L’association "Ensemble sécurisons le futur", en collaboration avec l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA), à travers le Forum ouvert sur la biotechnologie agricole (OFAB/Burkina), a organisé, du 30 novembre au 3 décembre 2015, une caravane des acteurs de la société civile dans la zone cotonnière de la Boucle du Mouhoun et des Hauts- Bassins.
Une vingtaine de caravaniers composés d’acteurs de la société civile, de techniciens de l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA) et de journalistes, ont pris, du lundi 30 novembre au jeudi 3 décembre 2015, le chemin de la zone cotonnière de la Boucle du Mouhoun et des Hauts-Bassins. L’objectif est d’aller à la rencontre des producteurs du coton génétiquement modifié (CGM), échanger avec eux sur la réalité de cette variété de Coton "Made in Burkina", qui suscite tant de polémiques. L’initiative est de l’association "Ensemble sécurisons le futur", partenaire de l’INERA, à travers le Forum ouvert sur la biotechnologie agricole (OFAB/Burkina). Choisi à tout hasard sur la route, c’est le champ de Soumaïla Dao, village de Sokoura situé à une quinzaine de kilomètres de Dédougou, qui a accueilli la première visite de la caravane. Avec ses 2 hectares, il a affirmé cultiver le coton génétique depuis 2008 et n’a pas hésité à chanter les mérites de cet "or blanc" contenant la technologie BT. "Le CGM est facile à produire et il est rentable", a-t-il dit. Par facilité de production, il faut entendre, selon ses explications, la réduction de la pénibilité du travail. En lieu et place des six traitements d’insecticide par saison cotonnière pour le coton conventionnel, le coton génétiquement modifié, lui, en exige deux fois du producteur de Sokoura. Ce qu’a confirmé le généticien en amélioration des plantes de l’INERA, Dr Edgar Valentin Traoré pour qui le "CGM contient en lui-même son insecticide". A Ouarkoye, toujours dans la Boucle du Mouhoun, en direction de Bobo-Dioulasso, Faroukou Zongo, semencier du CGM pour le compte de la Société des fibres textiles (SOFITEX), a reçu les caravaniers dans ses sept hectares de coton. Lui, il a surtout souligné la rentabilité du coton BT. et a affirmé avoir récolté durant ces 4 années de production du CGM, 2 à 3 tonnes par hectare par an, contrairement au coton conventionnel qui lui offrait 1 à 2 tonnes à l’hectare. Faroukou Zongo est l’un des cotonculteurs sélectionnés par la nationale des fibres textiles pour lui reproduire des "semences certifiées", afin de les mettre à la disposition d’autres producteurs. Mavé Tamini est aussi producteur semencier à Ouarkoye. "Avec le coton conventionnel, il faut un suivi rigoureux du champ pour ne pas être surpris par les ravageurs, ce qui n’est pas le cas avec le coton génétique qui ne se traite que 2 fois, lorsque les capsules sont en maturité", a-t-il expliqué pour justifier son choix pour le CGM. Avec ses 7 hectares de coton conventionnel et ses 15 hectares de CGM, M. Tamini a exprimé quelques craintes, car "le CGM se comporte mal sur le marché mondial, parce que la qualité de la fibre ne répond pas aux exigences". Mais le généticien en amélioration des plantes, Dr Traoré, s’est voulu rassurant: " Les chercheurs sont à pied d’œuvre. Nous travaillons au niveau de l’INERA pour stabiliser tous les aspects génétiques". Avant d’ajouter que le problème fibre ne concerne pas "tellement" le producteur, mais plutôt les grandes sociétés qui, au niveau commercial, ont des produits moins qualitatifs. Après cette étape, cap est mis sur le village de Dandé, à plus de 60 kilomètres de Bobo-Dioulasso, dans les Hauts-Bassins. Mahamadou Soro est membre d’un Groupement des producteurs de coton (GPC) qui a, à l’issue d’un vote, décidé de cultiver le coton conventionnel après une période d’essai du coton génétiquement modifié.
La société civile, acquise à la cause du coton génétique
Et pour cause, la plupart des membres du GPC trouve le CGM contraignant, il n’arrive pas à respecter le calendrier cultural, ni à bien utiliser les intrants agricoles. Mahamadou Soro a affirmé son regret d’avoir quitté le CGM "contre sa volonté". " Si j’avais le choix et les moyens, je produirais ce qui est rentable, c’est-à-dire le CGM", a-t-il laissé entendre, l’air triste. Ce qui a fait dire à Dr Traoré : " ce sont les autres qui ont peur du CGM, pas les producteurs". D’où la nécessité de le promouvoir, avec les biotechnologies dans leur ensemble, recommandation de Régis Antoine Balmongo, participant.
Après les champs, les caravaniers prennent la direction des laboratoires. D’abord, au programme coton de l’INERA et le laboratoire contrôle qualité et certification des semences de la SOFITEX de la capitale économique burkinabè. Le programme coton assure notamment la création variétale du coton, améliore la fertilité des sols pour une production durable et protège le cotonnier contre les ravageurs, avis du chef de service, Dr Bazoumana Coulibaly. Aux dires de l’ingénieur de recherche, Denis Sanfo, le problème du coton génétique est plus lié aux rumeurs. Au laboratoire contrôle qualité et certification des semences de la SOFITEX qui se trouve être le "point névralgique" des semences, le chef du laboratoire, Dr Esther Kargougou, a passé au peigne fin le processus de tri des semences basé sur la qualité de la graine, la physiologie et les performances de la campagne cotonnière. Les participants ont loué l’initiative, l’opportunité d’apprentissage et de découverte pour les uns, l’échange d’expériences et renforcement de capacités pour les autres. Tous ont reconnu que " le coton génétique est apprécié des producteurs". Pour Wahabou Sana de l’association SEMUS de Yako en passant par la participante de l’association Soug Toon Nooma pour le développement des initiatives en milieu rural de Kombissiri, Aïchata Ouédraogo, via le directeur de publication de journal Infos Science Culture, Cyr Payim Ouédraogo, " les rumeurs sont dissipées". Objectif atteint pour les organisateurs de la caravane : taire les rumeurs sur la qualité du Coton génétiquement modifié (CGM), en permettant des échanges directs entre organisations de la société civile et les producteurs eux-mêmes. " Nous sommes satisfaits d’avoir réussi à lever un certain équivoque par rapport à tout ce qui se dit et de savoir que les producteurs plaident pour le maintien du coton génétique", a laissé entendre le coordonnateur de l’association "Ensemble sécurisons le futur", Mahama Ilboudo.
Djakaridia SIRIBIE