Voici le message -le dernier de son mandat en principe- adressé par Michel Kafando à la Nation à l’occasion du 55e anniversaire de l’accession à l’indépendance du Burkina Faso, célébré ce 11 décembre 2015.
« Mes chers compatriotes
Chers amis des communautés étrangères,
Je m’adresse à vous, ce soir, en ce 55ème anniversaire de notre fête nationale, dans une solennité toute particulière. Vous en savez la raison.
Voilà treize (13) mois, vous m’avez confié la direction de notre pays. Avec toute l’équipe de la Transition, nous pensons avoir servi avec dévouement et loyauté.
Au milieu de toutes sortes de difficultés, nous avons conduit le destin du Burkina Faso et bien peu alors donnaient une chance à la Transition. J’entends encore les quolibets : « ils n’ont pas dit qu’ils peuvent, ils n’iront pas loin ».
C’est dire que ceux qui ont accepté le sacrifice de vivre cette aventure, ont droit au respect de la Nation. Voilà pourquoi, en cette heureuse occasion, il me plaît de remercier, du fond du cœur, Monsieur le Premier Ministre Isaac ZIDA et les membres du gouvernement, Monsieur le Président du Conseil National de la Transition, Moumina Chérif SY ainsi que les membres du CNT, le président et les membres de la Commission de Réconciliation Nationale et des Réformes, de m’avoir courageusement accompagné dans cette épopée.
L’on peut donc affirmer que malgré les épreuves que nous avons traversées, beaucoup plus du fait des hommes que des accidents de l’histoire, la mission est accomplie et que nous récoltons dans la joie ce que nous avons semé dans les larmes.
En effet, l’objectif premier de la Transition, qui était d’organiser des élections transparentes et crédibles est largement atteint et, j’oserai même dire, au-delà de nos espérances puisqu’elles se sont déroulées dans la paix et la sécurité et qu’en lieu et place des contestations, c’est à la fraternisation des concurrents que nous avons assisté.
Je félicite et remercie le Président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), Maître Barthélemy KERE et tous ses collaborateurs pour la parfaite maitrise dans l’organisation des scrutins.
Je redis toute ma gratitude aux pays amis, aux partenaires techniques et financiers, aux autorités coutumières et religieuses, aux OSC, aux syndicats, aux medias, à tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont contribué au succès de ce formidable challenge, fierté pour le Burkina et désormais référence pour l’extérieur.
Mes chers compatriotes,
Ce soir, c’est aussi l’ultime occasion pour moi d’esquisser grosso modo, un bref bilan de la Transition.
S’agissant tout d’abord des préoccupations institutionnelles, l’adoption du pacte national, à l’issue des États généraux de la justice ainsi que la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, ont fondamentalement contribué à une rationalisation du système judiciaire, consacrant davantage l’indépendance du magistrat et les droits du justiciable.
L’institution d’une Commission de réconciliation nationale et des réformes, appelée à devenir le Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale ainsi que de l’Observatoire national de prévention et de gestion des conflits communautaires, aidera, sans nul doute, à faire avancer les efforts de restauration et de renforcement de la cohésion et de l’unité nationale.
La Transition a fait des questions sécuritaires son cheval de bataille, conscient des dangers existant, tant à l’intérieur qu’à nos frontières, d’où la création du Conseil de Défense et de Sécurité Nationale (CDSN) et de l’Agence Nationale du Renseignement (ANR).
Cette armature, jointe au sérieux de notre police nationale, a permis le bon déroulement des élections dans la paix et de faire baisser le grand banditisme et la criminalité.
S’agissant de la défense nationale, à la faveur du démantèlement du RSP, nous venons de mettre en place une commission chargée de se pencher sur la réforme de l’Armée.
Au plan économique, du fait des difficultés dont nous avons hérité, et de la prégnance de la corruption, la gouvernance n’a pas totalement répondu à nos attentes.
Néanmoins, sur l’ensemble des 13 régions du Burkina et à partir des économies réalisées sur le train de vie de l’État, nous avons pu lancer un ambitieux programme, le PSUT, Programme socio-économique d’urgence de la Transition, lequel a permis de soutenir des projets initiés par des jeunes et des femmes et de renforcer les infrastructures éducatives et sanitaires.
Certains secteurs, tel l’Énergie et l’Électricité, je le reconnais, ont été défaillants mais des mesures ont été prises pour y remédier à long terme.
Au plan commercial, le gouvernement a travaillé à renforcer le contrôle de la qualité des produits de grande consommation et procédé à une baisse significative du prix des hydrocarbures.
En ce qui concerne le secteur minier, le gouvernement a favorisé, par des mesures incitatives, l’expansion de ce secteur stratégique, tout en gardant une vigilance et un contrôle sur nos ressources nationales qu’encadre le nouveau code minier
L’agriculture et l’eau restant le poumon de notre développement, le gouvernement a mis un accent tout particulier dans la valorisation et l’intensification de la production agricole, notamment le coton dont nous restons le premier producteur dans la sous-région.
Quant au secteur social, en d’autres termes la santé, l’éducation, la promotion de la femme, la solidarité nationale etc… le gouvernement y a également consacré beaucoup d’efforts et de moyens financiers.
Notre diplomatie n’est pas restée en rade. Bien au contraire. En témoignent l’ouverture de 3 nouvelles ambassades et de 4 consulats, et notre participation aux différentes rencontres internationales, toutes choses qui nous ont valu le soutien de la communauté internationale surtout au moment de la grande épreuve.
Mes chers compatriotes,
Conclure que la Transition a donné pleine satisfaction serait de ma part prétentieux et illusoire.
Mais ne pas reconnaître que la Transition, pour le régime provisoire de 13 mois qu’elle fût, n’a pas œuvré plus que de raison, serait un déni de la réalité, n’en déplaise à ses détracteurs.
Pour l’amour de la patrie et avec l’aide de la providence, au grand dam des forces du mal et des messes noires célébrées dans les officines, pour faire échouer le Transition, elle a relevé le défi.
C’est par elle et à la suite de l’insurrection que s’est forgée et développée une nouvelle conscience nationale.
C’est par elle qu’est né un nouveau nationalisme burkinabè, puisant sa source dans la résistance farouche des jeunes, face au coup d’Etat.
C’est enfin par la Transition, à la suite des dernières élections exemplaires, qu’est née la vraie démocratie, gage d’un Burkina nouveau fort et éternel.
Mes chers Compatriotes,
Dans quelques jours, la Transition vous fera ses adieux, dans la satisfaction du devoir accompli et en souhaitant plein succès aux nouvelles autorités.
En attendant, j’ai encore l’occasion de vous souhaiter à tous une bonne fête nationale.
Bonne fête donc
Vive le Burkina Faso
Et toujours sous la protection de la divine Providence ».