La 16e assemblée générale des Etablissements publics de l’Etat (EPE) s’ouvre ce matin. Cette instance est l’occasion pour les responsables de justifier la gestion de leurs établissements au cours de l’année 2014. Le directeur général du Trésor et de la Comptabilité publique, Naby Abraham Ouattara, fait à Sidwaya un bref aperçu des performances des EPE en 2014.
Sidwaya (S.) : La 16e Assemblée générale consacrée aux Etablissements publics de l’Etat (AG/EPE) se tient les 9 et 10 juillet 2015 à Ouagadougou. Globalement, comment ces 70 établissements se sont comportés au cours de l’exercice financier 2014?
Naby Abraham Ouattara (N.A.O.): Tout d’abord, je voudrais vous remercier pour l’opportunité que vous nous offrez de nous entretenir avec vous au sujet de l’Assemblée générale des Etablissements publics de l’Etat (AG/EPE). La présente session va examiner la gestion des EPE pour l’exercice 2014. L’examen de la situation des EPE au cours de l’exercice 2014 montre que l’année 2014 a été particulièrement très difficile pour la majorité des EPE. La rareté des ressources financières et les évènements des 30 et 31 octobre 2014 ont contribué à dégrader les indicateurs financiers. Ainsi, on a enregistré :
- un recul des recettes totales de 9,63% entre 2013 et 2014. En particulier, les subventions de l’Etat ont été en baisse de 23,84% et l’excédent d’exécution budgétaire en baisse de 6,87%;
- des dépenses budgétaires de l’année 2014 qui se chiffrent à 152,508 milliards de FCFA et sont en progression de 11,26% par rapport à l’année 2013.
- le taux de couverture des dépenses par les recettes est sorti à 102,10%, contre 125,70% en 2013. Vingt-neuf (29) EPE ont eu un taux de couverture des dépenses par les ressources se situant en-dessous de la normale ;
- un recul considérable de la situation de trésorerie de 37,95% par rapport à 2013.
Toutefois, on note des motifs de satisfaction au regard de l’analyse des rapports d’activités et des états financiers. Les équilibres financiers et la réglementation ont été respectés, les acquis ont été préservés et les efforts se sont poursuivis dans la réalisation des missions assignées à l’ensemble des EPE. Mais du point de vue des indicateurs de gestion, la situation d’ensemble des EPE reste caractérisée par une prédominance de la subvention de l’Etat qui connaît une régression de 23,84% en 2014 : 68, 631 milliards de FCFA contre 90,110 milliards de FCFA en 2013.
S. : Quels sont les secteurs qui ont été les moins performants selon le rapport de l’AG/EPE? Peux-t-on connaître les raisons de ces contreperformances ?
N.A.O. : L’examen des comptes des EPE arrêtés au 31 décembre 2014 fait apparaître que 29 EPE présentent un solde d’exécution budgétaire déficitaire. En 2013, ce sont seulement 7 EPE qui étaient en déficit contre 3 en 2012. Parmi les 29 EPE déficitaires, 11 sont des hôpitaux sur un total de 13 hôpitaux. On peut dire que les hôpitaux ont subi plus durement le coup d’une année budgétaire difficile.
S. : Cette session va plancher sur le thème « Comment optimiser la communication au sein des EPE? ». Quelles sont les motivations et vos attentes par rapport au choix de ce thème de réflexion ?
N.A.O. : Nous sommes partis du postulat que bien informé, bien sensibilisé, bien convaincu du bénéfice moral, social, collectif et matériel de sa présence sur le lieu du travail, le personnel est la première arme stratégique de toute organisation. Aussi, l’objectif principal de cette communication est d’inciter et de guider les EPE à la mise en place d’outils opérationnels de communication. Le souhait est qu’au sortir de cette AG, les établissements entreprennent les démarches nécessaires pour disposer d’un service de communication et d’un plan de communication, toute chose qui va leur permettre de mieux communiquer à l’interne et à l’externe. Dans nos services, on a souvent la faiblesse de croire que le fait de remplir le tableau d’affichage des notes de service vaut une communication. Il faut aller au-delà et asseoir une vraie stratégie de Communication. Un consultant désigné par le ministère en charge de la Communication va entretenir les participants sur le sujet.
S. : On constate que les dépenses d’investissement ont successivement régressé au cours des trois derniers exercices passant de 24 % en 2011 à 15 % en 2014. Comment expliquez-vous cette dégradation, de la part des INVESTISSEMENTS, c’est-à-dire des dépenses d’équipements?
N.A.O.: La proportion des dépenses d’investissement dans les dépenses totales des EPE connaît effectivement une régression depuis 2011, soit 24,53%, 19,04%, 18,94%, 15,19% respectivement en 2011, 2012, 2013 et 2014.
Toutefois, il convient de souligner que les ressources d’investissement des EPE proviennent de la subvention de l’Etat. Ainsi, le niveau de réalisation des INVESTISSEMENTS par les établissements sera fonction de l’importance des subventions obtenues de l’Etat. La dégradation de la part des investissements s’explique principalement par les contraintes budgétaires. En effet, les subventions sont débloquées au profit des EPE selon le rythme de mobilisation des recettes du budget de l’Etat. En cours d’année, des difficultés particulières peuvent commander la révision à la baisse des promesses initiales de l’Etat. Le plus souvent, au regard du caractère incompressible de certaines dépenses de fonctionnement, les régulations sont opérées sur les crédits d’investissement initialement alloués à ces établissements.
S.: L’autofinancement et la mobilisation des ressources propres demeurent un défi pour les EPE. Que préconisez-vous pour améliorer ces indicateurs, clés pour leur autonomie financière?
N.A.O. : Je voudrais, tout d’abord, rappeler que l’autofinancement au niveau des EPE est apprécié à travers le rapport « recettes propres recouvrées sur dépenses de fonctionnement ». En principe, ce ratio doit être supérieur ou égal à 20%. En d’autres termes, au moins 20% des dépenses de fonctionnement des EPE devraient être supportées par les recettes propres générées par leurs activités. Les ressources financières des EPE sont constituées pour l’essentiel, de la subvention allouée par l’Etat et de leurs recettes propres. C’est dans le souci de réduire leur dépendance financière vis-à-vis de l’Etat, tout en accomplissant efficacement leurs missions de service public, que ces établissements sont appelés à développer des stratégies permettant de garantir de manière pérenne, un niveau de mobilisation de recettes propres susceptibles de compenser dans une moindre mesure, la faiblesse de la subvention allouée par le budget de l’Etat. Alors sur ce plan, je suis d’accord avec vous qu’il s’agit bien d’un véritable défi pour les EPE, en ce sens qu’ils doivent concilier les questions de mobilisation de recettes propres et le caractère social de leurs missions de service public offert à la population burkinabè.
Sur ce point, je voudrais saluer les efforts entrepris par l’ensemble des EPE au titre des trois derniers exercices, au cours desquels, le taux d’autofinancement global s’est toujours situé au-dessus de 24%. C’est aussi le lieu d’encourager les principaux responsables de ces établissements et leurs collaborateurs respectifs, à poursuivre dans la même dynamique.
En effet, les efforts doivent s’intensifier et s’accroître pour le renforcement de l’autonomie financière de ces établissements. Pour y parvenir, il leur appartient de développer des initiatives en termes de création de nouvelles recettes propres à travers la diversification de leurs activités, sans toutefois perdre de vue leurs principales missions.
Cependant, il faut noter que l’accroissement des recettes propres ne saurait constituer un facteur d’amélioration du niveau d’autofinancement des EPE, si cela n’est pas accompagné d’efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement. Les responsables de ces établissements se doivent de veiller constamment à la réduction ou à la limite au maintien des dépenses telles que celles liées à la consommation d’eau, et d’électricité, au téléphone, aux fournitures de bureau, ainsi que la masse salariale des agents contractuels.
S. : Dans le secteur de la communication, on constate une forte baisse de la subvention de l’Etat (-63%) suivie du secteur de l’hydraulique avec -61%. Pourquoi? Faut-il y voir une amélioration de leur autonomie financière?
N.A.O. : D’une manière globale, il a été enregistré au titre de l’exercice 2014, une baisse de 23,84% de la subvention de l’Etat allouée aux EPE, comparativement à l’exercice 2013. En dehors du secteur de l’éducation qui a connu une hausse de 1,84%, la baisse de la subvention de l’Etat a touché tous les autres secteurs. Ce recul a été plus important pour les EPE des secteurs de la communication, de l’hydraulique et des prestations de service, avec respectivement des variations de -63,81%, -61,14% et -52,94%, par rapport à 2013. Toutefois, cette situation de baisse généralisée de la subvention de l’Etat, constatée en 2014, n’implique pas une amélioration de l’autonomie financière des EPE, mais s’explique par les ajustements budgétaires intervenus au cours de l’exercice 2014. En effet, au cours de cet exercice, des régulations budgétaires ont été opérées du fait principalement de diverses contraintes.
Néanmoins, on peut se satisfaire de l’accroissement global des recettes propres de 22,04 points en 2014, toute chose ayant favorisé une amélioration du niveau d’autofinancement qui est passé de 24,45% en 2013 à 25,89% en 2014, soit un gain de 1,44 point.
Propos recueillis par Nadoun COULIBALY