Faisant suite aux conclusions du Bureau politique de la majorité présidentielle, le président de la RDC, Joseph Kabila a démis de leurs fonctions son conseiller spécial pour la sécurité, Pierre Lumbi, et le ministre du Plan, Olivier Kamitatu. Motif invoqué, les deux parias ont publiquement manifesté leur opposition au maintien de Kabila au pouvoir à la fin de son deuxième et dernier mandat en 2016.
Le conseiller spécial du président et son ministre du plan font partie en effet d’un groupe de sept partis politiques qui ont qualifié de « suicidaire » la volonté affichée de Joseph Kabila de s’éterniser au pouvoir, en dépit des signaux d’alerte envoyés au locataire du palais de la Nation par plusieurs organisations internationales, par l’opposition politique congolaise et par la société civile.
Cette chasse aux sorcières, qui semble être le début d’une série, est un message sans ambiguïté à tous les membres du G7 qui, selon les proches de Kabila, se sont, de fait, exclus de la majorité présidentielle.
Mais au-délà de ces couacs dans les rangs de ceux qui sont aux commandes de la RDC, c’est la question de l’alternance dans de nombreux pays africains qui est remise sur la table. Avec l’insurrection populaire qui a eu lieu au Burkina Faso en fin octobre 2014 pour mettre fin aux velléités de Blaise Compaoré de modifier la Constitution afin de demeurer au pouvoir après la fin de son dernier mandat, tous les Africains s’étaient permis de rêver enfin d’un pouvoir exercé par le peuple pour le bien-être du peuple dans tous les pays du continent. L’euphorie était telle qu’on avait fini par oublier qu’il y avait encore sous nos tropiques des chefs d’Etat que le cas burkinabè était loin de désarçonner, à l’image de ce quarteron de l’Afrique centrale (Kabila, Nkurunziza, Kagamé, Sassou Nguesso) qui se marrait des extrapolations que des analystes politiques faisaient de l’insurrection burkinabè. Depuis en effet, certains comme Nkurunziza au Burundi sont passés en classe supérieure en organisant des élections calamiteuses qu’ils ont naturellement remportées, pendant que d’autres sont encore au stade de la révision de leur Constitution pour sauter les articles rédhibitoires comme c’est le cas aux deux Congos, et au Rwanda.
Joseph Kabila, qui ne fait plus mystère de sa volonté de se porter candidat bien que la Constitution congolaise le lui interdise en 2016, est d’autant plus enclin à le faire que son homologue burundais a pu transformer l’essai alors que tous les observateurs lui prédisaient un sort à la Compaoré. Certes, au regard du chaos qui règne à Bujumbura, le président congolais pourrait être amené à réfléchir par deux fois avant de tenter le passage en force, surtout que ses proches qui n’entendent pas l’accompagner dans ses dérives dictatoriales vont faire le vide autour de lui. Malheureusement, pour ainsi dire, avec les derniers événements qui se déroulent au Burkina Faso et qui portent un coup d’arrêt à la Transition politique mise en place au lendemain de la victoire du peuple sur l’ordre ancien, Kabila fils et tous les autres dictateurs qui avançaient masqués vers des pouvoirs à vie vont définitivement sortir de la gueule de bois dans laquelle la fuite éhontée de Blaise Compaoré les avait plongés. Il ne reste plus au président de la RDC d’écarter tous les opposants à l’intérieur et à museler la presse et les organisations des droits de l’Homme et le tour sera joué. A moins que les événements en cours à Ouagadougou ne provoquent une autre réaction du peuple burkinabè, pour rappeler à tous les putschistes, que quels que soient les moyens qu’ils utiliseront, ils ne pourront jamais venir à bout d’un peuple déterminé.
Hamadou GADIAGA