Au cours d’une conférence de presse le 13 août dernier, le Congrès pour la démocratie et le progrès s’est érigé en donneur de leçons. Il a pêle-mêle brocardé les OSC qui ont déposé des recours contre certains de ses candidats et le Conseil constitutionnel qui a réceptionné lesdits recours. Puis de lancer cette sentence suffisamment grave pour être notée : « sans inclusion, pas d’élection ». Visiblement, c’est le nouveau slogan de l’ex-parti au pouvoir, fait de menaces à peine voilées sur le processus électoral. On croirait rêver en entendant de tels propos. Hier encore auteur d’une grave forfaiture sanctionnée par le peuple avec une insurrection populaire rarement vue sur le continent, le CDP retrouve, aujourd’hui, ses grands airs. Et surtout, il se met dans la peau d’une victime qui ne se laissera pas faire. Drôle de stratégie pour un parti qui dit pourtant avoir changé de ligne depuis l’arrivée du nouveau bureau. Il se fait d’ailleurs appeler pour cela « CDP nouveau ». Mais à la lumière de la sortie violente de ses responsables, on doute fort que la mue ait eu lieu et que les leçons de l’insurrection aient été retenues. Les vielles habitudes ont la peau dure. C’est compréhensible. Beaucoup de caciques du régime déchu ne digèrent toujours pas cette chute brutale. Mais à qui la faute ? Ils devraient s’en prendre à eux-mêmes, d’avoir soutenu un projet de pouvoir à vie anachronique et rejeté par le peuple. Au lieu de cette profonde introspection et cette remise en cause réelle, on assiste au retour des pratiques d’un autre âge : la menace. Là encore, le CDP et ses alliés risquent de se fourvoyer. Ce n’est pas la bonne stratégie pour espérer revenir un jour aux affaires. Ils ne seront pas suivis ni par le peuple, ni par la communauté internationale dans cette fuite en avant. Le mieux, c’est de laisser les organes électoraux et judiciaires faire leur travail, et surtout agir dans le respect des institutions de la République. Si tant est qu’on est légaliste et républicain… Le Burkina est dans une phase essentielle de son processus électoral et personne ne sera autorisé à le remettre en péril. De quelque bord qu’il soit. Voilà pourquoi le CDP fait erreur en agitant l’épouvantail de la menace. Tous les groupes associatifs et mouvements politiques ramant à contre-courant de la volonté du peuple risquent de se mordre le doigt. Les élections apaisées et démocratiques du 11 octobre sont espérées de toutes leurs forces par les populations désireuses de sortir de cette transition. Qu’on ne vienne donc pas s’amuser à vouloir briser leurs rêves, pour des intérêts inavoués.
Le CDP est d’autant mal placé pour être les donneurs de leçons lui qui voulait le maintien au pouvoir ad vitam aeternam d’un individu. A ce titre, il ne peut apprendre ni la démocratie, ni le droit à personne. S’il estime être lésé dans tel ou tel dossier, il a la latitude de saisir les juridictions compétentes. Mais se mettre à critiquer le Conseil constitutionnel, comme il le fait, n’est ni plus ni moins qu’une fuite en avant. Ailleurs, sous d’autres cieux, on sait le sort qui a été réservé à des pouvoirs déchus de ce type. Il ne faut donc pas, en tirant à nouveau sur la corde, remuer le couteau dans la plaie et réveiller les anciennes douleurs. Les blessures de l’insurrection sont loin d’être cicatrisées et toute attitude irresponsable ne peut que les raviver, au risque de remettre les protagonistes face à face. Est-ce ce que cherche le CDP ? C’est-à-dire en optant pour la stratégie du chaos ? Non, les Burkinabè ne se laisseront pas divertir. Ils n’accepteront pas que des aventuriers reviennent pour mener le pays vers une nouvelle crise. Cela est valable pour tous les acteurs de la société civile et politique, quelle que soit leur origine. Tous ceux qui se mettront en travers du chemin vers l’espoir pour les Burkinabè, en auront pour leur grade. Il appartient dès lors aux autorités compétentes de prendre leurs responsabilités pour calmer les ardeurs belliqueuses des uns et des autres1
La Rédaction