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Interdiction des couvertures médiatiques : une mesure qui fait plus de mal que de bien
Publié le mercredi 8 juillet 2015  |  L`Opinion
Interdiction
© aOuaga.com par Séni Dabo
Interdiction de la couverture de la campagne électorale déguisée : explication de texte du CSC
Vendredi 26 juin 2015. Ouagadougou. Le Conseil supérieur de la communication (CSC) a organisé une rencontre d`appropriation de la décision portant règlementation de la couverture médiatique de toute campagne électorale au profit des rédacteurs en chef des organes de presse. Photo : Louis Modeste Ouédraogo, directeur général des affaires juridiques du CSC




La disposition consacrant l’exclusion aux élections prochaines a comme fait écran à d’autres non moins liberticides du nouveau code électoral voté par le CNT. En effet, la presse est actuellement sur les nerfs et pour cause : Jusqu’au 21 septembre, elle n’a plus le droit de couvrir les activités politiques des partis au motif que ce serait une campagne politique déguisée. Ceci est en application d’une mesure inscrite dans le nouveau code électoral.

Sous la Transition, rien ne va vraiment plus et un défenseur de la veuve et de l’orphelin l’a dit bien à propos, « la Transition roule pour tout sauf pour le peuple ». On ne pouvait décrire mieux ce que la majorité des Burkinabè pensent aujourd’hui du « monstre » né des évènements d’octobre 2014. Le pays a été mis sens dessus-dessous dans tous les secteurs de la vie. L’économie est en berne avec les conséquences que l’on sait sur le quotidien des populations. Le mois de jeûne du Ramadan qui est généralement un moment de partage et de générosité est cette année d’une morosité à multiplier la souffrance du jeûneur par « N » pendant que des acteurs de premiers rangs de la Transition se la coulent douce et ne pensent qu’à préparer l’après-règne. C’est dans cette ambiance pour le moins stressante pour l’honnête citoyen que le Burkina tout entier se prépare à la campagne électorale qui va bientôt s’ouvrir. L’approche de cette occurrence est venue rappeler aux Burkinabè l’existence de la liberticide et anti-démocratique « Loi Cherif » du 7 avril 2015 modifiant le code électoral dans le sens de légaliser les idées nées de la volonté des patrons des insurgés d’octobre 2014 d’ostraciser des Burkinabè et de se ménager des espaces et des conditions favorables pour leurs propres promotions au plan autant social que politique. Ainsi donc, en plus d’exclure des Burkinabè de la compétition politique pour leur soutien somme toute légitime et légal à la modification de l’article 37 de la Constitution, le nouveau code électoral interdit la couverture médiatique, trois longs mois durant , de toute activité des partis politiques en dehors des cérémonies d’investitures des candidats. La raison avancée serait que cela est une campagne déguisée. Ce qui donnerait un avantage déloyal aux bénéficiaires. Et pourtant, ils voudraient montrer qu’ils méconnaissent les réalités de la vie politique, que les députés du CNT ne s’y prendraient pas autrement. La politique est une activité permanente. La campagne électorale n’est qu’un coup d’accélérateur en vue du sprint final vers le graal que livrerait le verdict des urnes. Interdire la couverture des activités, c’est priver volontairement les Burkinabè de l’Information, un droit inscrit dans la Constitution et évidemment enlever à la presse une matière qui participe de son dynamisme et de son essor économique en tant qu’entreprise.

Un texte aux non-dits éloquents

Invitée à donner plus de précision sur le contenu et le champ d’application de ladite loi, la présidente du Conseil supérieur de la communication (CSC) est restée évasive comme si elle ne comprenait pas grand-chose de ce texte à enjeux multiples du CNT. Tenez, pour l’institution pilotée par Nathalie SOME, par campagne déguisée « il faut entendre toute activité de soutien à un parti, formations et regroupements politiques, un candidat ou un regroupement de candidats indépendants. Il s’agit notamment de toute activité au cours de laquelle les organisateurs, personnalités politiques ou non, font des dons, parrainent ou participent à des cérémonies, à des évènements coutumiers, religieux, culturels, sportifs, commerciaux, inaugurent des édifices ou des ouvrages au bénéfice des populations. » Une explication de concept qui suscite de grandes intégrations ; surtout que les hommes politiques, chez nous comme ailleurs, portent souvent plusieurs casquettes et donc ont plus d’un statut au plan social. Ainsi par exemple, le Dima de Boussouma, Naba SONRE, est un chef de parti et bien connu du paysage politique du Burkina. Aller couvrir la cérémonie de Basga de ce dignitaire coutumier serait-ce couvrir une campagne déguisée ? Il n’est pas le seul, nombre de ses pairs militent activement dans des partis politiques et organisent ou parrainent es qualité des activités diverses. Et ces activités d’inauguration d’ouvrages ou d’édifices au profit des populations parrainées pour des officiels souvent avec des invités de marques, politiciens bien connus, ne faut-il pas les considérer comme une campagne déguisée au profit de ces derniers ? Les cas d’ambiguïtés peuvent être multipliés et si l’on veut être logique, aucune activité au Faso, surtout privée, ne recevra de couverture médiatique durant le temps concerné. Une autre interrogation : d’ailleurs pourquoi limiter à la presse le choix de ses activités que lui reconnaît la Loi fondamentale ? Ce n’est ni plus ni moins qu’une censure, un musellement.
En fait, en empêchant la presse de faire l’écho des bonnes actions de ceux qui prétendent à nous gouverner, c’est apporter un soutien déguisé à cette race de politiciens parvenus et égoïstes qui rechignent à poser des actes en faveur du peuple sous prétexte que ce sont ceux qui ont détourné qui ont les moyens d’entreprendre des actions pour soulager les souffrances des populations.
Penser que le sevrage des Burkinabè de l’information peut les amener à entendre les discours populistes de certains candidats en mal de repère et qui comptent jouer sur la naïveté réelle ou supposée des électeurs, c’est se gourer. Si un homme politique pose un acte en faveur des populations, ce n’est pas le manque de couverture médiatique qui peut empêcher celles-ci d’avoir de la reconnaissance pour leur bienfaiteur. Bien au contraire !
Il faut simplement dire que cette loi est un écran de fumée dans le paysage médiatique, cela d’autant que toutes les définitions du concept clé qu’est « campagne déguisée » sont entourées de flou. Lisez plutôt celle-là ! Selon la loi, « est également assimilée à une campagne électorale déguisée ; toute autre activité réalisée à des fins de propagande au profit d’un parti, formations et regroupements politiques, un candidat, de candidats, indépendants. » Entre l’acte désintéressé et la propagande, c’est une simple question de perception. Par cette fameuse loi, les médias burkinabè sont injustement privés de matière première pour satisfaire des politiciens qui cherchent à jouer aux justiciers. Mais comme les autres savent aussi réfléchir comme les députés du CNT, ceux qui ont les moyens sollicitent la presse internationale pour couvrir leurs évènements. De ce point de vue, ce sont les petits partis qui trinquent et la presse nationale lésée.

Ahmed NAZE
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