La saison des pluies est réputée être une période propice au développement du paludisme. Pour avoir de plus amples informations sur le fléau du paludisme qui fait beaucoup de décès, nous avons rencontré le coordonnateur du Programme national de lutte contre le paludisme, Dr Yacouba Savadogo le jeudi 13 août 2015 à Ouagadougou. L’existence d’un vaccin contre le paludisme et les rumeurs de l’apparition de la dengue ont été, entre autres , l’objet de l’interview qu’il nous a accordée.
Le Quotidien : La saison des pluies est réputée être une période propice au développement du paludisme. Quelle est justement la situation actuelle du paludisme dans notre pays ?
Dr YacoubaSavadogo, coordonnateur du Programme national de lutte contre le paludisme : Pource qui est du paludisme, en 2014, nous avons enregistré 8 millions de cas avec 5 600 décès dont 4 000 décès chez les enfants de moins de 5 ans qui est la cible qui paie le plus lourd tribut du paludisme de même que les femmes enceintes. Au cours du premier semestre de l’année 2014, nous avons enregistré 2 612 474 cas contre 2 301 442 cas pour le premier semestre de l’année 2015 soit une réduction de 12% des cas de paludisme, de 16% pour le paludisme grave et de 16% pour les décès. En nombre absolu, entre 2014 et 2015, nous avons pu sauver 275 vies si l’on veut tenir compte des chiffres absolus.
Quelles sont les actions entreprises par votre structure pour endiguer le phénomène ?
La lutte contre le paludisme en coordination avec le Programme national de lutte contre le paludisme se décline en plusieurs axes. L’un des axes est la prise en charge et la prévention médicamenteuse. En ce qui est de la prise en charge, il y a le paludisme simple et le paludisme grave. La porte d’entrée du paludisme simple est la fièvre. D’autres signes peuvent accompagner dont le vomissement, les céphalées et des courbatures. Ces cas sont soignés dans nos formations et les médicaments sont subventionnés en fonction de l’âge du patient. Les prix vont de 100 F à 300 F CFA. Le paludisme grave concerne surtout les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes. Nous disposons de kits gratuits à la hauteur des stocks disponibles pour ces cibles privilégiées. Les kits sont entièrement gratuits dans les centres de santé publique.
Pour ce qui est de la prévention médicamenteuse, elle concerne surtout les femmes enceintes. Il s’agit pour elles de prendre des médicaments pour prévenir le paludisme. Les médicaments sont entièrement gratuits. Nous avons aussi la chimio-prévention. Elle consiste à donner des médicaments aux enfants de moins de 5 ans pendant la saison des pluies (Ndlr : août, septembre, octobre et même novembre). Les médicaments préviennent le paludisme. Mais cette opération se fait dans 17 districts sanitaires de notre pays. Au cours de l’année 2016, avec l’appui des partenaires techniques et financiers, l’objectif est d’étendre cette pratique aux 70 districts sanitaires de notre pays. Au-delà de ces aspects de prévention et de prise médicamenteuse, nous avons la prévention anti-larvaire, l’assainissement du cadre de vie qui est une responsabilité partagée, individuelle mais aussi collective et multisectorielle. Nous avons aussi le fait de dormir sous une moustiquaire imprégnée d’insecticide. Tous les 3 ans, nous faisons la campagne gratuite de distribution des moustiquaires. Nous avons organisé en 2010 et 2013 cette campagne de distribution. La prochaine campagne aura lieu en 2016. En dehors des campagnes et dans la limite du stock disponible, nous rendons disponibles les moustiquaires pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans. il y aussi d’autres possibilités telle que la lutte anti larvaire qui sont des moyens disponibles même s’ils ne sont pas développés dans notre pays à grande échelle.
Récemment, nous avons appris qu’enfin il existe un vaccin contre le paludisme. Comment avez-vous accueilli une telle information ?
Pour ce qui concerne le Burkina, il y a un vaccin qui est en développement et qui est à un stade développé. Pour l’instant, il n’est pas introduit dans le programme élargi de vaccination. Pour ce qui a été annoncé par voie de presse, nous n’avons pas encore reçu une notification officielle de notre hiérarchie encore moins de son introduction dans notre système de vaccination. Mais nous nourrissons l’espoir que si ce vaccin venait à être introduit dans notre système de santé la lutte contre le paludisme connaitra une avancée significative.
Il y a des rumeurs d’apparition d’une maladie couramment appelée paludisme-dengue. Qu’en est-il exactement ?
Le paludisme est une maladie distincte de la dengue. Les deux maladies peuvent coexister. Je voudrais d’emblée dire que le paludisme et la dengue ont des similitudes. Cela pourra prêter à confusion. Mais la différence est que le paludisme est une maladie parasitaire tandis que la dengue est une maladie virale quoi que les deux soient transmises par des moustiques. Le plus souvent, le moustique qui transmet la dengue pique au cours de la journée tandis que celui du paludisme, l’anophèle, pique à partir de 22h. Ce sont des différences qui ne peuvent pas être significatives en terme de santé publique parce qu’il est très difficile de faire la part des choses d’où l’importance de faire le test de diagnostic ou la goutte épaisse qui sont des tests sanguins de confirmation du paludisme. Selon nos directives, ces tests sont obligatoires pour déclarer un cas de paludisme simple.
Malheureusement, les gens font des traitements présomptifs qui ne sont pas basés sur des examens. Dans ce cas, on peut penser à d’autres maladies comme la dengue qui a des similitudes avec le paludisme. Il faut préciser que la dengue est une maladie bénigne dont les cas graves sont hémorragiques et peuvent engager le pronostic vital. Il faut vraiment faire la différence entre les deux maladies. Le TDR et la goutte épaisse sont les examens appropriés. Une fois que ce n’est pas le paludisme, on peut s’orienter vers d’autres hypothèses diagnostiques. C’est vraiment la seule clé pour faire la distinction entre les deux maladies1
DISPARITION DE MOUMOUNI ZONGO
L’ODJ et les jeunes de Kilwin exigent justice et vérité
13 août 2013, 13 août 2015. Voici 2 ans jour pour jour que Bénéwendé Moumouni Zongo est porté disparu après son interpellation par des éléments de la Brigade de recherche de la Gendarmerie. 2 ans après, c’est toujours mystère et boule de gomme sur les circonstances de sa disparition. Sous de fines gouttelettes de pluie, des militants de l’Organisation démocratique de la Jeunesse (ODJ) de la section de Sigh-noghin et des jeunes de Kilwin ont parcouru plusieurs kilomètres, le 13 août dernier, pour rappeler que les circonstances de la disparition de Moumouni Zongo doivent être élucidées.
Le 13 août 2015, les militants de l’ODJ et les jeunes de Kilwin ont organisé une marche pour exiger la justice et la lumière dans la disparition de Bénéwendé Moumouni Zongo. En dépit du temps maussade, les manifestants ont formé et maintenu le cortège qui a terminé sa course devant la Gendarmerie de Sigh-Noghin. Pour les manifestants, rien ne devra s’opposer à la manifestation de la vérité. En ce qui concerne, les faits, il faut remonter au 13 août 2015 où des éléments de la Brigade de recherche ont interpellé le sieur Bénéwendé Moumouni. Un des militants toujours ému, a présent en mémoire. « Il y a deux ans de cela, la gendarmerie est venue le chercher chez lui, quand il se préparait pour aller au travail. Plus tard, à 1h du matin, la gendarmerie est venue voir le vieux pour lui dire que son fils est décédé. A l’époque, les jeunes de Kilwin avaient manifesté contre ce drame.
De notre côté, à l’ODJ, nous avons essayé d’accompagner la famille comme nous le pouvions. Aujourd’hui encore nous sortons, l’ODJ étant une organisation démocratique de masse. Nous nous dirigeons vers la gendarmerie de Signoghin. Mais il faut relever que c’est la section recherche de la gendarmerie qui est venue le chercher en son temps. Ce n’est pas la gendarmerie de Sigh-noghin », a témoigné Ernest Demba, militant de l’ODJ. Depuis lors c’est l’omerta malgré les démarches de la famille soutenue par les activistes des droits humains, les choses sont restées en l’état. Des péripéties et écueils judiciaires qui se sont dressés à eux, la famille et les militants de l’ODJ ont connu même la perte de leur plainte en justice comme en témoigne Ernest Demba. « Le 23 septembre 2013, la famille, en compagnie de l’ODJ, avec les jeunes du quartier sont allés déposer une plainte à la justice. Et quand on a déposé la plainte le 29 septembre 2013, la justice nous a donné rendez-vous le 08 octobre 2013. Lorsque nous nous y sommes rendus le 08 à la justice, ils nous ont renvoyés à la gendarmerie de Boulmiougou et nous ont donné des prétendues références du ministre. Et quand nous avons été à la gendarmerie de Boulmiougou, on nous a dit que les références que nous détenons sont les références d’une parcelle.
Nous étions obligés de repartir à la justice, et là on nous a fait savoir que la plainte que nous avons déposée est perdue. Avec le soutien du MBDHP, nous avons pu déposer une autre plainte le même jour et la gendarmerie nous a donné rendez-vous pour le 29 octobre. Le 29 octobre, quand nous avons été à la justice, on a rencontré un juge nommé Bonkoungou. Lequel nous a dit de revenir le lendemain, c’est-à-dire la 30 octobre. Le 3à octobre, on a été à la justice. Et quand on a été, ils nous ont fait comprendre qu’il faut passer de temps en temps pour voir l’évolution du dossier. Effectivement, on passait de temps en temps, jusqu’à ce que des membres de la famille soient interpellés à la gendarmerie de Paspanga pour audition. Jusqu’à présent, c’est resté sans suite », a relaté Ernest Demba. La version de la Gendarmerie d’alors faisait état de la mort de Moumouni Zongo suite à des coups que des habitants de Markousis auraient apporté sur la victime. Une version que Alassane Zoundi, président du Club Balai Citoyen de Sigh-Noghin a balayé du revers de la main. « Si vous vous souvenez à l’époque, ils sont sortis à la télé avec le capitaine Jean Bosco pour dire que Moumouni a été abattu par la population de Markoussi. La population de Markoussi a nié cela. C’est au contraire eux qui l’ont poursuivi et l’ont mis dans le coffre de leur véhicule et l’ont conduit à la gendarmerie. C’est par suite de soif qu’il est décédé. Ils lui ont donné tard, de l’eau. Il était déjà mort. Ils ont appelé l’ambulance. Mais c’était déjà trop tard. Ils ont, par la suite, conduit le corps à la morgue. Et c’est à une heure du matin qu’on nous a annoncé que notre camarade est mort. Ils ont fait une autopsie, disent-ils, mais où sont les résultats ?
Personne ne le sait », a-t-il soutenu. En décidant de se rendre à la Gendarmerie de Sig-Noghin, les manifestants ont dit considérer que même si ce sont des éléments de la section recherche qui sont mis en cause, il reste que l’institution est unique. « Mais nous, nous considérons que ce sont les caïmans d’une même eau. Nous userons de toutes les voies et moyens afin que le dossier aboutisse », a argué Ernest Demba. Dans leur message, les manifestants n’y vont pas du dos de la cuillère pour appeler à la manifestation de la vérité dans cette affaire. Pour eux, la lumière doit venir de la brigade de recherche qu’ils accusent d’être responsable de la disparition de Moumouni Zongo. Ils fondent l’espoir que le vent de la transition soufflera pour qu’enfin jaillisse la lumière sur l’affaire. « Maintenant, nous sommes dans un contexte de transition. Les « transitoires » ont dit que plus rien ne sera comme avant. Il faut que ce dossier-là avance. Vérité et justice doivent essuyer les larmes. Moumouni ne reviendra pas. Cependant, son âme reposera en paix », a martelé Ernest Demba1
Par Saphnapanéa Roger
PAULDROIT