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Dialogue intérieur / AN I de la chute de Blaise Compaoré : Un peuple toujours debout
Publié le vendredi 30 octobre 2015  |  Le Pays
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© Présidence par DR
Le Président du Faso, Blaise Compaoré




Des crépitements d’armes, des débris de toutes sortes qui jonchent les rues, des volutes de fumée qui s’échappent de bâtiments publics et privés, des rues noires d’un monde massivement mobilisé contre le tripatouillage de sa Constitution, etc. Telle était la situation à Ouagadougou il y a de cela un an, jour pour jour. En effet, comme un seul homme, le peuple burkinabè s’est levé pour dire non à la tentative de modification de la Constitution pour permettre au président Blaise Compaoré de briguer un énième mandat à la tête de l’Etat. Bravant les chars et les canons du pouvoir, le peuple burkinabè s’est lancé à l’assaut de l’hémicycle où les députés de la majorité présidentielle s’apprêtaient à réaliser, à la suite du gouvernement, le rêve de Blaise Compaoré de s’accrocher au pouvoir. Les barricades ne résistèrent pas longtemps face à la détermination populaire. C’était la première d’une série de victoires du peuple debout.

Ce sont les tenants du pouvoir Compaoré qui ont créé eux-mêmes les conditions de sa chute

Dans la foulée, le peuple excédé et ragaillardi, prit la résolution de libérer Kosyam de Blaise Compaoré et de ses hommes. Face aux manifestants qui réclamaient ainsi son départ du pouvoir, l’enfant terrible de Ziniaré a multiplié les manœuvres : après le retrait du projet de loi, il prononça la dissolution du gouvernement et d’autres mesures, mais rien n’y fit. Le lendemain, face à la rue qui grondait encore, il a dû se résoudre à prendre ses jambes à son coup, consacrant ainsi la fin d’un régime vieux de 27 longues
années. Ce sont les tenants du pouvoir Compaoré qui ont créé eux-mêmes les conditions de cette chute. En multipliant les injustices, le régime déchu a creusé sa propre tombe. Les Burkinabè ont fini par comprendre qu’ils n’ont vraiment pas d’avenir avec des gens dont l’arrogance le disputait à leur boulimie du pouvoir. Il fallait donc mettre à mort ce régime gagné par l’usure du pouvoir. Le pays était en « laisse-guidon » comme on le dit chez nous, comme s’il n’y avait pas vraiment de commandant à bord.
Cette situation, couplée à l’insolence des bonzes du régime à l’époque et à leur intention de régner à vie, a favorisé le réveil des consciences. Les populations n’en pouvaient plus de subir les brimades et autres injustices. Ces mêmes populations se sont mobilisées quand il s’est agi, en septembre dernier, de contrer le putsch militaire de l’ex-Régiment de sécurité présidentiel (RSP). Par son organisation et sa constance, le peuple burkinabè a indiqué clairement que « plus rien ne sera comme avant ». En versant son sang, il aura réhabilité l’image du pays, cette image que le président Thomas Sankara avait construite en donnant toute sa fierté au Burkinabè. Au nombre des acquis de la mobilisation du peuple burkinabè, il faudra aussi noter le démantèlement du bras armé du pouvoir Compaoré, l’ex-RSP. Avec cette dissolution, c’est une page sombre et douloureuse de l’histoire de l’armée burkinabè, de l’histoire du Burkina qui se referme. L’unité retrouvée de l’armée nationale augure de perspectives heureuses pour l’ensemble de la nation burkinabè, l’avènement d’une armée soudée et entièrement au service du pays.

Le pays n’a pas sombré après Blaise Compaoré

La transition mise en place au lendemain de la chute de Blaise Compaoré aura, notamment sous la pression populaire, entrepris de nettoyer les écuries d’Augias. Ainsi, des dossiers brûlants comme ceux de Thomas Sankara et Norbert Zongo, ont été rouverts par la justice et les Burkinabè attendent qu’enfin la lumière se fasse. Des textes juridiques ont été révisés pour les mettre en adéquation avec le nouveau Burkina. La traque de la délinquance financière est engagée. C’est dire qu’il y a de nombreux signaux positifs, depuis que le peuple burkinabè a décidé de reprendre son pouvoir jadis confisqué par Blaise Compaoré et son clan. Certes, les autorités de la transition n’ont pas réussi à aller vite et bien comme le souhaite le peuple. Ils n’ont pas pu, par exemple, améliorer le contenu du panier de la ménagère et les syndicats ne sont pas fiers du sort que le gouvernement a réservé à leurs doléances. Même la révision constitutionnelle censée redonner de nouveaux fondements à la République, n’a pas pu être faite alors même qu’elle devait être une priorité absolue au regard des insuffisances de la loi fondamentale actuelle. Les racines de l’ex-régime aussi sont toujours en place, et les avoirs des anciens ténors zélés et dangereux du pouvoir déchu n’ont pas tous été gelés.
A la décharge des autorités de la transition, on peut noter qu’arracher les racines d’un régime vieux d’environs 3 décennies, n’est pas un jeu d’enfant. Il faut donc beaucoup de patience et de tact. C’est dire qu’il n’est pas aisé de déboulonner un tel système d’un seul tour de vis. On en veut pour preuve le fait qu’en République sud-africaine, malgré la fin de l’apartheid, les Blancs tiennent toujours entre leurs mains les leviers du pouvoir financier dans le pays. Il faudra beaucoup de travail, d’abnégation et œuvrer dans les règles de l’art, pour ne pas verser dans l’arbitraire. Reste à espérer que les futurs dirigeants du pays, qui seront issus des élections de fin novembre prochain, fassent de l’assainissement du milieu des affaires, une de leurs priorités. Autrement, ce sera le retour aux mauvaises vieilles pratiques.
Pour en revenir à la leçon administrée par le peuple burkinabè au monde en matière de démocratie, on peut dire qu’elle a fait des émules en Afrique. En effet, d’autres peuples se mobilisent patiemment, mais avec détermination, contre des dictatures qu’ils finiront tôt ou tard par vaincre. C’est le cas au Congo, en RD Congo, etc. Bien entendu, le syndicat des chefs d’Etat ne voit pas d’un bon œil ce qui se passe au Burkina. Mais, le peuple burkinabè tient bon. Du reste, le pays n’a pas sombré après Blaise Compaoré, comme l’annonçaient les oiseaux de mauvais augure. C’est aussi la preuve que la conscience collective burkinabè a pris du galon et que ce peuple, dans ses différentes composantes, a dorénavant une claire conscience de ce qu’il veut. Aujourd’hui, c’est un peuple toujours debout, prêt à faire face à tous les défis, qui se prépare à aller aux urnes pour consacrer la fin de la transition. Il faudra maintenant que ce peuple réussisse dans l’unité et la concorde, le combat contre l’incivisme, ce mal qui mine la société burkinabè et qui n’est pas digne d’un si grand peuple.

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