Des agents du Fonds d’appui au secteur informel (FASI), en complicité avec des promoteurs de projets, ont réussi à détourner jusqu’à environ 54 millions de F CFA des fonds publics. Le cerveau de la bande est un agent en service à Orodara dans le Kénédougou.
Créé en février 1998, le Fonds d’appui au secteur informel (FASI) est un programme d'aide à l'emploi. Il sert à financer des projets artisanaux par des prêts remboursables à faibles taux. C’est l’un des instruments de mise en œuvre de la politique gouvernementale de promotion d’emploi et de lutte contre le chômage. Sa mission est de promouvoir l’auto-emploi dans le secteur informel, en favorisant l’accès aux crédits à des personnes porteuses de projets rentables et créateurs d’emplois. Le FASI dispose de représentations dans les chefs-lieux de toutes les 13 régions du Burkina. Mais en plus, le fonds, dans le cadre de la déconcentration progressive de ses activités, s’est lancé dans l’érection d’agences dans les chefs-lieux de certaines provinces.
Le FASI n’appuie que les meilleurs dossiers de prêt émanant des demandeurs. Toutefois, pour aider les promoteurs de projets à monter de bons dossiers, le FASI a affecté des agents d’animation dans ses différentes représentations à l’intérieur du pays. Mais, visiblement, la moralité de certains de ces agents d’animation est profondément infecte. La preuve en a été faite tout récemment. Un agent d’animation affecté à Orodara dans la province du Kénédougou (région des Hauts-bassins) s’est retrouvé à la base d’un gros détournement de fonds publics, estimé à environ 54 millions de F CFA, selon une source bien imprégnée. L’agent en question se nomme Issa Tarbagdo.
A Orodara, les habitants ne se doutent toujours pas de la grosse arnaque découverte dans cette ville. Du moins, c’est ce que nous avons compris dans la journée du lundi 8 avril 2013, alors que nous cherchions auprès de certaines personnes ressources, des renseignements sur cette affaire, jusqu’alors ambiguë. Puisque les premières informations qui ont motivé notre déplacement faisaient cas d’une institution de micro finance. Cela aurait été le cas que toute la ville, voire au-delà, serait effectivement mise au courant. Que nenni. Tellement l’affaire était bien menée, dans la plus grande discrétion.
Depuis l’agence FASI de Orodara, Issa Tarbagdo avait réussi à monter un vaste réseau de détrousseurs, mais dont les racines remontent jusqu’à la direction générale du FASI, à Ouagadougou. Un réseau qui comprend aussi bien des agents du FASI à Orodara que trois agents du siège à Ouagadougou, mais aussi des promoteurs de projets fictifs, montés de toutes pièces par Issa Tarbagdo lui-même. En gros, une quinzaine de personnes y sont impliquées. Mais en fin de compte, c’est en janvier 2013, tout récemment, que le pot-au-roses a été découvert et, selon toujours notre informateur, le réseau d’arnaqueurs a été interpellé par les pandores. Les concernés ont tous été inculpés pour enrichissement illicite et recel. Tandis que le dossier est encore en instruction, présentement ils méditent sur leur sort à la maison d’arrêt et de correction de Orodara.
Comment Issa Tarbagdo et sa bande procédaient -ils ? L’agent d’animation se plaisait à reprendre des projets déjà montés, ayant déjà bénéficié de financement, et dont il actualisait la date, pour ensuite les réintroduire dans le circuit du FASI. Et comme ce sont des projets bien montés, il était donc assuré de leur financement. Alors, il faisait recours à la complicité de leurs promoteurs, lesquels, par cupidité, n’hésitaient pas non plus à y apposer leur signature, en contrepartie d’une commission une fois que le financement est acquis. D’ailleurs, ce sont les mêmes personnes, puisque officiellement responsables des projets présentés, qui se rendaient de Orodara à Ouagadougou pour percevoir le crédit octroyé. Avec le cerveau, le partage se faisait à leur retour.
Tout compte fait, à cause de cette supercherie, des projets ont été doublement financés par le FASI, tandis que bien d’autres dorment encore dans les tiroirs. N’aurait-il pas été préférable si cet argent partait à sa destination réelle ? Hélas, la bande à Issa Tarbagdo se la coulait douce sur le dos de la Nation.
Au demeurant, il n’est pas non plus superflu de se demander si toutefois c’est cette même affaire qui a occasionné le départ du directeur général du FASI. Il a été remplacé à son poste par Aminata Kaboré. Approchée pour en savoir davantage sur l’affaire, celle-ci a dit ne pas être bien informée, parce qu’elle n’a pris fonction que le lundi dernier .
Par Lassina Fabrice SANOU
