Lancé le 24 juillet 2015, c’est le 1er août, à minuit que les dépôts des dossiers des formations politiques et structures indépendantes pour les législatives de 2015 ont pris fin. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’apothéose des dépôts a été des plus mouvementées car c’est à la dernière minute que les différentes formations se sont ruées dans la cour de la CENI. En attendant la validation des candidatures, nous avons tendu notre micro à Nathanaël Ouédraogo, Secrétaire national en charge des questions électorales au niveau de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), pour savoir, entre autres, comment, à leur niveau, l’élaboration des listes s’est-elle déroulée, quelles difficultés son parti a rencontrées dans le dépôt des dossiers et quelles ont été les critères de choix de leurs candidats.
Le Pays : La période de dépôt des listes pour les législatives vient de prendre fin. Avez-vous rencontré des difficultés quelconques pour déposer vos listes ?
Nathanaël Ouédraogo : Nous n’avons pas eu de difficultés particulières au niveau de la CENI car nous avons commencé depuis le jeudi à déposer nos listes si fait que le dernier jour, nous n’avions que 7 listes à déposer. Tout s’est très bien passé et l’équipe de la CENI était même contente car elle sentait qu’aux dernières heures, il n’y aurait pas de bouchon vu qu’on écoulait au fur et à mesure nos dossiers. Nous avons déposé les 7 dernières listes, dans la soirée et dès 19h, nous avions tout fini. Donc à notre niveau, tout s’est bien passé.
Mais les dossiers pouvaient être déposés depuis le 24 juillet dernier, pourquoi avoir attendu jusqu’au jeudi pour commencer à déposer vos listes ?
Effectivement, les dossiers auraient pu être déposés depuis le 1er jour mais il s’est trouvé que nous avons découvert des nouvelles dispositions de la loi au dernier moment. C’est ce qui a fait qu’à notre niveau, nous avons repris toutes les listes. C’est ce qui explique pourquoi nous n’avons pas déposé nos listes dès le début, sinon nous étions prêts. Car, sur les 46 listes, nous avions 30 qui étaient déjà prêtes à la date d’ouverture des dépôts des listes. Au dernier moment, nous avons passé en revue le nouveau Code électoral et nous avons vu qu’il y avait des dispositions à prendre en compte, notamment, celle qui stipule que pour être éligible, il faut être électeur. C’est une petite phrase qui vient tout changer et il fallait que nous nous assurions que tous les candidats avaient leurs cartes d’électeurs. Nous n’avons donc pas voulu prendre le risque de déposer sans s’assurer que tous ceux qui étaient sur les listes avaient leurs cartes d’électeurs.
Dans l’élaboration des listes, n’avez-vous pas rencontré des problèmes au sein de votre parti ?
Nous avions 30 listes prêtes à la date d’ouverture des dépôts et nous avions donc 16 listes à arbitrer. Nous avons commencé le processus de la formation des listes depuis 2 mois et nous avons donné un mois à tous les militants sur le plan national pour qu’ils viennent déposer leurs dossiers. La première étape revenait aux provinces qui devaient dégager une liste consensuelle à leur niveau. On n’avait donc déjà, un certain nombre de listes prêtes vu qu’on avait aussi demandé à chacun de joindre toutes les pièces demandées. Après ce processus, nous nous sommes penchés sur les cas où il n’y avait pas de consensus. Pour régler ce problème, nous avons mis en place des commissions composées des membres du BPN. Ces derniers ont été chargés de rencontrer les candidats dans les différentes provinces pour trouver le consensus. Au niveau de Ouagadougou, il y a eu un week-end où on a convoqué des candidats afin de discuter et de trouver un consensus. La dernière étape dans notre processus a été la mise en place d’une commission ad hoc qui réécoutait les candidats afin de trancher définitivement. C’est dans seulement 2 ou 3 cas que les gens ont refusé le consensus trouvé par la commission ad hoc. A ce moment, nous avons simplement trouvé des dossiers pour les remplacer. Donc notre parti a pu déposer 45 listes en plus de la liste nationale.
« Nous avons tenu à faire un attelage entre femmes et jeunes »
Dans la composition de vos listes, les femmes ont occupé des places importantes, pourquoi avez-vous fait ce choix ?
Dans notre parti, nous avons décidé de mettre l’accent sur les jeunes et les femmes. L’une des raisons est que les femmes constituent une majorité dans ce pays. Si nous voulons donc nous développer, il est important qu’elles occupent une très bonne place dans le processus. Il s’agit, pour nous, de respecter aussi la loi qui dit qu’il faut au moins une femme par liste électorale. C’est un aspect que nous avons pris en compte afin de respecter la loi. En plus de cela, nous avons placé 4 femmes en tête de liste à l’instar de notre liste de la province du Kadiogo qui est l’une des plus grosses circonscriptions électorales avec 9 postes à pourvoir. Sur cette liste également, le second est aussi le président des jeunes du parti. C’est dire qu’à notre niveau, nous avons tenu à faire un attelage entre femmes et jeunes. Les jeunes aussi sont représentatifs car dans notre fichier électoral, ils représentent 60% des électeurs. Notre société est très jeune et nous voulons tenir compte de cela. Et si les jeunes sont majoritaires dans notre société, il faut qu’ils le soient aussi à l’Assemblée nationale. C’est aussi le cas des femmes. Ceux qui iront à l’Assemblée ne vont pas occuper une fonction mais joueront le rôle de représentation nationale et il faut que cela reflète la réalité. Nous voulons donc ce changement à tous les niveaux. Contrairement à ce que l’on pense, nous n’avons pas eu du mal à trouver des femmes. En effet, nous avons eu 87 candidatures féminines et sur ces 87, seulement une dizaine de dossiers n’était pas complète. 71 dossiers ont été retenus sur les 77 dossiers valides que nous avons eus. Donc 94% des femmes qui avaient un dossier valide ont été retenues.
Quels ont été vos critères de choix des candidatures ?
Nous avons jusqu’à 9 critères. Le premier est qu’il fallait partager les valeurs de l’UPC, entre autres, l’honneur, le courage, le travail. Ceci pour faire le choix des personnes qui, une fois aux affaires, ne travailleront pas pour elles-mêmes mais, pour le peuple. Il fallait bien sûr être un bon militant, payer ses cotisations, avoir sa carte et une certaine capacité financière…
Au regard de ces critères, êtes-vous confiant quant à la validation de leurs candidatures ?
Oui, je pense qu’il n’y aura pas de problème par rapport à cet aspect. Lorsque vous déposez vos dossiers à la CENI, on vous remet un papier rouge ou vert. Mais, pour tous nos dépôts, nous avons reçu un papier vert et il n’y a pas aussi eu d’observations particulières car s’il y a quelque chose, on vous fait des observations. A notre niveau, il n’y a eu aucune observation. Nous avons fait un travail de fourmis à notre niveau et quand nous transmettions les dossiers à la CENI, les agents étaient 5 à les réceptionner et à les contrôler. Donc, à mon avis, ce serait une surprise si la commission venait à invalider l’une de nos 46 listes. Mais, étant donné qu’aucune œuvre humaine n’est parfaite, cela peu arriver. Mais pour ma part, je reste confiant.
« Seuls les imbéciles ne changent pas d’avis »
On accuse votre parti d’avoir des accointances sinon d’avoir reçu de l’argent avec l’ex-majorité, notamment le CDP, pour les élections à venir. Que répondez-vous ?
Nous n’avons reçu aucun franc de personne et parlant d’alliance, nous n’avons signé aucune alliance aujourd’hui, avec un quelconque parti au Burkina. Mais, nous avons reçu des visites de courtoisie du CDP avant l’insurrection. Après l’insurrection, nous avons reçu une invitation de même que le MPP. Nous avons reçu également la NAFA. Ce sont des visites de courtoisie entre collègues et on échange sur les points de vue. On essaie également de voir si le moment venu il y a une possibilité pour qu’on travaille ensemble. S’il s’agit d’exclure des Burkinabè dans la construction du pays, le Burkina n’ira pas loin. Il faut qu’à la sortie de ces élections, tout Burkinabè conscient qui a des capacités, soit utilisé pour que le pays se construise. Et pour cela, nous n’allons pas regarder de quel bord vous êtes pour qu’on travail ensemble. La seule condition, c’est d’avoir un objectif de construire le Burkina et non pas se construire soit-même. Seuls les imbéciles ne changent pas d’avis. Si des gens qui avaient soutenu Blaise Compaoré ont changé et ont reconnu leurs erreurs et que par leurs actes on voit qu’ils sont sincères et qu’ils travaillent réellement, je ne vois pas de problème. Je vous affirme que ce n’était pas facile dans ce pays d’être un haut dirigeant sans être du CDP. Quand vous êtes responsable et que l’on sent que vous êtes autonome, on vous contraint à vous mouiller dans des dossiers pour vous soumettre au pouvoir. Ou encore, on vous menaçait de mort. Donc ce n’est pas parce qu’on était dans cette équipe qu’on est mauvais et ce n’est pas parce qu’on a agi qu’on n’est pas capable de se repentir. Dieu lui-même offre l’occasion de se repentir et je crois que le Burkina doit se construire avec tous ses fils et toutes ses filles.
Dans le paysage politique actuel, avec quel parti on peu s’attendre à une alliance de l’UPC pour les batailles futures ?
Notre président l’a déjà dit, nous souhaitons que tous les partis puissent présenter des candidats. Donc nous pensons que chaque parti qui est capable et qui veut, doit pouvoir présenter un candidat et que l’on aille à la bataille. Peut-être qu’il y aura un second tour et si l’UPC y est, il va appeler au plus large rassemblement possible. Nous n’allons exclure personne. Nous allons appeler les Burkinabè à voter l’UPC mais pas tel ou tel autre bord car le président qui sera élu sera le président de tous les Burkinabè.
Propos recueillis par Adama SIGUE