OUAGADOUGOU -- La réinstallation du président de la transition du Burkina Faso, Michel Kafando, le 23 septembre, par un collège de chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a consacré la fin d’une semaine de coup d’Etat mené par les militaires du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), ex-garde de Blaise Compaoré, ancien président burkinabè.
Face aux exactions commises par Boko Haram au Nigeria, au Niger, au Cameroun et au Tchad et l’affiliation de ce groupe à Daech (Etat islamique), les dirigeants de la CEDEAO veulent éviter que la crise au Burkina Faso ne provoque des troubles dans toute la sous-région.
Dans leur célérité pour une bonne conduite de la transition, les chefs d’Etat de l’institution sous-régionale, sous la pression du peuple burkinabè, ont fini par user de tout leur poids afin que le président de la transition reprenne les rênes du pouvoir avec la remise en selle des institutions du pays qui avaient été dissoutes par les putschistes.
Les premières négociations conduites par le président en exercice de la CEDEAO, le chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, le 18 septembre, furent un échec aux yeux de bon nombre d’observateurs, qui estiment que les conclusions des pourparlers faisaient la part belle au putschistes, dont l’amnistie au général Gilbert Diendéré et ses hommes, le report de la date des élections et la réintégration de tous ceux qui avaient été recalés aux élections par le Conseil constitutionnel, la plus haute juridiction en matière d’élections au Burkina Faso.
Après ces conclusions, la tension avait monté d’un cran dans ce petit pays sahélien d’Afrique de l’Ouest, où la société civile, les acteurs politiques et des colonnes de l’armée régulière venues de l’intérieur du pays ont haussé le ton contre la médiation.
En moins d’un an, ces militaires ont interrompu à trois reprises le processus de transition, avant de réussir le 16 septembre à réaliser leur "plus grand forfait", le coup d’Etat.
Les populations, dans leur grande majorité, se demandent si on doit amnistier des gens qui ont tué ET blessé des personnes. Dans l’application d’éventuelles sanctions, les responsabilités doivent être situées et la logique voudrait que seuls les chefs militaires qui ont muri, ordonné et mis en exécution ce coup de force répondent de leurs actes, comme l’a suggéré le Premier ministre Yacouba Isaac Zida, à l’issue du premier Conseil des ministres post-putsch vendredi.
L’autre question épineuse concerne l’inclusion de tous les candidats dans le processus électoral. Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, ex-majorité) et ses alliés, qui ont vu des candidats de leur sérail mis sur le banc de touches du processus électoral, plaident pour la participation de tous aux élections couplées (législatives et présidentielle).
Le Conseil constitutionnel a déjà délibéré sur ces cas en recalant du processus les ministres du dernier gouvernement, les députés de la dernière législature, en somme, tous ceux qui ont joué un rôle dans la tentative de modification de l’article 37 qui limitait à deux le mandat présidentiel.
Au regard de la position "intransigeante" des magistrats et de la société civile pour une quelconque intégration de ceux qui ont soutenu et encouragé, l’ancien président Blaise Compaoré dans son projet de modification de la Constitution, il serait difficile à l’heure actuelle de faire machine arrière.
En principe, cette situation semble avoir trouvé un début de résolution avec le remplacement des recalés par d’autres candidats sur les listes. Selon la loi électorale burkinabè, les personnes recalées sont inéligibles mais, ils ont été remplacés par d’autres candidats.
Le Burkina Faso portera, pendant longtemps encore, des problèmes tels le désarmement du RSP, la question de l’inclusion, tant les passions ont pris le dessus sur la réalité ; la non résolution de ces questions risque d’être une tâche harassante pour les différents régimes qui vont se succéder, car les positions restent figées, voire bloquées.
Pour la paix dans la sous-région, la CEDEAO a donné une entière confiance et responsabilité aux autorités burkinabé afin qu’ils essaient de mettre en application les points d’accord de l’institution sous-régionale en vue de permettre des élections transparentes, inclusives et équitables.