orientée vers une agriculture mécanisée, voire standardisée. Ce n’est pas en donnant deux ou trois charrues à un groupement de paysans qu’on peut espérer développer l’agriculture dans un pays, surtout que ce dernier à une agriculture déjà tributaire des graves changements climatiques. Pour ce faire, les agriculteurs, avec l’appui honnête de l’Etat, doivent se doter des méthodes permettant d’économiser la main-d’œuvre. L’utilisation des produits chimiques pour nourrir et protéger les cultures, le recours à des machines et à des équipements agricoles lourds, le travail intensif du sol, l’emploi des variétés végétales à haut rendement, l’irrigation. Ce sont là, entre autres, les facteurs qui, s’ils ont été réellement pris en compte, permettront de réaliser une productivité impressionnante. Et on n’aura pas besoin de décréter le tonnage de céréales à atteindre .