Le Conseil national de la Transition (CNT) a adopté, le jeudi 5 novembre 2015, à Ouagadougou, le projet de loi portant révision de la Constitution burkinabè et celui consacrant le prolongement de la Transition.
Le débat sur la limitation des mandats présidentiels au Burkina Faso est désormais clos. Après la polémique autour de la modification de l’article 37 de la Constitution ayant abouti à l’insurrection populaire de fin octobre 2014, le Conseil national de la Transition (CNT) a adopté jeudi 5 novembre 2015 presqu’à l’unanimité (88 voix pour, sur 89 votants) la loi portant révision de la Constitution de la IVe République. La nouvelle Constitution a mis suffisamment de garde-fous autour de l’article 37 dont le libellé a été reformulé, consacrant son verrouillage à jamais. Le nouvel article stipule que : « Le président du Faso est élu au suffrage universel direct, égal et secret pour un mandat de cinq ans. Il est rééligible une seule fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats de Président du Faso consécutivement ou par intermittence ». Alors que l’ancienne Constitution laissait la possibilité au président du Faso après deux mandats consécutifs, de partir et revenir, le nouvel article 37, lui, se veut plus strict et moins généreux. Aucun locataire du palais de Kosyam, quelles que soient ses qualités ou son charisme, ne peut caresser le rêve d’excéder deux mandats. Les avancées de cette loi ne se limitent pas seulement à l’article le mieux connu des Burkinabè. Dans l’appareil judiciaire, des innovations visant une réelle séparation des pouvoirs (exécutif et judiciaire) sont enregistrées. Ainsi, le futur président du Faso perd sa place de président du Conseil supérieur de la magistrature au profit du premier président de la Cour de cassation. Celui-ci étant secondé par le président du Conseil d’Etat. Lequel Conseil supérieur de la magistrature se voit confier, par la nouvelle Constitution, les nominations et les affectations de magistrats. Le Premier ministre, lui également, n’échappe pas à la rigueur de la nouvelle loi fondamentale. Celui-ci est appelé à venir répondre devant la représentation nationale pour certaines questions adressées au gouvernement, sans la possibilité de se faire représenter par les membres de son gouvernement.
La Transition prolongée à l’unanimité
Le CNT a vécu à l’occasion de ce vote à bulletin secret, une ambiance très particulière. Ses membres n’ont pas hésité à entonner l’hymne du «pays des Hommes intègres », exhibant les couleurs nationales, en guise de victoire du peuple Burkinabè. Pour le président du CNT, Chériff Sy, porteur de la loi, presqu’au bord de l’euphorie, peinait à trouver les mots justes pour témoigner sa reconnaissance aux membres du CNT. « Malgré le silence des hommes bien, et le mépris des autres, vous avez su accomplir votre mission », a-t-il lancé à ses collègues à l’issue du vote. Selon lui, cette révision était l’une des revendications du peuple insurgé d’octobre 2014, et les parlementaires n’ont fait que remplir une mission pour laquelle ils ont été envoyés au Conseil national de la Transition. L’autre projet, non moins important soumis à l’examen des députés, est celui portant prolongation de la Transition. Après avoir exposé les motivations du gouvernement, la Commission des affaires institutionnelles, de la gouvernance et des droits humains (CAIGDH) en charge du dossier a émis un avis favorable. Passée l’étape du débat général, le président du CNT, Moumina Chériff Sy, a soumis la loi au vote. Laquelle loi a été adoptée à l’unanimité par les 89 votants du jour. Selon la Charte révisée, la Transition prend fin à la date de l’investiture du président du Faso. Cette « investiture intervient dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle ». Quant aux mandats des députés du CNT, ils courent jusqu’à la mise en place de la nouvelle Assemblée nationale, prévue sept jours suivant l’investiture du président du Faso issu du scrutin du 29 novembre 2015. L’exécutif représenté par le ministre de la Justice, des Droits humains et de la Promotion civique, Joséphine Ouédraogo, visiblement satisfaite a tenu à situer le contexte de ce projet de loi. « Ce projet de loi avait pour objectif de légaliser le processus de la Transition dont le calendrier a été bouleversé du fait du coup d’Etat du 16 septembre 2015 ayant occasionné le report de la présidentielle et des législatives initialement prévues pour le 11 octobre 2015 », a-t-elle souligné. Cette adoption presqu’à l’unanimité, a ajouté la Garde des Sceaux, confère au gouvernement la légalité pour la conduite de la Transition au-delà des délais prescrits par la Charte de la Transition. Car cette Charte avait précisé que son délai ne saurait excéder 12 mois à compter de la date de l’investiture du président Michel Kafando (ndlr 21 novembre 2014).
Beyon Romain NEBIE