Abidjan - L’ex-ministre des Affaires étrangères burkinabè Djibrill Bassolé et le président de l’Assemblée nationale ivoirienne Guillaume Soro ont assuré à l’AFP via leurs porte-parole qu’ils n’étaient pas impliqués dans un enregistrement téléphonique controversé concernant le putsch manqué de septembre au Burkina.
Cet "enregistrement" n’a pas été authentifié mais fait le buzz sur internet et a été largement repris dans les médias à la fois au Burkina et en Côte d’Ivoire en raison de propos compromettants qui y sont tenus sur le coup d’Etat alors en cours au Burkina.
L’enregistrement est d’autant plus commenté que le domicile à Ouagadougou de M. Soro avait été perquisitionné dans le cadre de l’enquête de la justice militaire burkinabè sur le coup d’Etat raté.
La conversation est présentée comme étant celle de M. Soro, ancien chef de la rébellion ivoirienne soutenue par le président burkinabè déchu Blaise Compaoré, avec l’ancien ministre de Compaoré Djibrill Bassolé, accusé de haute trahison et actuellement écroué.
"L’affaire est pour le moment du domaine de la clameur publique. Si les autorités officielles du Burkina Faso portaient une telle accusation, M. Guillaume Kigbafori Soro aurait une réaction officielle", a affirmé à l’AFP Moussa Touré, un porte-parole de M. Soro dont l’entourage évoque une "manipulation" et un "coup bas".
"L’enregistrement rendu public en fin de semaine dernière par des canaux inattendus est formellement contesté par M. Bassolé. Je l’ai écouté moi-même en compagnie de son épouse qui ne reconnaît pas sa voix", a quant à lui souligné Me Alexandre Varaut, avocat de M.Bassolé.
"C’est une hypothèse totalement ridicule d’imaginer qu’il ait pu avoir une conversation de cette nature avec M. Soro. Si M. Soro lui avait tenu des propos de telle nature, il lui aurait raccroché au nez. Ensuite M. Soro ne lui a jamais tenu de tels propos", a-t-il poursuivi.
- Enregistrement différent, phrases communes -
Selon cet enregistrement d’une quinzaine de minutes, les deux hommes évoquent la possibilité de soutenir le putsch en cours et la possibilité de "frapper" dans le nord du Burkina pour faire "paniquer" l’armée régulière.
La personne présentée comme M. Soro propose notamment de financer les putschistes et de faire tuer deux personnalités burkinabè : Cheriff Sy, président du Conseil national de Transition, et Salif Diallo, ex-ministre de Compaoré passé dans l’opposition. Il les compare à Désiré Tagro, un proche de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo et IB (Ibrahim Coulibay, chef d’une rébellion), tous deux tués lors de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire.
"Manifestement, la cible c’est Soro. Pour moi, c’est une manipulation ivoirienne", souligne Me Varaut. Un deuxième enregistrement, tendant à disculper les deux hommes, a aussi fait son apparition, sans qu’il ne soit authentifié non plus. Des phrases entières sont strictement identiques aux deux enregistrements.
"Il (Bassolé) a parlé avec M. Soro. Depuis bien longtemps, nous disons qu’une conversation a existé. Ils se sont effectivement parlé. M. Bassolé a eu dans cette période-là des conversations avec beaucoup de responsables politiques d’Afrique de l’Ouest", précise Me Varaut.
"Cette conversation, on en a un enregistrement qui a été rendu public. Elle est beaucoup plus brève et on ne voit pas comment les deux mêmes personnes auraient pu tenir des conversations aussi différentes sur le même sujet", dit Me Varaut.
"La première conversation, celle de 15 minutes, c’est un montage (...) assez grossier selon les techniciens", conclut l’avocat. Des soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), l’ancienne garde prétorienne de Compaoré, avaient pris le président Michel Kafando et le gouvernement en otage le 16 septembre avant de proclamer le coup d’État le lendemain. La mobilisation populaire et de l’armée loyaliste avait conduit à l’échec du putsch une semaine plus tard.
mw-pgf/jhd