Les tractations pour une sortie de crise en Libye ont abouti à un texte consensuel qui devait être signé hier par les Parlements de Tobrouk et de Tripoli. Mais pour des « raisons essentiellement logistiques », pour reprendre la version diplomatique d’un porte-parole de l’ONU, marraine des négociations, la signature du texte a été différée d’un jour. C’est donc aujourd’hui, 17 décembre, en principe, que l’accord devrait être signé au Maroc par les deux parties sous l’égide des Nations unies. Voilà une belle initiative qu’il convient de parachever pour la renaissance d’une Libye en proie au chaos et à la chienlit depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011. Dans tous les cas, il faut dire que les Libyens n’ont pas d’autre choix que de taire leurs divergences pour s’entendre sur l’essentiel. En effet, et selon des sources onusiennes, l’Etat islamique compte 2000 à 3000 combattants en terre libyenne, dont 1500 à Syrte, la ville natale de l’ex-Guide. Et pendant que Tripoli et Tobrouk se disputent la légitimité, le parfum nauséeux de l’Etat islamique embaume progressivement le pays, avec pour finalité immédiate l’occupation des puits pétroliers libyens. Les Irakiens et les Syriens peuvent enseigner la leçon à leurs frères libyens ; eux qui subissent au quotidien la furie de Daech. Pourtant, si l’EI réussit à faire main basse sur la Libye, il ne lui restera qu’à étendre ses tentacules dans l’espace sahélien en faisant la jonction avec Boko Haram et les djihadistes du Nord-Mali. Avec de tels risques, l’heure n’est plus aux querelles de chiffonniers. Les Libyens doivent donc en être définitivement conscients.
Un accord entre Tripoli et Tobrouk pourrait acter le début de la renaissance libyenne
C’est pourquoi leurs retrouvailles s’avèrent nécessaires pour mettre un terme à la chienlit et tracer les sillons d’un pays définitivement stable, démocratique et prospère. Dans cette situation « horrifiante » et quelque peu apocalyptique, la communauté internationale se doit d’accompagner les Libyens. John Kerry, le secrétaire d’Etat américain, l’a confessé quelque part : « C’est dangereux pour la viabilité de la Libye, c’est dangereux pour les Libyens et maintenant que Daech renforce sa présence, c’est dangereux pour tout le monde ». En tout état de cause, il faut mettre fin au statu quo. Et cela passe d’abord par un accord de paix entre frères libyens. Vivement qu’il soit signé aujourd’hui au Maroc. Cet accord permettra ainsi d’atteindre le bout du tunnel de sortie de cette longue nuit de souffrance que vit le peuple libyen. La solution ne peut venir que des Libyens eux-mêmes. Un accord entre Tripoli et Tobrouk pourrait en effet acter le début de la renaissance libyenne. Cela dit, le tout n’est pas de signer un accord de paix dans des salons feutrés. Il faut le respecter. Déjà, en octobre dernier, les deux parlements avaient rejeté un accord pourtant signé par leurs représentants respectifs. En outre (et c’est le signe que les démons renâclent à quitter la Libye), l’ONU a, elle aussi, rejeté l’accord signé entre Tobrouk et Tripoli en Tunisie. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ? On attend de voir.
Michel NANA