12 mois de prison ferme et 500 mille francs d’amende pour 5 prévenus déclarés coupables de fraude ; 6 mois de prison ferme et 150 mille francs d’amende pour 17 autres coupables de complicité de fraude ; une seule personne a bénéficié d’un sursis. C’est le verdict rendu le 23 octobre 2015 par le tribunal correctionnel de Ouagadougou dans le dossier de fraudes aux concours direct d’entrée à la Fonction publique session 2015. Convaincu de complicité de fraude, le directeur de la télévision nationale, Ouezzin Louis Oulon a écopé de 6 mois de prison ferme et 150 mille francs d’amende.
Instruit contradictoirement à la barre du tribunal correctionnel de Ouagadougou le 9 octobre dernier, de 9h à 21h, le délibéré du dossier des 23 présumés fraudeurs aux concours direct d’entrée à la Fonction publique session 2015 avait été renvoyé au 23 octobre. Vendredi dernier donc, dès 7 heures, c’est une foule nombreuse qui a pris d’assaut le palais de justice. On dirait que les gens voulaient ouïr par eux-mêmes le verdict plutôt que de se le faire conter.
L’audience correctionnelle a débuté à 9h. Tous les 23 prévenus n’étaient pas présents. On notait surtout l’absence de Ouezzin Louis Oulon, le directeur de la télévision nationale.
Dans une salle comble, en à peine 5 minutes, le tribunal avait fini de rendre son jugement. Au vu de ce verdict, on peut affirmer que les juges ont pratiquement suivi les réquisitions du parquet qui réclamaient le maximum pour les 23 prévenus.
Et de fait, le plus fort tarif prévu par la loi a été appliqué a 5 prévenus reconnus coupable de fraude. Ils ont écopé d’une peine de 12 mois de prison ferme (le maximum au pénal) et d’une amende de 500 mille FCFA (la moitié du montant maximum prévu). Parmi ces 5 coupables, il y a surtout Issouf Tou, le directeur du cabinet chargé de la conception des sujets des concours publics au Burkina Faso depuis l’an 2000. Mais il y a aussi Seydou Compaoré (contrôleur des douanes), Ousmana Ouédraogo (contrôleur du Trésor) et Saidou Birba (propriétaire de centres de formation au concours de la Fonction publique) mais aussi Hyppolite Kabré et Lassané Ilboudo.
Un deuxième groupe de 17 prévenus ont vu la requalification de leur infraction en complicité de fraude. Reconnus coupables, ils ont pris chacun 6 mois de prison ferme avec une amende de 150 mille francs. Ouezzin Louis Oulon, le directeur de la télévision nationale fait partie de ce groupe.
Le troisième groupe est constitué d’une seule personne, qui a vu sa condamnation pénale (6 mois) assortie de sursis ; mais elle doit payer une amende de 500 mille francs.
Tous les condamnés disposent d’un délai de 15 jours pour interjeter appel.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce verdict est loin de faire l’unanimité. Il y a les avocats de la défense qui la rejette car, pour eux, le droit n’a pas été dit. Ainsi pour le conseil de Issouf Tou, Me Armand Bouyan, «aucune infractions n’a été prouvée. Vu les éléments du dossier, nous étions confiants qu’on ne puisse pas rendre une autre décision sauf la relaxe». En attendant une concertation avec son client, l’avocat songe déjà à faire appel de ce verdict.
Du côté de la coordination des jeunes unis pour la reprise des concours concernés par la fraude, on fulmine à cause de la «légèreté» des peines prononcées. Pour son porte-parole, Hermann Moussa Koncobo, «c’est inadmissible qu’un individu vende des sujet à 3 millions pour ne payer qu’une amende de 500 mille francs». Alors il interpelle le législateur à revoir rapidement la loi pour y inscrire des «peines plus dissuasives».
Cette coordination des jeunes va convoquer une assemblée générale pour faire le point et décider de la suite. Mais en attendant, elle milite déjà pour la reprise des concours au nom du principe d’égalité des chances des citoyens car pour elle, en réalité, «la liste des fraudeurs et des concours incriminés n’est pas exhaustive».
San Evariste Barro